Mozambique : à l’origine de la révolte, cinquante ans de corruption et de désillusion

Depuis plusieurs semaines, le Mozambique, pays du Sud-est de l’Afrique qui fait face à Madagascar, est en proie à une vague de violence sans précédent, déclenchée par des élections contestées. Le pays, riche en histoire et en ressources naturelles, s’enfonce dans une crise sociale et politique où se mêlent frustration populaire, gouvernance corrompue et répression violente. Cette situation illustre les défis profonds auxquels fait face cette ancienne colonie portugaise, et soulève des interrogations sur l’avenir de cette nation d’Afrique australe.

Une élection sous tension

Les élections présidentielles et parlementaires du 9 octobre 2024 ont ravivé les tensions dans le pays. Le président sortant, Filipe Nyusi, ne pouvant briguer un troisième mandat, le parti FRELIMO (Front de libération du Mozambique), au pouvoir depuis l’indépendance en 1975, a présenté Daniel Chapo comme candidat. Malgré une abstention record de 56,5 %, Chapo a été déclaré vainqueur avec 65,17 % des voix, un chiffre corrigé à la baisse après un premier décompte donnant 70 %.

Cette victoire a été rejetée par l’opposition, menée par Venâncio Mondlane, candidat soutenu par une coalition démocratique. Mondlane, figure charismatique et critique acharné du régime, a dénoncé des fraudes massives. La contestation s’est rapidement transformée en révolte populaire, entraînant manifestations, affrontements violents et blocus économiques.

Une histoire de désillusions

Le Mozambique porte les cicatrices d’une histoire tumultueuse. Après une guerre d’indépendance sanglante contre le Portugal, le pays a basculé dans le communisme sous la direction du FRELIMO. Les politiques marxistes-léninistes, caractérisées par des nationalisations et des répressions brutales, ont plongé le pays dans le chaos économique et social. La guerre civile entre le FRELIMO et le mouvement rebelle RENAMO a duré près de deux décennies, laissant un pays exsangue.

Malgré les accords de paix de 1992, le FRELIMO a maintenu une emprise quasi absolue sur le pouvoir. Sous couvert de démocratie, les élections ont souvent été entachées d’irrégularités, tandis que la corruption gangrénait les institutions. L’espoir suscité par la découverte de vastes réserves de gaz naturel a été anéanti par l’instabilité et les attaques de groupes jihadistes dans le nord du pays, freinant les investissements internationaux.

Une colère populaire légitime

La population mozambicaine, en majorité jeune et désabusée, exprime aujourd’hui un profond ras-le-bol. Les promesses d’indépendance se sont traduites par une pauvreté persistante, une corruption endémique et une insécurité omniprésente. La fuite de Venâncio Mondlane, cible d’une tentative d’assassinat, a amplifié la colère dans les rues, où des manifestants affrontent régulièrement les forces de l’ordre. Depuis octobre, plus de 250 personnes ont trouvé la mort dans ces violences, tandis que des bâtiments publics, dont des sièges du FRELIMO, ont été incendiés.

Le pouvoir en place vacille, pris entre une répression inefficace et une population déterminée. Même au sein du FRELIMO, des voix critiques s’élèvent contre la gestion de la crise et la déconnexion du parti avec la réalité du terrain. Des figures influentes quittent discrètement le pays, redoutant une escalade de la violence.

L’international commence également à réagir. Des appels à la médiation, comme celui du président angolais João Lourenço, se multiplient, mais la situation demeure volatile.

La crise actuelle illustre les failles profondes d’un système politique sclérosé. Si le Mozambique regorge de ressources naturelles et humaines, il doit faire face à des défis immenses : rétablir la confiance dans ses institutions, combattre la corruption et répondre aux aspirations d’une jeunesse en quête d’un avenir meilleur. La révolte actuelle, bien qu’alarmante, pourrait être le catalyseur d’un changement nécessaire pour sortir le pays de cette spirale destructrice.

En attendant, le Mozambique reste un symbole tragique des promesses non tenues de l’indépendance africaine, où l’espoir d’une souveraineté retrouvée a été englouti par des décennies de mauvaise gouvernance.

Illustration : DR
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6 réponses à “Mozambique : à l’origine de la révolte, cinquante ans de corruption et de désillusion”

  1. Prétet Yvette dit :

    On pourrait dire également:  »Cinquante ans de corruption et de désillusion » pour la plupart des anciennes colonies telle l’Algérie qui est gouvernée par des soi-disant  »généraux » qui sont archi corrompus!..

  2. Franck dit :

    Quand on fait le bilan de toutes ces révolutions faites pour acquerir l’indépendance ou déstituer un dictateur on arrive à la conclusion que le communisme est un désastre pour les peuples.

  3. Gaï de Ropraz dit :

    Je ne veux pas être méchant surtout en cette periode festive, mais tout à fait entre nous, que leur souhaiter d’autre , sinon, suivant l’exclamation usitée: «  »Qu’ils se demerdent !… »

  4. Pascale Loutre dit :

    Tous les pays qui ont accédé à l’Indépendance ont dilapidé les legs des méchants colonisateurs, leurs dirigeants ont ruiné et tabassé leurs peuples qu’ils ont maintenus dans l’ignorance et le mensonge. Ces dirigeants ont ramassé le pognon pour s’en foutre plein les poches tout en se présentant comme des victimes.
    L’Algérie, comme bien des pays d’Afrique, est un exemple spectaculaire de cette corruption avec des dictateurs pourris jusqu’à l’os. Et dire que l’on verse à ces pays des aides de plusieurs millions d’euros qui ne vont pas là où il faut et qui permettent aux pourris de s’empiffrer davantage. Il faut cesser d’aider ces pays et cesser de baisser la culotte devant leurs injonctions. Mais notre cher Macron aime bien ça !…

  5. patphil dit :

    la corruption des zélites qui s’en mettent plein les poches, alors que le pays est riche en pétrone

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