Une récente étude menée par l’Ifremer révèle un phénomène fascinant : les marées terrestres, provoquées par l’attraction gravitationnelle de la Lune et du Soleil, pourraient réactiver les failles sous-marines. Cette réactivation peut entraîner des émissions significatives de méthane, un puissant gaz à effet de serre, ainsi que potentiellement influencer l’activité sismique. Ces découvertes apportent un éclairage inédit sur les interactions complexes entre les forces naturelles terrestres et sous-marines, tout en ouvrant de nouvelles pistes pour la surveillance des risques environnementaux et sismiques.
Les marées terrestres : des forces invisibles mais puissantes
Tout comme les marées océaniques, les marées terrestres sont des déformations lentes de la croûte terrestre dues aux forces gravitationnelles de la Lune et du Soleil. Cette étude, publiée dans le Journal of Geophysical Research: Solid Earth, démontre que ces déformations peuvent influencer la pression des fluides emprisonnés dans les couches sédimentaires et réactiver les failles géologiques sous-marines.
Les chercheurs de l’Ifremer ont mené leurs travaux dans le cadre des projets ANR Blame et DOORS, en se concentrant sur une zone de la marge roumaine en mer Noire. À bord du navire Pourquoi pas ?, ils ont équipé deux failles d’instruments de mesure sophistiqués, les piézomètres, capables de suivre les variations de température et de pression dans les sédiments sous-marins.
Méthane et sismicité : des liens révélés par 42 jours d’observation
Les premières données, collectées sur une période de deux semaines en septembre 2021, ont montré une activité synchronisée de dégazage de méthane sur deux failles distantes de 790 mètres. Ces dégazages étaient parfaitement alignés avec les cycles des marées terrestres, qui ont une périodicité d’environ 12 heures.
Selon Vincent Riboulot, géologue marin à l’Ifremer et second auteur de l’étude, « la déformation de la lithosphère induite par les marées terrestres, combinée à une pression élevée des fluides, atteint un seuil critique, réactivant ainsi les failles et libérant du méthane dans la colonne d’eau ».
Cependant, les données recueillies sur une période plus longue, de 19 mois entre octobre 2021 et mai 2023, n’ont pas révélé la même interaction. Ce contraste s’explique par la baisse de pression des fluides après les dégazages initiaux, rendant les failles moins sensibles aux cycles des marées jusqu’à ce que le processus de recharge des fluides soit achevé.
Implications globales : séismes et réchauffement climatique
Cette étude ne se limite pas à la mer Noire. Les résultats pourraient transformer notre compréhension des mécanismes déclenchant certains tremblements de terre et des émissions de gaz à effet de serre, deux enjeux majeurs pour la planète. En identifiant le rôle des surpressions de fluides dans la réactivation des failles, ces travaux offrent des perspectives pour :
- Surveiller les risques sismiques dans des zones sensibles.
- Mieux comprendre les émissions de méthane, qui influencent directement le réchauffement climatique lorsqu’elles passent de l’océan à l’atmosphère.
Les failles sensibles aux marées terrestres pourraient également servir d’indicateurs pour la surveillance des zones à risque.
L’un des apports majeurs de cette étude est d’éclairer les contradictions relevées dans les recherches antérieures sur le lien entre les marées terrestres et la réactivation des failles. Les scientifiques démontrent que ce lien dépend principalement de la pression des fluides dans les failles et du cycle de recharge/décharge. Lorsque la pression est élevée, les failles deviennent sensibles aux marées, mais une fois la pression relâchée, elles cessent de réagir.
Ces découvertes marquent une avancée significative dans la compréhension des interactions entre les forces naturelles terrestres et sous-marines. Elles soulignent également l’importance des études à long terme pour observer les phénomènes cycliques complexes.
À une époque où les risques sismiques et les émissions de gaz à effet de serre sont au cœur des préoccupations mondiales, ces résultats renforcent l’idée que la surveillance des failles sous-marines et des fluides qu’elles contiennent est essentielle pour anticiper et gérer les risques. L’Ifremer, avec ses outils de pointe et son expertise, ouvre la voie à de nouvelles approches pour protéger notre planète.
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Une réponse à “Quand la Terre respire : comment les marées terrestres réactivent les failles sous-marines et libèrent du méthane”
On m’a appris que lorsque la mer monte le vent se réactive ar mor zo vont war uhel hag an a’el war ar gresk! Il suffisait d’écouter les vieux marins devant le baromètre de la criée et on voyait des chalutiers immatriculés LS, LR, B même SS venir se mettre à la cape dans le port…cela nous était arrivé autour de Belle-Isle le vent ayant tourné!