Le programme de Foulques Chombart de Lauwe est simple : virer Johanna Rolland (PS) de l’hôtel de ville. Vaste programme car, pour réussir, cette opération, il faudrait d’abord que l’électorat « de droite » soit dominant à Nantes ; ce qui n’est pas le cas. Comme dans toutes les métropoles, les Nantais votent « à gauche ».
Trois ans avant les élections municipales de 2026, Foulques Chombart de Lauwe (LR), conseiller municipal de Nantes, se mettait à rêver : il ambitionne de devenir maire et de succéder à Johanna Rolland (PS) qui veut briguer un troisième mandat. Il parle clair et fort : « Je me lève face à elle (…) A Nantes, en politique, il faut qu’on arrête l’eau tiède. Ma mission, clairement, c’est de redresser Nantes, de faire en sorte que chaque Nantais puisse être fier, à nouveau, de cette ville que j’aime tant et où je suis né. Et pour ça, il faut virer Johanna Rolland. On a trois ans pour se préparer. J’ai du monde autour de moi et je vais continuer à agréger. » Et de poursuivre : « Il ne faut surtout pas être dans la résignation. Je n’en peux plus des gens qui me disent qu’on ne peut plus rien changer. Il n’y a pas de gauche de droit divin à Nantes. Pour 2026, je crois que les gens veulent un changement, franc, courageux, équilibré mais pas modéré. Je sens que c’est le moment, cela me galvanise. » (Presse Océan, jeudi 12 octobre 2023).
Manifestement, « Foulques » croit en son aventure : « C’est vrai qu’une telle annonce à ce moment-là, ça surprend. Mais à moi de gérer la suite. Je vais travailler dans la continuité et donner envie aux Nantais de me rejoindre. La dynamique est enclenchée. » (Presse Océan, 13 octobre 2023). Question « dynamique », ça démarre fort puisque son groupe Mieux vivre à Nantes (les élus de droite du conseil municipal) le vire deux semaines plus tard. Mais cela ne l’empêche pas de poursuivre son réquisitoire contre Johanna Rolland : « La coupe est pleine. Que ce soit sur les sujets d’insécurité, sur la question de l’écologie, la fiscalité, le stationnement payant… Et aucun projet n’aboutit à Nantes. » Son programme demeure donc simple : « Virer Johanna Rolland » (Le Télégramme, vendredi 12 décembre 2023)
Les choses sérieuses ne traînent pas puisque « Foulques » crée un mouvement « Infiniment Nantes » et une association de financement de sa campagne. « Je suis celui qui a le plus envie. C’est le combat de ma vie. Ma candidature ne divise pas mon camp, elle le secoue… », répète-t-il (Presse Océan, vendredi 5 avril 2024). L’arrivée de Laurence Garnier (LR) au gouvernement arrange les affaires de « Foulques » qui peut devenir plus facilement le leader de la droite nantaise : « Je suis le seul qui pédale dans le bon sens pour le moment. Je vais lancer une campagne sur Facebook, j’ai fait 18 apéros soirées Infiniment Nantes, je vais aller tous les samedis à la rencontre des Nantais dans les quartiers. » (Presse Océan, mardi 24 septembre 2024).
Il faut embaucher des « militants » à France Travail
« Foulques » ne néglige pas la presse locale ; c’est un moyen de se faire connaître car il reste un parfait inconnu pour la grande majorité des Nantais. Aux journalistes, il confirme : « Bien sûr que je suis candidat, plus que jamais, compte tenu de la situation politique actuelle. » Son diagnostic ? « L’extrême gauche est aux portes du pouvoir, avec une Johanna Rolland coincée entre l’insoumis Andy Kerbrat et la cheffe de file des Verts Marie Vitoux. En 2026, ce sera l’extrême gauche ou moi. » (Ouest-France, Nantes, jeudi 17 octobre 2024). Sa campagne a donc démarré : réunions d’appartements, rencontres dans les quartiers le week-end, ce qu’il appelle des « Foulques contact ». Pour se faire connaître des Nantais, « Foulques » prévoit une importante campagne d’affichage au premier trimestre 2025, une assemblée générale de son mouvement (270 adhérents en six mois) et un meeting en janvier (Presse Océan, jeudi 17 octobre 2024) Pour ce qui relève de l’affichage, « Foulques » se trompe de siècle. D’une part les panneaux publicitaires (3 x 4 mètres) n’existent plus dans les villes, d’autre part l’ « affichage libre » effectué par les militants est devenu impossible puisque les lieux dédiés à cette activité ont disparu. Enfin, trouver à droite des « militants » volontaires pour ce genre de travail apparaît difficile – ce n’est pas dans la culture et les habitudes des adhérents de LR de mettre les mains dans les pots de colle. Seuls des gens payés pourraient accepter de « coller » aux rares endroits disponibles ; pour ça, il faut de l’argent…
« Foulques » ne possède pas une clientèle électorale majoritaire
Evidemment, « Foulques » oublie l’essentiel : Nantes – comme Rennes – est une ville sociologiquement de gauche : classes supérieures (professions intellectuelles, bourgeoisie progressiste), nouvelles classes moyennes urbaines, immigrés… La petite bourgeoisie à l’ancienne et les classes populaires (ouvriers et employés) sont minoritaires. Une victoire de la droite semble donc impossible. Il suffit de considérer les résultats obtenus dans la circonscription Nantes centre pour s’en convaincre. Au second tour des élections législatives de 2022, Andy Kerbrat (Nupes-LFI) y est élu à l’aise (24 550 voix, 55,34 %), mettant cinq mille voix dans la vue à la députée sortante Valérie Oppelt (En Marche, 19 809 voix, 44,66 %). Pour une première fois, c’est un coup de maître ! Le 30 juin 2024, il fait mieux : il est réélu dès le premier tour (34 341 voix, 51,67 %). Pour Valérie Oppelt (Renaissance-Ensemble), c’est la cata : 17 744 voix, 26,70 %. Ce soir-là, Kerbrat se sent investi d’une mission : « L’enjeu dès ce soir, c’est de soutenir les autres candidats de gauche qui peuvent l’emporter dans le département (…) On ne va pas se mentir, on est au bord du gouffre, mais ce département est une terre de résistance, il doit le rester. » (Ouest-France, Loire-Atlantique, lundi 1er juillet 2024)
Autant dire qu’Andy Kerbrat est assuré d’être réélu en 2027, au lendemain de l’élection présidentielle. Il possède de bonnes cartes. D’abord il appartient à la tendance LGBTQIA+ de La France insoumise. Ensuite on vient d’apprendre qu’il « milite » également dans la tendance 3-MMC. Toutes les conditions sont réunies pour que les électeurs de Nantes centre lui renouvellent leur confiance ; il a le bon profil ! Culturellement, il est dans le coup, ce qui n’est pas le cas de « Foulques »…
Bernard Morvan
Crédit photo : Mantaris/wikimedia (cc)
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2 réponses à “Elections municipales à Nantes : « Foulques » veut faire de l’affichage”
Bravo pour votre optimisme ! Franchement, la perspective d’une réélection de la Rolland woke, dont vous semblez certain, m’a foutu le bourdon pour la journée ! Moi je veux y croire, à la victoire de la droite en 2026 ! Il va falloir qu’ils mettent les égos de côté et se placer en ordre de marche avec L’OBJECTIF absolu de « virer Johanna Rolland », pour le bien des Nantais !
« Foulques », qui d’ailleurs se présente plutôt comme « Chombart », a au moins le mérite de se remuer et de redynamiser la droite locale. Il a rassemblé plus de 200 personnes pour une réunion publique voici quelques mois. Ce quasi-inconnu ne laisse donc pas indifférent, alors que Laurence Garnier serait bien incapable de mobiliser vingt militants.
Nantes est une ville très conservatrice (comme Rennes). Celui qui a réussi à prendre une place est favori pour la conserver. Ayrault a été maire pendant 23 ans et le serait encore s’il n’avait accepté Matignon en 2012 — du coup on s’est aperçu qu’il était très mauvais, ce qu’on ne pouvait voir à Nantes parce qu’il était en place. Laurence Garnier, trop bien élevée, ne s’en est jamais pris à la médiocrité de Johanna Rolland. Elle s’est toujours contentée de contestations plutôt technocratiques sur des dossiers souvent hermétiques et parfois en dépassant Johanna Rolland sur sa gauche (il faudrait en faire plus pour les immigrés !).
Attaquer la maire, en tant que personnalisation de tout ce qui va mal à Nantes, serait pourtant le seul moyen de desserrer l’avantage conservateur. Il y a de l’insécurité à Nantes ? Le conservatisme
se convainc que ce n’est pas la faute de la personne en place. Mais le boulot du maire, c’est de régler la question, or Johanna Rolland l’a laissée s’aggraver pendant des années, dans la foulée de Jean-Marc Ayrault ! En plus, être numéro 2 du P.S. devrait en faire un punching-ball tout désigné… Foulques est sûrement un personnage bien élevé lui aussi, mais il a au moins mis le doigt sur le sujet : l’objectif n’est pas de mettre X ou Y millions d’euros sur tel ou tel projet urbain mais de virer Johanna Rolland.