Revue Éléments n°211 : vers la fin de la suprématie occidentale

Pour le dossier de son numéro 211, actuellement en kiosques, le magazine des idées pour la civilisation européenne se penche sur les transformations géopolitiques et géostratégiques qui redessinent le monde et remettent en cause les rapports de forces de que l’on pensait, à tort, immuables.

Vers un monde multipolaire la fin des illusions occidentales

Qu’on se le dise, l’Occident américano-centré a cessé de dominer le monde. Un  monde rendu à la multipolarité, aussi gros d’incertitudes que porteur de promesses pour les puissances désireuses de reprendre en main leur destin. Une chance aussi pour l’Europe d’exister – enfin – par elle-même et de s’affirmer en tant qu’espace civilisationnel à part entière. Encore faut-il que les Européens s’en donnent les moyens. Michel Geoffroy veut y croire. Énarque, essayiste associé à la fondation Polémia (il est l’auteur, entre autres, d’Occident go home ! Plaidoyer pour une Europe libre, paru en 2024 chez Via Romana), il nous prévient dans cet article en forme de manifeste : si aujourd’hui l’histoire se fait sans nous, demain, c’est contre nous qu’elle se fera.

Par Michel Geoffroy

Par une ruse dont l’histoire a le secret, il devient de plus en plus manifeste que les mondialistes occidentaux… perdent le monde. Et ils le perdent doublement : d’abord parce que l’Occident ne peut plus imposer sa loi aux nouveaux États civilisationnels émergents, ensuite parce que les oligarchies occidentales, enfermées dans leur bulle, ne comprennent tout simplement plus la marche du monde, d’un monde qui « se modernise sans s’occidentaliser », comme l’avait pourtant analysé Samuel Huntington1. Leur grille de lecture progressiste devient tout simplement obsolète : elles deviennent pour cette raison, mauvaises en tout. En d’autres termes, nous vivons une période de transition géopolitique où l’histoire se fait ailleurs qu’en Occident et, le plus souvent, contre lui. Mais s’agit-il pour nous, Européens, d’un risque ou d’une opportunité ?

Ci-gît le mondialisme

Non, le monde ne va pas s’unifier sous une direction nord-américaine. Aux États-Unis même, le doute s’installe : à chaque élection présidentielle, on annonce maintenant qu’il faudrait rendre l’Amérique puissante une fois encore2, ce qui revient tout de même à reconnaître que ce n’est plus le cas. Pendant que l’Europe sombre dans la déprime et le chaos multiculturel.

Nous vivons en direct, malgré le voile d’une propagande omniprésente et radicalisée, l’effondrement du rêve mondialiste occidental. L’Occident perd relativement parce que le Sud global dynamique le rattrape, et il perd objectivement car il décline sur de nombreux plans. Le déclin occidental ne relève donc plus du jugement de valeur comme on voudrait nous le faire croire (le fameux « déclinisme »), mais traduit une réalité de plus en plus visible, singulièrement en Europe. Nous assistons à une déconnexion rapide entre les nations émergentes qui créent de la richesse réelle et de la puissance, d’une part, et les Occidentaux qui s’enferment dans une économie fictive, parasite, financiarisée, d’autre part, comme l’illustre le dernier sommet des BRICS à Kazan.

Les plus hauts buildings, les ouvrages d’art les plus spectaculaires, les trains les plus rapides, les armes les plus sophistiquées ne se trouvent plus en Occident, mais en Russie, en Asie ou à Dubaï. Désormais, le modèle incarné par les BRICS apparaît, aux yeux de beaucoup, meilleur que le système occidental : une économie de marché dynamique, une population nombreuse et travailleuse, un État fort pour mettre au pas les oligarques et garantir le Bien commun – une notion qui n’a plus cours en Occident où l’on ne connaît plus qu’un empilement de « droits » narcissiques et de lobbys – et le respect de l’identité culturelle des peuples. Le monde des BRICS incarne de plus en plus la revanche historique des non-alignés et celle des grands espaces sur les thalassocraties anglo-saxonnes. Sur fond de rejet des lubies occidentales, notamment « sociétales », assimilées à une décadence abjecte.

Pire encore, l’Occident ne fait plus peur, comme l’ont montré l’offensive russe en Ukraine, l’attaque du Hamas d’octobre 2023, les actions des Houthis contre le trafic maritime occidental en mer Rouge ou encore le refus de la Mongolie d’arrêter le président russe malgré le mandat de la CPI ; de même, les sanctions économiques occidentales n’ont plus grand effet sur les puissances émergentes dont elles stimulent au contraire la créativité.

Hier, l’Occident faisait rêver les élites des pays colonisés. Aujourd’hui elles ne supportent plus les leçons, les doubles standards, la violence et l’impérialisme des Occidentaux. Et elles disposent désormais des moyens de leur résister. Il s’agit d’un changement majeur de paradigme dans les relations mondiales et auquel les Occidentaux ne se sont pas du tout préparés. Car le mondialisme reste une idéologie : le cosmopolitisme; alors que le monde multipolaire relève du fait, comme Poutine le rappelait lors de son entretien avec l’éditorialiste américain Tucker Carlson.

Nos oligarchies nous incitent à craindre cette nouvelle donne mondiale, car elles ne règnent plus sur nous que par la peur et la menace. Pourtant, l’émergence d’un monde multipolaire (ou polycentrique) peut aussi constituer une opportunité pour la civilisation européenne : celle de se libérer justement d’un Occident nord-américain qui nous vassalise et nous détruit. Car le terme Occident n’a désormais qu’un lointain rapport avec la civilisation européenne qui l’a vu naître. Il désigne au contraire une dé-civilisation, un espace vassalisé et l’empire du faux et du mensonge, des « valeurs » en caoutchouc qui varient en fonction des intérêts du suzerain et de la propagande omniprésente.

Il désigne surtout un hégémon malade, celui de la cancel culture qui recycle la vieille croyance progressiste de la table rase : une folie qui débouche toujours sur des catastrophes. C’est en tout cas ainsi que la majorité de la population mondiale nous voit et nous juge : comme une maladie civilisationnelle dont il faut se préserver, même si les immigrants envient encore ce qui subsiste de nos richesses.

(Pour lire la suite : en kiosques ou commandes sur www.revue-elements.com)

Crédit photo : DR
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Une réponse à “Revue Éléments n°211 : vers la fin de la suprématie occidentale”

  1. Gaï de Ropraz dit :

    Non, il n’y a aucun besoin de se questionnner.
    Et pour répondre de manière simple : Oui l’Histoire se fait sans Nous, contre-Nous … et ce pour une raison tres simple : L’Apathie de la race blanche au devant des invasions perpetuelles qui coulent le pays.

    Oui je sais : Je me répète au fil des articles (Que j’apprécie tant chez Breizh-Info -et c’est pour cela que je suis là-) mais j’ai bien peur d’alerter dans un désert obscur …

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