Créée il y a près de 50 ans, la bande dessinée Thorgal, teintée de fantastique, est aujourd’hui encore la plus connue sur les vikings. Un album hors-série aborde la période où Thorgal, devenu amnésique, était le terrible Shaïgan-sans-merci. C’est l’occasion de présenter son scénariste, le prolifique Yann, excellent conteur d’histoires, qui a fréquemment fait l’objet de controverses sur le message de ses bandes dessinées, considéré comme sulfureux…
1- Thorgal.
Vers le VII ème siècle, une expédition Viking découvre un bébé dans une mystérieuse embarcation (en réalité une capsule spatiale). Le chef Viking, Leif Haraldson, adopte l’enfant et le nomme Thorgal Aegirsson en référence à Thor, le dieu de la foudre, et Aegir, le dieu des mers. A l’adolescence, Thorgal devient un formidable guerrier doté d’une exceptionnelle habileté au tir à l’arc. Il rencontre la jeune Aaricia, avec laquelle il va vivre ses premières aventures. Thorgal et son épouse Aaricia décident de quitter le peuple viking pour vivre à l’écart de la cruauté des hommes. Thorgal apprend qu’il est le dernier descendant du « peuple des étoiles », la civilisation atlante qui a fui la Terre des siècles auparavant. Au fil de leurs aventures, Thorgal et Aaricia donnent naissance à deux enfants : d’abord Jolan, qui développe rapidement des pouvoirs de modification de la matière, puis Louve, qui possède le don de communiquer avec les animaux. Thorgal a également eu un enfant, Aniel, avec Kriss de Valnor, aventurière sans scrupules, alors qu’il avait perdu la mémoire.
Kriss de Valnor a en effet profité de l’amnésie de Thorgal, pour lui faire croire qu’il est son époux et qu’il s’appelle Shaïgan, pirate sanguinaire qui inspire la terreur sur toutes les mers. Après avoir pillé un monastère saxon, Shaïgan-Sans-Merci et Kriss de Valnor ramènent à bord de leur navire quelques nonnes survivantes pour en faire des esclaves. Soudain, la vigie aperçoit un navire, sans doute chargé d’or, qui tente de fuir. Afin d’aller plus vite, Kriss fait jeter à la mer les nones et les novices. Shaïgan s’oppose, en vain, à cette décision. Puis, lors de l’abordage, Kriss tue des enfants. Shaïgan, qui ne supporte pas cette violence, s’interroge sur les étranges runes qu’il porte au creux de sa main. Il va rencontrer un devin qui lui dévoilera son identité à condition qu’il lui rapporte une épée de légende, enfermée dans un tombeau caché sur une île.…
Cette prestigieuse série, à l’important succès (20 millions d’albums vendus), est née de la rencontre improbable, en 1976, entre le scénariste belge Jean Van Hamme, passionné par la mythologie nordique, et Grzegorz Rosinski, dessinateur polonais qui en avait assez de participer à la propagande communiste. Le choix du thème de cette série résulte de la situation politique en Pologne. A cause de la censure communiste, il faut éviter tout sujet politique ou religieux contemporain. Leur choix se porte alors sur le monde des vikings, avec une touche de science-fiction et de fantastique. Créée en 1977, cette série décrit les aventures d’un guerrier viking qui aspire, malgré la folie des hommes et des dieux, à vivre en paix avec sa famille. Après l’instauration en 1981 de la loi martiale en Pologne, les scenarios ne passant plus la frontière, Grzegorz Rosinski franchit le « rideau de fer ». Jean Van Hamme devient à cette époque le scénariste de bande dessinée le plus connu, grâce à ses trois principales séries : Thorgal (1977), XIII (1984) et Largo Winch (1990). La série Thorgal a suscité l’intérêt du jeune public pour l’histoire des vikings et la mythologie nordique. Si Jean Van Hamme imagine que les dieux nordiques existent réellement, il dénonce la brutalité des vikings, assoiffés de conquêtes. Marie Burkhardt, Maître assistante à l’Université de Zurich, dans un article intitulé Thorgal : Hercule norrois de l’Heroic Fantasy ?, a ainsi démontré que la série Thorgal constitue une sorte d’extrapolation du héros Grec Hercule, affublé de valeurs actuelles, dans la mythologie nordique (Mythe et bande dessinée, Presses Universitaires Blaise-Pascal, 2007, p. 23 à 37). Le succès grandissant de la série tient au héros Thorgal, particulièrement charismatique, même s’il rejette la violence, le pouvoir et les richesses. Courageux, guerrier hors-pair, il ne se bat que pour défendre sa famille ou sa liberté. Son épouse Aaricia tient le rôle de la femme aimante au foyer, l’exacte inverse de Kriss de Valnor, aventurière malfaisante. Mais l’originalité de cette série résulte du mélange des genres (historique, science-fiction, fantastique) dans un ensemble qui reste exceptionnellement homogène.
A partir de 2007, la série Thorgal (t. 30) est scénarisée par Yves Sente. On regrette qu’avec ce scénariste, Thorgal évolue bien loin des mondes vikings. Pour le tome 35 arrive un nouveau scénariste : Xavier Dorison, qui parvient à clôturer de façon cohérente et bien rythmée un dytique oriental imaginé à l’origine par Yves Sente. La série semblait essoufflée. Le scénariste Yann reprend le flambeau à partir du tome 37. Il imagine un Thorgal plus posé, tourné vers sa famille. Yann a la bonne idée de rappeler l’origine de Thorgal, enfant du peuple des Atlantes, avec un retour dans leur mystérieux vaisseau spatial…
Parallèlement à la série Thorgal ont été créées, dans Les Mondes de Thorgal, trois séries parallèles : Kriss de Valnor, Louve et La jeunesse de Thorgal. Dans la série Kriss de Valnor, scénarisée par Yves Sente puis Xavier Dorison, dessinée par Giulio de Vita, Roman Surzhenko puis Fred Vignaux, cette aventurière, après sa mort, doit convaincre les Walkyries qu’elle mérite d’entrer dans le Walhalla. Scénarisée par Yann, la série Louve s’inspire des mythologies scandinaves. Le dessin de Roman Surzhenko, qui reste dans l’esprit de la série originelle, est si soigné qu’il ne fait pas regretter celui de Rosinski. La série parallèle La jeunesse de Thorgal raconte, sur le mode initiatique, les aventures du héros entre ses 15 et 20 ans. Yann nourrit souvent son récit, bien rythmé, de traditions Vikings.
Après Les Mondes de Thorgal, les éditions Le Lombard ont lancé une nouvelle série : Thorgal Saga. Celle-ci permet à différents auteurs d’apporter leur pierre à l’édifice, chacun imaginant un récit indépendant. Robin Recht, spécialisé dans l’heroic fantasy (Totendom, Le troisième Testament-Julius, Conan le Cimmérien, Elric), est le premier à livrer son récit, dans Adieu Aaricia. Après du duo Duval / Rouge, la saga se poursuit avec un troisième album au titre révélateur : Shaïgan. Yann puise son inspiration dans la période d’amnésie de Thorgal, durant laquelle il vécut auprès de Kriss de Valnor. Yann s’intéresse au moment où Shaïgan, qui commence à dénoncer la folie sanguinaire de Kriss, est en quête de son identité. L’action, qui ne laisse pas un instant de répit, s’achève en faisant le lien avec le tome 22 de la série mère, au cours duquel Thorgal retrouve la mémoire. On peut regretter que cet album, au lieu de permettre à de nouveaux auteurs d’apporter un regard original sur la série, n’apparaisse que comme un « bouche-trou ». On retrouve en effet deux auteurs qui ont travaillé chacun sur les autres séries de Thorgal : Yann et Surzhenko. Mais Yann crée un scénario qui s’insère parfaitement dans la série principale. En dressant le portrait d’un homme qui ne se reconnait plus dans la vie qu’il mène, il a réussi à approfondir la psychologie du héros.
2- Yann, scénariste de la provocation.
Yann Le Pennetier, dit Yann, naît en 1954 à Marseille. Après des études d’architecture puis de communication visuelle et audiovisuelle, Yann se lance dans la bande dessinée. Il est d’abord dessinateur, mais se consacre rapidement au scénario. Il comprend en effet que le dessin ne permet pas la réalisation de toutes ses idées. Il se tourne alors vers l’écriture de scenarios pour une multitude de dessinateurs souvent prestigieux. Il n’impose pas ses histoires aux dessinateurs. Il commence par connaître le dessinateur, ses préférences et ses passions, avant de lui proposer un récit.
Désormais installé à Bruxelles, Yann est considéré comme un scénariste provocateur. Mais en réalité, il ne fait que traiter des sujets qui dérangent. Ce scénariste drôle, cynique, voire féroce, mais féru d’Histoire, écrit des récits toujours originaux, reposant sur une vaste culture. Il s’exprime ainsi : « J’aime bien faire péter les structures. Tout déconstruire et reconstruire autrement. C’est bien plus rigolo quand la Belle aux Bois Dormant joue la méchante » (Michel-Edouard Leclerc, Itinéraires dans l’univers de la bande dessinée, p. 124 et s). On a en effet l’impression que Yann jubile à prendre le lecteur à contre-pied. Ses dialogues sont recherchés et même savoureux, ce qui n’est pas très fréquent dans le monde de la bande dessinée.
Il a obtenu deux fois l’Alph-Art du meilleur album français, en 1989 pour Théodore Poussin, t. 3, puis en 1993 pour Basil et Victoria t. 2.
a- Les premiers scenarios humoristiques.
Yann connait le succès au début des années 1980 par ses travaux humoristiques avec Didier Conrad publiés dans Spirou : les deux redoutables compères réalisent Les Hauts de page, gags situés dans les blancs des hauts de pages qui critiquent le fonctionnement du journal et certaines séries phares de la maison (Yoko Tsuno, Papyrus et Génial Olivier). Il aggrave son cas avec Les Innommables. Il imagine un récit teinté d’humour noir qui banalise la violence et le racisme : en 1949, trois soldats américains déserteurs anticonformistes parcourent l’Asie et sont les témoins de l’Histoire.
Après Spirou, Yann entre en 1983 à Circus. Il publie les premières histoires longues de Bob Marone, toujours avec Conrad, mettant à mal le mythe de Bob Morane, imaginant notamment qu’il est homosexuel.
Il entame, avec Marc Hardy, La Patrouille des libellules, qui caricature aussi bien les Juifs que les Nazis. Au début de la Seconde Guerre mondiale, un groupe de scouts connait de multiples péripéties, permettant à Yann de multiplier les caricatures. Dans sa volonté de se moquer de tout, il accumule les clichés sur les Juifs, et Hardy les caricature de manière aussi outrancière que les autres personnages (Winston Churchill, Charles de Gaulle, Rudolf Hess…). La LICRA envoie même à Yann une lettre l’accusant d’« incitation à la haine raciale ».
Il continue à lancer de nouvelles séries, Spoon et White avec Simon Léturgie, et Odilon Verjus avec Laurent Verron. Le tome 5 d’Odilon Verjus se déroule en Bretagne. A Saint-Tiloë, malgré un temps épouvantable, trois druides se tenant sur un dolmen célèbrent un culte païen, auquel assiste même un prêtre. Evitant les explosions de bombes posées par le mouvement indépendantiste Breiz Atao, Odilon va tenter d’élucider une étrange affaire de meurtre d’un druide.
b- La bande dessinée historique.
Sous le pseudonyme de Balac, pour le dessinateur Yslaire, Yann imagine en 1986 le récit mélodramatique Sambre, dénué de tout humour. Cette série dont il ne scénarise que les deux premiers albums raconte l’histoire d’une famille bourgeoise du XIXe siècle et plus particulièrement celle de Bernard Sambre, épris de Julie, une jeune vagabonde aux yeux rouges.
Avec Nuit blanche, en 1989, Yann lance sa première série historique, avec Olivier Neuray au dessin. Se déroulant pendant la révolution bolchévique, elle prend le parti des blancs. Le héros, Sacha Kalitzine, personnage romantique et ambigu, est amoureux d’une fille du Tsar. Mais son frère jumeau, Igor, est dans le camp des rouges…
La série Pin-Up raconte les aventures de Dorothy Partington, alias Dottie. Cette belle jeune fille naïve pleure le départ de son fiancé, « Joe chéri », pour la guerre du Pacifique. Elle devient alors la plus célèbre des Pin-up, la plantureuse guerrière Poison Ivy qui remonte le moral des GI’s. Subtil mélange de glamour et d’humour, Pin Up nous fait notamment découvrir la société américaine durant le conflit. Le scénariste Yann prouve une fois de plus sa facilité à caricaturer, par une abondance de strips et de jeux de mots, l’histoire de la seconde guerre mondiale. Le magnifique dessin de Berthet, adepte d’une « ligne claire » épurée, donne un agréable ton rétro à cette bande dessinée. Cette série connait une série parallèle truffée de clins d’œil savoureux et teintée d’humour féroce : Les exploits de Poison Ivy. La victime principale est Roosevelt qui est présenté comme ayant manipulé les Japonais pour qu’ils attaquent la base de Pearl Harbor.
Sous le pseudonyme de Balac, Yann entame en 2006 une série en 6 tomes se déroulant en Bretagne : Le sang des Porphyre. Il imagine que, les nuits de tempête, dans le fracas des éléments déchaînés, Hyacinthe Porphyre dirige avec sa lanterne les navires vers les récifs. Puis, aidé par ses fils, il égorge les survivants et s’empare de la cargaison. Jusqu’au jour où ces naufrageurs sont pendus ou envoyés au bagne, le reste de la famille Porphyre vivant caché. Vingt ans plus tard, la jeune Soizik se laisse séduire par Gwémon Porphyre. Mais les villageois ne l’entendent pas ainsi… Yann adapte ainsi, avec réussite, l’histoire véridique des Rotheneuf, sanguinaires naufrageurs qui écumaient les côtes au XVIIIème siècle. Par un dessin lumineux, Parnotte croque avec talent les personnages, chapelles, récifs et combats de lutte bretonne.
Dans Le Grand Duc, Yann raconte qu’en décembre 1943, sur le front de l’est, les troupes allemandes sont harcelées par les « sorcières de la nuit », jeunes femmes qui aux commandes de biplans archaïques bombardent l’aérodrome. Le dessinateur Romain Hugault avait déjà démontré son immense talent de dessinateur d’avions dans les albums Le dernier envol et Au-delà des nuages. Les bédéphiles apprécieront le clin d’œil au général des armées blanches Sacha Kalitzine, héros de sa précédente série Nuit blanche, puisqu’on apprend que Lilya est sa nièce. Après Le Grand Duc, Yann et Hugault entament deux nouvelles séries de bandes dessinées aéronautiques : Le pilote à l’Edelweiss, qui se déroule pendant la première guerre mondiale, puis Angel Wings.
Série pleine de rebondissements, Dent d’ours (de 2013 à 2018), avec Alain Henriet au dessin, traite d’aviation et d’espionnage. Au cœur des années 1930, en Silésie, Werner, Max et Hanna sont trois jeunes adolescents inséparables et passionnés d’aviation. Ils vont suivre une trajectoire différente. Max, juif polonais, comprend qu’il doit fuir. Il est déçu d’apprendre que Werner et Hanna ont accepté de s’engager dans les jeunesses hitlériennes dans le seul but d’apprendre à piloter des planeurs. Hanna devient pilote d’élite de la Luftwaffe et Werner pilote de l’US air force. Werner tente d’empêcher la réalisation du plan de Hanna : aux commandes de son bombardier suborbital propulsé par un moteur-fusée, larguer une bombe atomique sur New-York ! Yann s’inspire ainsi d’Hanna Reitsch, capitaine de la Luftwaffe. Bien sûr, le scenario est une fiction. Mais Yann intègre dans son scénario d’authentiques projets allemands d’armes secrètes (Focke-Wulf Ta 183, bombardier Silbervogel…). Le dessinateur Alain Henriet, d’une grande finesse, soigne les détails des différents avions.
Yann lance d’autres séries : Black Squaw, Atom Agency, Les Éternels avec Félix Meynet. Début 2019, il lance pour Jérôme Lereculey une nouvelle série, Avant, aventure humoristique qui se déroule durant la Préhistoire. Il écrit également des récits indépendants, pour René Hausman (Les Trois cheveux blancs et Le Prince des écureuils), et deux bandes dessinées historiques pour le regretté André Juillard : Double 7 qui se déroule pendant la guerre d’Espagne et Mezek (2011), puis Mézek. Yann abandonne son style caustique pour construire un récit historique audacieux qui révèle l’utilisation par le jeune Etat d’Israël de pilotes et d’avions de la Luftwaffe.
c- Les reprises.
Yann reprend également des séries de la bande dessinée franco-belge. Il reprend le scénario du Freddy Lombard d’Yves Chaland sur les trois derniers épisodes (1986-1989). Il collabore sur certains classiques : Le Marsupilami (7 albums), Lucky Luke (3 albums), Spirou et Fantasio (5 albums). En 2009, il signe l’histoire du cinquième Hors-Série de Spirou et Fantasio, dessiné par Olivier Schwartz, Le Groom vert-de-gris. Cet album a pour cadre Bruxelles durant la Seconde Guerre mondiale. En 1942, Spirou est groom au Moustic, hotel réquisitionné par les Allemands. Fantasio lui reproche cette trop grande proximité avec l’occupant. Mais en vérité, équipé d’un poste radio, Spirou transmet des informations à la résistance. Il ne se doute pas qu’un redoutable colonel SS lui tend un piège… Reprenant les célèbres aventures de Spirou et Fantasio, Yann prouve une fois de plus sa facilité à caricaturer, par une abondance de gags et de jeux de mots, l’histoire de la seconde guerre mondiale. Il émaille le récit de clins d’œil à Hergé. On croise ainsi Quick et Flupke, Jo et Zette, Tournesol… ainsi que le sinistre docteur Muller (L’île noire) qui torture pour compte de la Gestapo. Mais en même temps, Yann dénonce les tontes de femmes soupçonnées de collaboration horizontale. Le dessin ligne claire d’Olivier Schwartz se situe dans la droite ligne de l’école belge.
Depuis 2018, il devient le scénariste de deux grandes séries : Thorgal et XIII. Dans l’univers Thorgal, il commence par écrire une série dérivée, intitulée Louve, centrée sur la fille cadette de Thorgal, avec au dessin le russe Roman Surzhenko. Il entame par la suite une autre série dérivée : La Jeunesse de Thorgal. En 2017, Yann est chargé de la série principale. Le tome 39, intitulé Neokóra, opère un retour aux sources. Thorgal revient enfin à l’île des mers gelées, contrée glaciale dans laquelle se tient le vaisseau spatial atlante qui l’a amené sur terre. Il espère ainsi détruire les armes terrifiantes qu’il renferme. Mais Kriss de Valnor souhaite s’emparer de ces armes… En 2010, Yann signe le scénario du tome 3 de la série dérivée XIII Mystery, dessiné par Éric Henninot et Bérengère Marquebreucq, puis entame XIII Trilogy Jones.
Infatigable, depuis 2021, il se plonge dans l’univers de Buck Danny, avec la collection « Origines », permettant de découvrir la jeunesse des personnages principaux de cette série.
3- Surzhenko, dans les pas de Rosinski.
Roman Surzhenko est né le 6 octobre 1972 à Taganrog, au sud-ouest de la Russie, ville où il vit toujours. Enfant, il découvre la bande dessinée dans des revues soviétiques pour la jeunesse, ainsi que dans la revue Pif Gadget, parfois rapportée de voyage par des proches. Diplômé de l’Université d’ingénierie radio d’État de Taganrog en 1994, il n’a aucune formation artistique particulière. Il travaille comme illustrateur pour différents éditeurs russes et ukrainiens et pour des agences de publicité. Ses premiers dessins pour enfants illustrent « Les Argonautes » et « L’Iliade ». Alors qu’en Union Soviétique, on ne connait pas alors les comics américains ou les bandes dessinées françaises, un dessinateur local lui présente plusieurs albums de Thorgal en polonais. Malgré la barrière de la langue, son attirance pour le style de Grzegorz Rosinski est immédiate. En 2001, il publie son premier album, « Aventures magnifiques », l’histoire d’un groupe de jeunes à la vie trépidante. Il réalise par la suite la série « Le Guerrier et le moine », une saga historique racontant l’errance d’un jeune Ronin et d’un moine bouddhiste dans le Japon médiéval, puis « Veleslav », l’histoire d’un guerrier en exil.
En 2006 et 2007, son album « 1612 » relate un épisode important de la guerre entre la Russie et la Pologne-Lituanie. En 2007, sur un site russe (www.comics.com.ua), il déclare que son rêve serait de « dessiner une série fantastique historique comme « Thorgal », mais sur notre sol natal ». Il reçoit en 2009 le Prix du festival KomMissia dans la catégorie Album de l’année (album « Excitation »), puis en 2011 le Grand Prix du festival KomMissia (« Sixième »).
Puis Roman Surzhenko, qui souhaite travailler dans la bande dessinée franco-belge, se fait représenter par une agence qui le propose à différents éditeurs. En 2009, le jour de son anniversaire, Roman est contacté par son agent, qui lui propose de réaliser une planche test pour une série de la nouvelle collection des Mondes de Thorgal, qui se prépare secrètement. Une longue attente commence… En 2010, repéré par les Humanoïdes Associés, il signe les dernières planches du 4 ème tome de La Meute de l’enfer, puis travaille ensuite avec Novy sur le cinquième et dernier tome de la série Les Carnets secrets du Vatican aux éditions Soleil.
Après environ un an sans nouvelles, l’auteur est contacté en 2010 par les Editions du Lombard. Sélectionné par Grzegorz Rosinski en 2010, il entame la série « Louve », deuxième série parallèle des Mondes de Thorgal. Le premier album, « Raïssa », paraît en novembre 2011. Surzhenko se lance avec bonheur dans une aventure qui lui permet de dessiner les personnages qui lui avaient donné envie de devenir auteur de bande dessinée. Il choisit un graphisme qui se rapproche de ce que proposait Rosinski dans les années 1980. Après avoir rencontré Rosinski, il décide d’apprendre le français pour pouvoir communiquer plus facilement avec ses collègues, l’éditeur et les lecteurs. Le duo d’auteurs Yann-Surzhenko est sollicité en 2012 pour une nouvelle série : La jeunesse de Thorgal, dont le premier tome « Les trois soeurs Minkelsönn » paraît en janvier 2013. Puis, lorsque Giulio de Vita annonce qu’il ne dessinera plus les aventures de Kriss de Valnor, Surzhenko accepte de reprendre temporairement la première série des Mondes de Thorgal, le temps d’un album. Ce sixième album de Kriss, « L’île des enfants perdus », paraît en novembre 2015. Il dessine également le premier album d’une nouvelle série, La jeunesse de Durango avec Yves Swolfs au scénario.
Roman Surzhenko travaille chez lui, en Russie. Il réalise ses planches sur ordinateur, produisant un trait fluide et dynamique. Son dessin, qui reste dans l’esprit de la série originelle, est si soigné qu’il ne fait pas regretter celui de Rosinski. Il suffit de comparer la dernière page de Thorgal Shaïgan avec la première de Géants, le tome 22 de la série mère, qui décrit la même scène.
L’album Thorgal Shaïgan nous offre ainsi un véritable retour aux sources de la série.
Thorgal Saga – Shaïgan, 88 pages, 21,50 euros. Editions Le Lombard.
Kristol Séhec.
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2 réponses à “Thorgal Shaïgan, de Yann et Surzhenko (bande dessinée).”
« La bande dessinée Thorgal, la plus connue aujourd’hui encore sur les Vikings » écrivez vous. Et Prince Vaillant alors ? Question de génération, peut-être ? Perso, je ne connais que Prince Vaillant, qui était un de mes héros préférés dans ma jeunesse.
Ce serait intéressant qu’un spécialiste de la BD nous présente une analyse comparative des deux …
https://www.breizh-info.com/2024/07/28/235774/prince-valiant-chef-doeuvre-de-la-bande-dessinee-sur-la-legende-arthurienne/