Parmi les différents éléments constituant la mouvance de la Révolution conservatrice allemande de l’entre-deux-guerres, théorisée par Armin Mohler après la Seconde Guerre mondiale, figure l’écrivain Oswald Spengler, dont l’ouvrage le plus célèbre est Der Untergang des Abendlandes (Le Déclin de l’Occident). L’auteur belge germanophone David Engels, grand spécialiste du sujet, a réalisé un opuscule de 77 pages servant d’introduction à la pensée spenglérienne. Lionel Baland l’a lu pour Breizh-info et en a réalisé une récension.
Bien que certains pans de la pensée spenglérien aient mal vieillis et que des éléments nouveaux aient été découverts dans le cadre de l’étude des civilisations non-européennes, David Engels estime que la pensée d’Oswald Spengler mérite toujours le détour.
Oswald Spengler, dont les idées ont été largement diffusées au cours de la décennie 1920 en Allemagne, mais aussi dans les autres pays d’Europe et en Amérique, tenta de démontrer que « toutes les civilisations humaines passent par des phases de développement similaires, correspondant plus ou moins aux différents âges d’un être biologique. »(1) et sont mortelles, la nôtre s’approchant, selon lui, de l’abîme final.
Spengler diffusa, au lendemain de la Première Guerre mondiale, l’idée d’une renaissance conservatrice de l’Allemagne, répondant ainsi au traumatisme de la défaite. Il publia à cet effet des essais : Preußentum und Sozialismus (Prussianité et socialisme), Politische Pflichten der deutschen Jugend. Rede gehalten am 26. Februar 1924 vor dem Hochschulring deutscher Art in Innsbruck (Devoirs politiques de la jeunesse allemande. Discours tenu le 26 février 1924 devant le cercle de la haute école d’art à Innsbruck), Neubau des Deutschen Reiches (Reconstruction de l’Empire allemand).
Bien qu’il ait contribué à discréditer par ses idées la république de Weimar, Oswald Spengler se retrouva lors de l’avènement du IIIe Reich dans l’opposition idéologique au national-socialisme en critiquant, au sein de Jahre der Entscheidung (Années décisives) paru en 1933, les idées racialistes qu’il considéra comme absurdes au vu du principe qu’il eut développé « d’un parallélisme radical et donc d’une égalité entre toutes les civilisations passées et présentes »(2). Il reprocha au parti national-socialiste son caractère prolétarien et démagogique. De plus, Spengler, avec ses idées déclinistes, fut en contradiction flagrante avec la croyance des nationaux-socialistes en une « résurrection » raciale.
Son opposition à la tentative de récupération de sa personne et de son œuvre par le nouveau régime conduisit à son boycott par la presse placée sous le contrôle de celui-ci. Oswald Spengler décéda en mai 1936 à Munich.
Système de pensée
Le système de pensée spenglérien repose sur deux hypothèses : l’existence de cultures, qui sont les plus grandes actrices possibles de l’histoire et qui sont au nombre de neuf, et que le développement de ces cultures se déroule de manière parallèle et correspond aux étapes de celui d’un être vivant. Pour Oswald Spengler, le monde occidental serait passé, à l’époque de Napoléon, d’une « Kultur » – terme positif – à une « Zivilisation » – terme négatif – « caractérisée désormais par la technologie, l’expansion, l’impérialisme et la société de masse, et qui devrait se fossiliser et disparaître à partir de l’an 2000. »(3)
Les neuf grandes cultures mises en avant par Oswald Spengler sont : égyptienne, babylonienne, indienne, chinoise, gréco-romaine, « magique » ou arabe – qui comprend le judaïsme messianique, le christianisme primitif et byzantin ainsi que l’islam –, méso-américaine, occidentale, russe.
Oswald Spengler estime que notre devoir, face au déclin inéluctable de notre monde occidental, est de poursuivre notre chemin. Nous devons tenir, à l’exemple du soldat romain dont le squelette a été retrouvé devant une porte de Pompéi et qui, durant l’éruption du Vésuve, mourut à son poste parce que personne n’était venu le relever.
Lionel Baland
Source :
David Engels, Oswald Spengler. Introduction au Déclin de l’Occident, collection Longue mémoire de l’Institut Iliade, La Nouvelle Librairie éditions, Paris, 2024.
Références :
(1) p. 6
(2) p. 18
(3) p. 34