La montée générale de la violence chez les mineurs est confirmée par les chiffres – les atteintes aux personnes explosent, l’augmentation des enfants meurtriers et supérieure à celle des adultes meurtriers etc. – les affaires sont de plus en plus graves, et les auteurs de plus en plus jeunes, mais qu’à cela ne tienne, tout un pan de la nation, notamment au sein de l’appareil judiciaire, nie l’ensauvagement et prêche que notre société n’est pas plus violente qu’auparavant. La culture de l’excuse règne, imperturbable. Et ceux qui alertent sont ignorés.
Tel Maurice Berger, pédopsychiatre et psychanalyste, spécialiste internationalement reconnu de la violence chez les enfants et les adolescents, et que l’on ne peut pas accuser d’accointance avec l’ « extrême droite ». Il n’a de cesse, depuis de nombreuses années, de prévenir et d’avertir, de vouloir faire « Comprendre la violence, sans l’excuser ». Mais sa voix est hélas, peu entendue. Pourtant son professionnalisme et son expérience sont inégalables. Face à la déconnexion entre les violences perpétrées et la sanction (ou son absence), il constate que la justice pénale peu répressive n’est plus en adéquation avec la jeunesse d’aujourd’hui :
« Une situation que la France n’a jamais connue : c’est à dire une très forte augmentation de la violence qui s’accompagne d’une érosion de la peine. Blessure réelle, peine virtuelle, blessure irréparable, peine futile. »
Il analyse cela dans son dernier ouvrage, Mineurs violents, État inconsistant. Pour une révolution pénale publié chez L’Artilleur. Dans une entrevue sur Tocsin, il en appelle à « une révolution pénale centrée sur comment protéger les citoyens, centrée sur le besoin d’interdits clairs matérialisés, fermes, pour les sujets violents. »
Toujours sur Tocsin:
« Un jeune homme de 25 ans a été frappé sans raison alors qu’il sortait d’une boite de nuit, mis au sol, ses agresseurs ont joué au football avec sa tête. Il a présenté des fissures du crâne, une déchirure des méninges, une pneumocéphalie et garde des séquelles majeures. Il ne pourra probablement jamais retravailler. Lors du procès les faits sont qualifiés de violence suivie de mutilations entraînant infirmité permanente, passible de 10 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amendes d’après l’article 222-9 du code pénal. Un des deux agresseurs, récidiviste, est condamné à 10 mois de prison avec sursis. Le parquet ne fait pas appel, et cet auteur ne fera pas un jour d’incarcération. »
Relayés au rang des « faits divers », ces drames, aggravés par l’injustice la plus aberrante, se multiplient. Selon Béatrice Brugère, magistrate pénaliste et présidente du syndicat Unité Magistrats, sur les 160 000 mineurs mis en cause dans les affaires de violence sur les personnes, 55.000 condamnations sont prononcées, seuls 240 d’entre eux sont en rétention. Cela équivaut à un taux d’incarcération de 0,6 %. À ce propos, elle dément avec vigueur le premier argument qui est opposé à l’application des peines, à savoir, le manque de place de prison, puisque, concernant les mineurs, il n’y a pas de problème de surpopulation. Il s’agit selon elle, d’un problème philosophique, lié au refus d’incarcérer, de réprimer, de sanctionner.
Voix singulière au sein de ses pairs, auteur de « Justice, la colère qui monte« , paru aux éditions de l’Observatoire, elle n’est pas plus écoutée que le précédent. Pourtant, ce quel a à dire sur les défaillances de notre système judiciaire est d’une grande pertinence et pourrait inspirer sa refondation.
Audrey D’Aguanno
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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