Ouessant. Une mobilisation pour sauver le feu du phare du Créac’h, symbole de la sécurité maritime bretonne

Le phare du Créac’h, emblème d’Ouessant et vigie des navigateurs depuis 1863, est aujourd’hui menacé. Une étude visant à rationaliser la portée des feux maritimes pourrait entraîner la réduction de sa puissance lumineuse, voire son déclassement. Pourtant, ce géant de la pointe du Finistère est bien plus qu’un simple repère pour les marins : il est un symbole historique, technologique et patrimonial. Face à cette menace, une mobilisation s’organise pour préserver ce trésor breton.

Une histoire liée à l’évolution maritime

Construit pour répondre aux besoins des grandes flottes commerciales du XIXe siècle, le phare du Créac’h s’élève fièrement sur Ouessant. Il fut érigé à une époque où l’essor des empires coloniaux exigeait une signalisation accrue dans les zones maritimes dangereuses. Dès sa mise en service, ce phare devint un terrain d’expérimentation pour les technologies les plus avancées de son temps.

En 1937, lors de l’Exposition universelle, le phare du Créac’h se dote du système lumineux le plus puissant au monde, avec une optique produisant une puissance lumineuse de 500 millions de candelas. Sa structure, impressionnante avec une lanterne de 13 mètres de haut et un appareil lenticulaire flottant sur un bain de mercure, témoigne de l’ingéniosité des ingénieurs des Phares et Balises. Il est depuis un phare-test pour les avancées technologiques et un symbole de l’excellence maritime française.

Une menace pesant sur un phare irremplaçable

Aujourd’hui, la Direction des Affaires Maritimes remet en question le rôle du Créac’h dans la signalisation maritime. Selon une nouvelle classification, le phare serait considéré comme « redondant » par rapport à son voisin, le phare du Stiff. Sa portée pourrait être réduite à 19 miles nautiques, contre 37 miles actuellement. Une décision qui suscite l’indignation des marins et des Ouessantins, pour qui le Créac’h reste un repère essentiel.

Christian Dubet, spécialiste des phares et fils d’un ancien gardien du Créac’h, exprime son incompréhension :

« Déclasser le Créac’h, c’est lui arracher ses galons après plus de 160 années de service. Même à l’ère du GPS, un marin préfère toujours s’appuyer sur un phare visible de loin. Que faire en cas de panne électronique ou de brouillage des signaux ? »

Au-delà de son rôle technique, le Créac’h est profondément ancré dans l’imaginaire collectif. Les marins, qu’ils soient pêcheurs, plaisanciers ou navigateurs de course, ont tous une histoire liée à son feu bienveillant. Jacques Caraës, double détenteur du Trophée Jules Verne, témoigne de l’importance émotionnelle du phare :

« Après un tour du monde sans escale, apercevoir le faisceau du Créac’h est une délivrance. C’est un aimant, un guide. Son intensité lumineuse balaye nos visages fatigués, nous ramenant à la sécurité et à la terre après 48 jours en mer. »

Une mobilisation populaire

Face à cette menace, l’association Ouessant Vent de Bout a lancé une pétition pour sauver le phare. En seulement deux semaines, elle a recueilli plus de 16 400 signatures. Les habitants d’Ouessant, soutenus par des marins et des amoureux du patrimoine, refusent de voir leur phare perdre de sa splendeur.

La pétition met en avant non seulement l’importance pratique du Créac’h pour la navigation, mais aussi sa valeur patrimoniale et culturelle. Classé monument historique, le phare sans son feu serait réduit à une coquille vide, déplore Christian Dubet.

Alors que des millions d’euros sont investis dans la réhabilitation du musée des phares situé au pied du Créac’h, il serait incohérent de dépouiller ce phare emblématique de sa lumière. Le Créac’h n’est pas qu’un outil ; il est un témoin vivant de l’histoire maritime et une fierté pour la Bretagne.

Pour soutenir cette cause et préserver ce joyau, signez la pétition ici : chng.it/Yf9n8wmFRt.

Crédit photo : ©Dominique Baot

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