Un magistrat aguerri qui s’oppose à l’expulsion et au rapatriement d’un Nord-Africain… un cliché. Et pourtant, c’est l’affaire qui secoue actuellement l’Italie, et dont le but est de faire tomber le gouvernement de Giorgia Meloni. Le refoulé est le chef de la police judiciaire libyenne, Osama Almasri Najim.
Ce que l’on sait
C’est une première dans toute l’histoire de la République italienne : trois ministres et un secrétaire d’État de premier plan – Giorgia Meloni, Premier ministre, Matteo Piantedosi, ministre de l’Intérieur, Carlo Nordio, ministre de la Justice et Alfredo Mantovano, secrétaire d’État à la présidence du Conseil – ont été concomitamment inscrits au registre des signalements de délits et font l’objet d’une ouverture d’enquête. Il sont soupçonnés de complicité dans la libération de Najim Osama Almasri, accusé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité par la Cour Pénale Internationale de La Haye. Il aurait organisé homicides, violences sexuelles et tortures dans les prisons de Tripoli dont il est le responsable, en particulier dans l’établissement de Mitiga où sont détenus des milliers de clandestins qui espèrent atteindre l’Europe.
Le 19 janvier dernier, il est interpellé à Turin à la sortie du match de foot Juventus-Milan. Le 21 janvier, la Cour d’appel de Rome ne valide pas son arrestation pour un vice de forme : il manque un acte prévu par la procédure de la Cour pénale internationale, le ministre de la Justice n’a pas été averti à temps. En considération de sa «dangerosité sociale», les autorités italiennes adoptent une mesure d’expulsion « pour des raisons de sécurité de l’État » et affrètent un avion pour son rapatriement. Un avion des services secrets.
La réaction de Giorgia Meloni
Dans une vidéo officielle, Giorgia Meloni souligne que le mandat d’arrêt de la CPI est arrivé comme un cheveu sur la soupe, quand le Général se trouvait en Italie, après avoir séjourné les douze jours précédents dans d’autres pays européens sans être dérangé, notamment en Angleterre, en Belgique et en Allemagne.
Il est de plus, intéressant de noter que le procureur qui a décidé de déclencher toute cette affaire qui sent le secret d’État n’est autre que Francesco Lo Voi, le même qui avait mis en examen Matteo Salvini pour séquestration de personnes, dans son action contre l’immigration illégale (procès gagné par le chef de la Lega, mais pour lequel Lo Voi demandait six ans de prison).
Le dessous des cartes
Tirant parti d’une impasse juridique, il est assez probable que le gouvernement de Giorgia Meloni ait rapatrié le Généal Almasri pour maintenir de bonnes relations avec Tripoli avec qui l’Italie négocie depuis des années dans le but d’endiguer les arrivées des migrants. Rome est, de plus le premier partenaire énergétique du pays. Il s’agit donc d’un choix politique, celui d’un gouvernement qui entend, dans le cas présent, faire passer les intérêts de la nation avant ceux d’une instance supranationale. Pour Antonio Tajani, ministre des Affaires étrangères, « le tribunal de La Haye n’est pas le Verbe, ce n’est pas la bouche de la vérité. »
Si lE dossier Almasri promet de nouveaux retentissements, il est avant tout l’énième manifestation de la politisation de la magistrature italienne, qui n’a de cesse de miner toutes les initiatives anti-migrations (le dernier transfert de clandestins vers les centres de permanence d’Albanie vient encore d’être invalidé). Dans une autre transmission, le Premier ministre rappelle que « certains juges veulent faire la politique industrielle, les politiques d’immigration, ils veulent choisir si l’on peut ou non réformer la justice, ils veulent décider de la dépense publique, en gros, ils veulent gouverner. Le problème, c’est que si je commets des erreurs, les Italiens me renvoient, mais si eux (les magistrats) commettent des erreurs, personne ne peut rien faire. Or, aucun État démocratique au monde ne fonctionne ainsi. »
Affaire à suivre…
Audrey D’Aguanno
Une réponse à “Giorgia Meloni dans la tourmente : l’affaire Almasri fera-t-elle tomber le gouvernement ?”
Commentaire futile il est vrai: quand je vois un article sur l’Italie avec une photo de Giorgia, je la télécharge (ça agace un peu ma femme).