Les artisans, commerçants et dirigeants de très petites entreprises (TPE) expriment un pessimisme alarmant face à la situation politique actuelle. Selon une enquête menée par le Syndicat des Indépendants et des TPE (SDI), 94 % des professionnels interrogés se disent préoccupés par l’absence de direction politique claire suite aux législatives anticipées de juillet 2024. Ce climat de blocage institutionnel et économique, combiné à des perspectives économiques incertaines, freine les investissements et les recrutements, plongeant le secteur des petites entreprises dans une profonde perplexité.
Un blocage politique aux conséquences économiques
L’enquête, menée les 29 et 30 août 2024 auprès de 1 279 répondants, révèle que malgré le maintien des services publics, le manque de visibilité politique pèse lourdement sur l’activité des TPE. Bien que 62 % des répondants soulignent que les affaires courantes continuent de fonctionner – avec des prélèvements URSSAF et des taxes foncières toujours en vigueur –, l’absence d’un gouvernement formé depuis les législatives anticipées génère une ambiance anxiogène, propice à la paralysie des décisions économiques. Le SDI indique que cette incertitude a des répercussions directes sur les comportements des professionnels et des particuliers, avec une réduction significative de la consommation et des investissements.
Cette incertitude politique se traduit par une chute brutale des projets d’investissement et de recrutement au sein des TPE. Alors qu’une entreprise sur trois envisageait un projet de recrutement ou d’investissement avant la dissolution de l’Assemblée nationale, les données révèlent que 69 % de ces projets ont été suspendus ou annulés. Concernant les embauches, 52 % des recrutements prévus ont été mis en pause ou purement annulés, mettant en lumière l’ampleur des doutes qui planent sur le secteur.
Un rejet massif des propositions du NFP
Les propositions du Nouveau Front Populaire (NFP), parti majoritaire au sein de l’Assemblée nouvellement élue, suscitent une vive opposition de la part des dirigeants de TPE. L’une des mesures phares du programme du NFP, le relèvement du SMIC à 1 600 euros nets par mois, est rejetée par 79 % des répondants. Une opposition largement justifiée par le fait que les TPE représentent un tiers des salariés rémunérés au SMIC, avec une concentration encore plus forte dans des secteurs comme l’hôtellerie-restauration et les services à la personne.
De plus, 89 % des dirigeants de TPE rejettent catégoriquement la hausse des prélèvements obligatoires, une autre proposition du NFP. L’affirmation selon laquelle ces augmentations ne concerneraient que les plus riches n’a guère convaincu, d’autant que près de la moitié des répondants gagne moins d’un SMIC pour un volume horaire mensuel supérieur à 200 heures, selon une enquête menée par le SDI en juillet 2024.
Cependant, l’indexation des salaires sur l’inflation, une autre mesure phare du programme, est rejetée par seulement 45 % des interrogés. Cette disposition semble moins risquée aux yeux des TPE, qui ont déjà fait face à des hausses successives du SMIC depuis 2021, en raison de l’inflation croissante.
Une politique de rigueur peu attractive
Si les dirigeants de TPE rejettent les propositions du NFP, ils ne sont guère plus attirés par une politique de rigueur budgétaire, défendue par certains courants d’orthodoxie économique. Selon l’enquête, 57 % des répondants estiment qu’une telle politique serait néfaste pour leur activité. Ce rejet s’explique par les deux dernières années de rigueur budgétaire, durant lesquelles le taux de défaillances d’entreprises a atteint un niveau rarement observé au cours des trois dernières décennies.
Les artisans et commerçants interrogés n’hésitent pas à pointer du doigt les responsables de cette situation politique et institutionnelle critique. Si 46 % d’entre eux attribuent la responsabilité de la crise au Président de la République, la responsabilité des partis politiques est également reconnue par 40 % des répondants. Au-delà des dirigeants politiques, certains soulignent même le rôle joué par les citoyens et les médias, accusés d’alimenter une crise collective sans issue visible à court terme.
Le SDI appelle ainsi les élus issus des législatives du 7 juillet 2024 à prendre rapidement des mesures pour sortir de cette impasse, et à cesser de privilégier les intérêts partisans au détriment de l’intérêt général. Le syndicat exprime un besoin urgent de stabilité politique pour permettre aux TPE de retrouver la confiance nécessaire à la relance de leurs activités économiques et à la pérennité de leurs projets.
Une attente de stabilité pour relancer l’activité
En somme, l’enquête flash du SDI met en lumière un profond malaise au sein des artisans, commerçants et dirigeants de TPE. Le blocage institutionnel, l’absence de clarté sur la politique économique future, et le rejet des principales mesures du NFP contribuent à un climat d’attentisme qui paralyse les décisions d’investissement et de recrutement. Pour surmonter cette crise, les professionnels appellent à une stabilisation rapide de la situation politique et à des mesures adaptées pour relancer une économie déjà fragilisée par deux années de rigueur budgétaire.
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