En Thuringe, une controverse éclate autour de Stephan Kramer, chef de l’Office pour la protection de la Constitution (AfV), accusé d’utiliser son poste pour cibler l’Alternative für Deutschland (AfD), un parti opposé à l’immigration. Des voix conservatrices et libérales, notamment au sein de la CDU et du FDP, demandent sa démission après des révélations accablantes publiées par Apollo News.
Une instrumentalisation politique des services de renseignement
Selon Apollo News, Stephan Kramer, membre du Parti social-démocrate (SPD), aurait délibérément ignoré les arguments juridiques et factuels pour classer l’AfD comme un groupe « extrémiste de droite confirmé ». Ce classement, qui permet des mesures de surveillance renforcées comme les écoutes téléphoniques et l’espionnage des membres du parti, a été utilisé pour stigmatiser la formation politique, pourtant deuxième parti le plus populaire au niveau national.
Kramer n’a jamais caché son opposition à l’AfD, qualifiant ses électeurs de « racaille brune » et exprimant ouvertement son souhait d’interdire le parti. Pourtant, cette position soulève des interrogations sur son impartialité, d’autant plus que des experts juridiques affirment qu’il n’a pas consulté de spécialistes avant de requalifier l’AfD comme organisation extrémiste.
Des accusations de menaces et de divulgation d’informations
Les révélations vont plus loin : Kramer est accusé d’avoir menacé physiquement un collaborateur qui avait exprimé des doutes juridiques sur ses décisions. En 2019, il a également été visé par une procédure disciplinaire pour avoir divulgué des informations confidentielles à des journalistes. Le ministère de l’Intérieur de Thuringe a qualifié Kramer de « risque sérieux pour la sécurité », évoquant une possible infraction pénale grave.
Malgré ces accusations, Kramer a bénéficié d’une protection politique sous l’ancien ministre-président Bodo Ramelow (Die Linke) et l’ex-ministre de l’Intérieur Georg Maier (SPD). Le nouveau gouvernement thuringien, dirigé par Mario Voigt (CDU), pourrait être amené à trancher sur son maintien en poste.
Une atteinte à l’État de droit ?
Les critiques se multiplient concernant la manière dont l’AfD est traitée par les institutions, certains observateurs soulignant une contradiction flagrante : les partis établis, qui accusent régulièrement l’AfD de menacer la démocratie, emploieraient des outils juridiques pour limiter la progression de ce parti. Volker Boehme-Neßler, expert en droit, souligne que « l’Office pour la protection de la Constitution devrait respecter l’État de droit », ce qui semble loin d’être le cas.
Thomas Kemmerich, leader du FDP en Thuringe, a appelé à une enquête approfondie et à la suspension de Stephan Kramer. Martin Henkel, de la CDU, a déclaré que si les accusations étaient confirmées, Kramer ne pourrait plus rester en poste. Cependant, la décision finale dépendra du gouvernement thuringien actuel, qui regroupe la CDU, le SPD et le Bündnis Sahra Wagenknecht.
Cette affaire soulève des questions plus larges sur l’utilisation des institutions publiques à des fins partisanes dans une démocratie qui se veut exemplaire. Les révélations sur Stephan Kramer mettent en lumière les tensions croissantes entre les partis politiques traditionnels et les forces anti-establishment, comme l’AfD, dans un climat politique allemand de plus en plus polarisé.
Manipulierte Gutachten, Bedrohung, Intrigen gegen kritische Mitarbeiter: Thüringens Verfassungsschutzchef Kramer baute sein Amt zur Kampfmaschine gegen die AfD um. In einer langen Recherche sichtete Apollo News interne Dokumente und sprach mit Insidern. https://t.co/ytbCsh2c89 pic.twitter.com/ZzpWHWcqxl
— Apollo News (@apollo_news_de) December 9, 2024
Illustration : DR
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