La chambre régionale des comptes de Bretagne vient de publier son rapport sur la gestion de Ploërmel Communauté (Morbihan) pour les exercices 2018 et suivants. Ce document met en lumière une situation financière globalement saine, mais pointe aussi plusieurs axes d’amélioration, notamment en matière de gouvernance, d’assainissement collectif et d’infrastructures publiques. Décryptage des principaux enseignements.
Une intercommunalité en mutation, mais sans projet structurant clair
Créée en 2017 à la suite de la fusion de plusieurs intercommunalités, Ploërmel Communauté regroupe aujourd’hui 30 communes et 42 244 habitants. Son territoire, à la croisée des routes entre Rennes, Lorient et Vannes, joue un rôle clé dans le dynamisme du nord-est du Morbihan.
Cependant, la chambre régionale des comptes souligne l’absence d’un pacte de gouvernance et de projet de territoire structurant. Si la communauté a adopté une stratégie de développement en 2021, celle-ci se limite au cadre du contrat de relance et de transition écologique (CRTE). En d’autres termes, il manque une vision globale et cohérente du développement territorial, notamment en matière d’aménagement et de fiscalité.
Des finances sous contrôle, mais des investissements à surveiller
L’un des points positifs du rapport est la situation financière solide de l’intercommunalité. Grâce à une hausse des recettes fiscales et institutionnelles, Ploërmel Communauté a autofinancé une grande partie de ses investissements (25 millions d’euros entre 2018 et 2022) et recouru très peu à l’endettement (seulement 1,4 million d’euros d’emprunts sur cette période).
Toutefois, la chambre met en garde : le programme d’investissement futur, estimé à 53 millions d’euros, nécessitera une hausse de la fiscalité en 2026 ainsi qu’un quasi-doublement de l’endettement. La communauté devra veiller à ne pas alourdir excessivement la pression fiscale sur les habitants et les entreprises.
Autre point de vigilance : l’absence de pacte fiscal et financier, qui pose la question du financement des services et infrastructures entre les communes membres.
L’assainissement collectif en cours d’uniformisation, mais des incohérences à corriger
Depuis 2020, Ploërmel Communauté gère l’assainissement collectif, mais elle a hérité de modes de gestion très disparates. En 2022, elle a signé un contrat unique de délégation de service public pour harmoniser ce secteur. Cependant, la chambre des comptes relève plusieurs dysfonctionnements :
- Un unique candidat lors de l’appel d’offres, dû à un délai trop court pour d’autres soumissionnaires.
- Des tarifs incohérents pour les usagers industriels, avec des prix parfois inférieurs à ceux des particuliers, ce qui n’encourage pas à la réduction des rejets polluants.
- Des lacunes dans le contrôle des rejets industriels, qui méritent un renforcement.
L’harmonisation des tarifs est prévue d’ici 2031, mais la gestion de l’eau potable et des eaux usées reste un point critique.
Un retard inquiétant dans le projet de crématorium
Face à une demande croissante des habitants, Ploërmel Communauté a lancé en 2020 un projet de crématorium, sous la forme d’une concession de service public. L’objectif était d’offrir un service accessible à un tarif modéré (755 € la crémation) grâce à une concession de 25 ans.
Cependant, le chantier accuse un retard d’un an, et la chambre s’inquiète du montage juridique et financier complexe du projet. L’intercommunalité devra suivre de près l’exécution du contrat pour éviter de mauvaises surprises financières.
Les équipements aquatiques de Ploërmel et Mauron sont vieillissants et fortement déficitaires (-361 000 € en 2022). En 2021, un détournement de fonds a été découvert dans la régie de recettes de la piscine. L’affaire a conduit à une sanction et une réorganisation, mais la chambre recommande un renforcement des contrôles pour éviter tout nouveau dysfonctionnement.
En parallèle, Ploërmel Communauté prévoit la construction d’un nouveau centre aquatique d’ici 2028, avec un coût estimé à 17,8 millions d’euros. Cependant, l’estimation de la fréquentation (185 000 entrées annuelles) semble optimiste, et la communauté devra s’attendre à un doublement du déficit de fonctionnement (0,67 M€).
Des recommandations pour une gestion plus rigoureuse
Au terme de son analyse, la chambre régionale des comptes émet plusieurs recommandations clés :
- Revoir les statuts pour clarifier les compétences obligatoires, notamment en matière d’assainissement.
- Améliorer la transparence de la gouvernance, notamment en informant mieux les élus et en prévenant les conflits d’intérêts.
- Élaborer un pacte fiscal et financier pour garantir une meilleure équité entre les communes.
- Renforcer le suivi des budgets annexes, notamment ceux liés aux zones d’activités économiques.
- Sécuriser la régie de recettes des piscines en instaurant des contrôles réguliers.
Des finances saines, mais des défis de gouvernance à relever
Si Ploërmel Communauté affiche une situation financière maîtrisée, elle doit encore progresser en matière de gouvernance et de gestion des services publics. L’enjeu principal reste d’assurer des investissements ambitieux tout en évitant une pression fiscale excessive.
L’avenir de l’intercommunalité dépendra de sa capacité à structurer une vision de long terme et à améliorer la gestion de services stratégiques comme l’assainissement, les infrastructures publiques et les équipements collectifs.