En 1988, Yves Rocher faisait la guerre à la BNP Paribas

« Yves Rocher a donné à BNP Paribas le mandat de vente de sa filiale Petit Bateau (244 millions de chiffre d’affaires). La banque conseille par ailleurs le groupe pour restructurer ses finances. » (Challenges, 23 janvier 2025). Voilà qui amusera tous ceux qui se souviennent qu’en 1988, désireux de pratiquer une politique de diversification dans le textile (Yves Rocher avait déjà un pied dans ce secteur après avoir créé Françoise Saget, entreprise qui vendait des articles textile par correspondance), Yves Rocher (PDG) et Didier Rocher (directeur général) avaient acheté Petit Bateau à la famille Valton. Mais, rapidement, des contrôleurs de gestion du groupe Yves Rocher découvrent que les comptes de Petit Bateau sont « pourris » et ne correspondent pas à ce qui leur a été vendu. Or, dans cette opération de vente, apparaissait un acteur important : BNP Paribas qui jouait deux rôles. D’un côté, en tant que banque commerciale, elle prêtait de l’argent à Petit Bateau – et le niveau de l’endettement était devenu très important. De l’autre sa filiale Banexi « conseillait » la direction de Petit Bateau et cherchait un repreneur. Donc BNP Paribas percevait à la fois des intérêts et des honoraires.

Estimant être victime d’une tromperie initiée par BNP Paribas, Yves Rocher réclame à cette dernière une « compensation » financière qui lui est refusée – le président de la banque le Breton René Thomas, malade, est obligé de laisser le directeur général agir. Yves Rocher entre donc en guerre contre la banque ; pour ce faire, il organise différentes opérations. Cela va de la mobilisation du personnel du groupe à l’expédition d’un “journal“ à tous les personnages figurant dans le Who’s who. Des publicités anti-BNP sont publiées dans les grands journaux américains, allemands, britanniques… Mais le plus original réside dans une vague de démissions de maires du Morbihan. Mais ce n’est qu’un début puisque deux manifestations de soutien à Yves Rocher ont lieu à Paris et à Vannes. Avec des milliers de personnes et une foule d’élus bretons. Par conséquent BNP Paribas se trouve confrontée à une situation qui la dépasse complètement. Le gouvernement fait pression sur la BNP ; celle-ci est contrainte de faire de « gros efforts » : effacement d’une partie de la dette, prêt à un taux préférentiel, recapitalisation… Ainsi l’entreprise Petit Bateau est sauvée et Yves Rocher raconte volontiers, qu’au final, il a fait « une bonne affaire » !

Recentrer l’activité sur « notre cœur de métier »

Aujourd’hui, le petit-fils d’Yves Rocher, Bris Rocher, président du groupe, veut recentrer l’activité sur « notre cœur de métier », c’est-à-dire la cosmétique. Et injecter 100 millions d’euros supplémentaires sur quatre ans dans la recherche, la rénovation des boutiques en France et le développement en Asie. « A ce stade, nous avons zéro repreneur. Nous ne faisons qu’initier le process (…) Je n’ai pas de calendrier », explique Bris Rocher (Ouest-France, jeudi 16 janvier 2025). Mais il peut faire confiance à la filiale de BNP Paribas qui s’occupe des fusions-acquisitions pour trouver un repreneur. Le grand-père Yves Rocher a acheté Petit Bateau, le petit-fils Bris Rocher vend… Ainsi vont les affaires !

Aujourd’hui Petit Bateau, c’est 2 300 salariés (dont 1 400 en France), une usine et une unité logistique en Champagne (Troyes), une usine au Maroc (Tenmar), 370 points de vente, 760 détaillants.

B. Morvan

Illustration : DR
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