« Le président de la République refuse de comprendre que son rôle est de nommer un chef de gouvernement issu du groupe majoritaire à l’Assemblée. Ensuite, c’est au Parlement d’accorder ou non sa confiance au nouveau Premier ministre. Or, actuellement, Emmanuel Macron décide seul de l’orientation politique, de la force légitime à gouverner et du timing », constate Lucie Castets (Ouest-France, mercredi 28 août 2024). Ancien garde des Sceaux (PS), professeur de droit public à l’université de Brest, Jean-Jacques Urvoas va plus loin dans son analyse : « En cette rentrée, Emmanuel Macron continue de se révéler un étonnant professeur de droit constitutionnel. Il vient ainsi de nous proposer une nouvelle interprétation de l’article 5 de la Constitution. »
« Jusqu’à présent, une simple lecture suffisait à décrire la mission du chef de l’État : “Le Président veille au respect de la Constitution, il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’Etat. Il est le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des traités.“ Mais le 26 août dernier, l’Elysée a publié un communiqué à la suite de la série de consultations des partis politiques conduite dans la perspective de la nomination d’un Premier ministre dans lequel Emmanuel Macron définit son rôle comme celui d’un “arbitre garant de la stabilité institutionnelle et de l’indépendance de la nation“. La différence porte sur la notion “de garant de la stabilité institutionnelle“ absente du texte de 1958, ce qui ne manque pas de surprendre. » Urvoas poursuit : « Il est curieux que le Président consacre autant de temps à la recherche d’une hypothétique majorité parlementaire. Cela ne relève en rien de ses prérogatives. “L’arbitre“ évoqué par la Constitution n’a pas à se comporter en négociateur. » (Le Télégramme, jeudi 29 août 2024)
Tout cela est du juridisme à l’état pur. La pratique a montré que la Constitution de 1958 se caractérise par une grande souplesse ; elle peut donc connaître différentes applications : présidentialiste lorsque les deux majorités (présidentielle et législative) concordent, parlementariste en cas de cohabitation… et peut-être une troisième qu’il reste à inventer grâce à Macron. On connaît la fameuse réponse faite par le général de Gaulle à un journaliste lors d’une conférence de presse : « Je vous répondrai qu’une Constitution, c’est un esprit, des institutions, une pratique. Pour ce qui est de la nôtre, son esprit procède de la nécessité d’assurer aux pouvoirs publics l’efficacité, la stabilité et la responsabilité qui manquaient organiquement sous la Troisième et sous la Quatrième République. » (31 janvier 1964).
B . Morvan
Crédit photo : Ericwaltr / Wikimedia (cc)
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2 réponses à “Le professeur Urvoas n’est pas d’accord avec la « stabilité institutionnelle »”
Ce n’est pas seulement du juridisme, c’est de l’enculage de mouche ! Quelle différence notre fin juriste voit-il vraiment entre « la stabilité institutionnelle » et « le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’Etat »?
et mélanchon veut une 6è république qui serait en fait une 4è république mais à son pouvoir personnel