Nantes. Le Brocéliande, un temple du boboïsme qui ne déçoit pas…

Le Brocéliande incarne assez bien le renouveau de la restauration nantaise, en capacité désormais d’aligner une diversité impressionnante de belles tables, positionnées sur un créneau « bistronomie » de haute volée.

Situé en retrait de la rue Maréchal Joffre, devenue un axe d’implantation privilégié pour la « street food » bon marché, le Brocéliande mise davantage sur une clientèle de quartier aisée, adepte des «  after work », tout en drainant une  clientèle de bureau pressée, mais vigilante à consommer  « healthy ». Oui vous l’avez compris, il est devenu très compliqué de gloser sur la cuisine de notre époque, sans employer les anglicismes qui vont de pair avec leur marketing…

L’antre du boboïsme

D’emblée sautent aux yeux les codes de réassurance de l’univers bobo qui transpirent à grosses gouttes de cette adresse. Des terrasses en bois éclairées par des lampions multicolores, une atmosphère surannée de vieux troquet et sa déco néo-brocante, en passant par le port faussement bohème des serveuses et de la clientèle, sans oublier le parti pris végétarien et une carte des vins résolument « underground », tournée vers le nature, tout y est ! Ah si le panneau qui annonce les prises de commandes pour les paniers bio peut également intégrer la liste !

Allons au diable vauvert dans cet entre-soi de la bonne conscience et du nouvel art de vivre, car après tout, si c’est bien fait, on peut laisser de côté la part de théâtralisation d’une restauration branchouille tendance, passée maître dans l’art d’affecter une certaine décontraction. Sous condition qu’elle soit rigoureusement professionnelle…

Une cuisine végétarienne des plus savoureuse

Le gros point fort du Brocéliande réside dans le savoir-faire en matière de cuisine végétarienne. Particulièrement aboutie, riche en propositions originales et dont la parfaite exécution pourrait faire renoncer les carnassiers les plus véhéments à leur ration de protéines animales hebdomadaires.

Le menu déjeuner intègre en effet systématiquement des suggestions végétariennes sur l’entrée et le plat. Pour l’exemple la focaccia accompagnée d’aubergines grillées et d’un pesto maison d’anthologie, a comblé toutes nos attentes.

Ce pain à la mie aérée, originaire de Ligurie, est très souvent galvaudé dans nombre de boulangeries et de pseudos pizzeria qui le réduisent à un ersatz de pizza. Il existe plusieurs types de foccacie, plus ou moins épaisses, pouvant même prendre la forme d’une fine galette, ici la focaccia est plutôt épaisse de sorte que la mie s’imprègne de l’huile d’olive. Une vraie réussite.

On esquive cependant le tout végétarien, pour aller vers une entrée emblématique de la cuisine piémontaise : le vitello tonnato. Il s’agit d’un émincé de tranches de veau, nappées d’une sauce condimentée à base de thon, jaune d’œuf, anchois, câpres, huile d’olive et jus de citron. C’est bon, et la proposition inusuelle, témoigne d’une vraie sensibilité pour les gastronomies régionales.

Joli épilogue sur le dessert de cuisine dont l’adresse s’est fait une spécialité, avec ces abricots rôtis qui surmontent une époustouflante crème à la verveine.

Pour 24 euros entrée/plat/dessert, la cuisine fait preuve d’imagination et se montre maline dans la maîtrise de ses coûts par l’emploi de produits peu onéreux. Cela demande cependant à redoubler   d’ingéniosité pour   les magnifier.

Derrière l’apparente nonchalance de l’adresse, la mécanique interne du service est bien rôdée et se cale parfaitement avec la cadence infernale des fourneaux ! L’inverse aurait sonné le glas de la confiance, mais force est de constater que le professionnalisme est à la manœuvre.

Une carte des vins au parti pris nature

Dans l’alignement de la cuisine imprégnée de « valeurs », la carte des vins affiche un tour « nature », au point d’apparaître aux non-initiés de l’antimonde du vin, comme passablement ésotérique… Alors laissons nous guider, mais là encore, aucune indulgence pour des vins défectueux et réhabilités au nom d’un naturisme idéologique…

 Premier essai concluant avec pur jus du Landrat, un ventoux blancs sec sur un assemblage marsanne, clairette, ce dernier apporte toujours sa pointe d’originalité .  Joli blanc ! très axé sur la pêche et la nectarine, sans sécheresse et dénué de sensation alcoolés, avec les vertus d’un soufre quasi absent qui rend ce vin tactile et juteux.

À noter que les restaurant vend ses bouteilles, dans le cas présent on a craqué pour ce ventoux blanc vendu au prix de 21 euros.

Carton plein également avec le gamay Saint Romain d’un micro domaine du Beaujolais (la Chamaille), resplendissant de fruit, sans gaz excessif et véritablement sapide, on ne peut que souscrire. Il faut bien reconnaître que le mérite de ce type carte permet de découvrir des vrais vins d’auteurs qui diffèrent de la standardisation habituelle des grossistes en boisson.

Au final, le Brocéliande s’avère constituer une adresse hautement recommandable, le haut niveau de maitrise de la cuisine permet de serrer les coûts, sans altérer la qualité des plats qui rivalisent d’imagination chaque semaine en allant puiser dans le vaste répertoire des gastronomies du monde. À noter que le Brocéliande passe en mode Tapas sur les soirées et que, là encore,  les grignotages valent leur pesant !

Raphno

Crédit photos : Breizh-info.com
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2 réponses à “Nantes. Le Brocéliande, un temple du boboïsme qui ne déçoit pas…”

  1. Francesco dit :

    A voir les photos de plat, il ne faut certainement pas avoir faim. Bof, vous me direz que l’entourage bobo est propre à nous la couper. Je ne fréquenterai donc pas car je ne suis pas « in » à ce point! Je remercie l’auteur de l’article de m’avoir évité ce faux pas.

  2. Thibault Mortier dit :

    Merci à l’auteur d’avoir reconnu le talent chez l' »ennemi » ! Belle démonstration d’ouverture d’esprit et de papilles.

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