Le concept de « wokisme » domine aujourd’hui les débats intellectuels et culturels en Occident. Dans son essai Comprendre la révolution woke, publié chez Gallimard, Pierre Valentin propose une analyse approfondie de cette idéologie en vogue, de ses origines intellectuelles à ses implications sociales. Cet ouvrage, dense et argumenté, explore le wokisme comme une pensée essentiellement destructrice, dénuée de toute capacité à reconstruire. Retour sur les grandes lignes de cette réflexion.
Une idéologie fondée sur la négation
Pierre Valentin définit le wokisme comme une « idéologie de la pure négation ». Selon lui, cette pensée se concentre uniquement sur la destruction des normes existantes sans proposer de vision constructive. Il illustre cette thèse en évoquant des thèmes centraux tels que la diversité, l’inclusion et l’équité. Contrairement à ce qu’elles prétendent, ces notions ne valorisent pas le pluralisme ou le mérite. Au contraire, elles visent à dissoudre les structures traditionnelles jugées oppressives, qu’elles soient culturelles, sociales ou économiques.
Par exemple, la « diversité », telle qu’elle est défendue par les militants woke, n’est pas un éloge du pluralisme, mais une attaque contre les groupes considérés comme dominants. Cette logique purement antagoniste, affirme l’auteur, reflète une incapacité à envisager un avenir commun basé sur des valeurs partagées.
Une génération en quête de repères
Dans le chapitre intitulé La psychologie du dissident, Valentin dresse un portrait sans concession de la « génération woke ». Majoritairement composée de jeunes de moins de 35 ans, cette génération évolue dans un monde marqué par une surprotection parentale, une explosion des divorces et une surexposition aux écrans et aux réseaux sociaux. Ces facteurs, combinés à une culture de la victimisation, expliquent selon l’auteur leur hypersensibilité et leur propension à percevoir les désaccords comme des « micro-agressions ».
Cette jeunesse, bien que privilégiée sur le plan matériel, souffre d’une fragilité émotionnelle exacerbée. L’explosion des troubles mentaux, attestée par des études récentes, alimente cette quête de reconnaissance et de protection, souvent traduite par des revendications identitaires extrêmes.
Une généalogie intellectuelle complexe
Pour comprendre les racines du wokisme, Valentin remonte aux penseurs majeurs qui ont influencé cette idéologie. Il identifie trois courants principaux :
- La French Theory, incarnée par Michel Foucault, qui a popularisé l’idée que le savoir est une forme de pouvoir et que les normes sociales sont arbitraires.
- Judith Butler et le mouvement queer, qui déconstruisent les notions traditionnelles de genre. Butler soutient que la fluidité identitaire est essentielle pour échapper aux systèmes oppressifs.
- L’École de Francfort, notamment Herbert Marcuse, qui défend une critique radicale de l’ordre établi, où tout progrès passe par une négation totale du passé.
Ces influences ont façonné une pensée qui rejette l’universel, perçu comme une invention occidentale oppressive. À travers le wokisme, cette négativité a pris une forme militante, s’attaquant à toutes les structures jugées dominantes.
Un reflux en perspective ?
L’auteur conclut que le wokisme est condamné à l’autodestruction, car il repose sur une dynamique de négation perpétuelle. Les récents scandales survenus aux États-Unis, comme les événements du campus d’Evergreen, ont révélé les limites de cette idéologie. En France, le soutien au wokisme semble également reculer, même si ses adeptes continuent d’occuper des positions influentes dans les médias, les universités et les institutions publiques.
Cependant, Pierre Valentin reste pessimiste quant à l’avenir. Il craint que cette idéologie laisse une empreinte durable sur les jeunes générations, les rendant incapables d’envisager un projet collectif basé sur des valeurs partagées. La sacralisation de la victimisation et le rejet de l’héritage culturel pourraient freiner toute tentative de reconstruction sociale.
Quelle réponse face au wokisme ?
Pierre Valentin invite ses lecteurs à résister à cette pensée destructrice en réaffirmant l’importance de l’universel et de la transmission culturelle. Selon lui, le combat ne doit pas se limiter à dénoncer le wokisme, mais à reconstruire une société qui valorise le mérite, l’excellence et le dialogue. Il appelle à un sursaut collectif pour protéger les valeurs fondamentales de liberté, de responsabilité et de solidarité.
En conclusion, Comprendre la révolution woke est un essai essentiel pour quiconque souhaite appréhender les dérives de cette idéologie. Loin d’être une simple dénonciation, ce livre propose une analyse rigoureuse et documentée, invitant à une réflexion profonde sur l’avenir de nos sociétés.
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