Hongrie. Orban, entre Zelensky et Poutine

Pour la reprise de « Chocs du monde », le magazine des crises et de la prospective internationale de TVL, Edouard Chanot reçoit Thibaud Gibelin, chercheur au Mathias Corvinus Collegium de Budapest. Viktor Orban a prononcé un discours le 27 juillet dernier à l’université d’été de Balvanyos, où pensée et action politiques se confondent harmonieusement pour élaborer une géostratégie exemplaire. Le premier ministre hongrois enseigne comment un État, même enclavé, peut s’en sortir dans un monde en crise permanente.

Viktor Orban, Premier ministre hongrois depuis 2010, se trouve dans une position délicate entre deux leaders mondiaux : Volodymyr Zelensky, président de l’Ukraine, et Vladimir Poutine, président de la Russie. Alors que la plupart des pays européens ont adopté une position ferme contre l’invasion russe en Ukraine, Orban a tracé une voie différente, une troisième voie marquant une distance notable avec l’approche occidentale traditionnelle.

Orban et Poutine : une relation complexe

Viktor Orban et Vladimir Poutine ont développé au fil des années une relation relativement cordiale. Depuis son retour au pouvoir en 2010, Orban a cherché à renforcer les liens économiques avec la Russie, notamment à travers des accords énergétiques. La Hongrie dépend fortement du gaz russe, et Orban a souvent utilisé cette dépendance pour justifier ses relations avec Moscou. Cette proximité avec Poutine, qui s’écarte des politiques de l’Union européenne, lui a valu des critiques, tant à l’intérieur de la Hongrie qu’à l’extérieur. Orban a souvent été accusé de jouer un double jeu, cherchant à maintenir des relations amicales avec la Russie tout en profitant des avantages de l’appartenance à l’UE.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Orban a adopté une approche plus modérée par rapport à ses voisins européens. Alors que l’UE a imposé des sanctions sévères contre la Russie, la Hongrie, sous la direction d’Orban, a exprimé des réticences, notamment sur les sanctions liées à l’énergie. Orban a plaidé pour la nécessité de maintenir le dialogue avec Moscou, soulignant l’importance de protéger les intérêts économiques hongrois.

Entre soutien à l’Ukraine et relations avec la Russie

Volodymyr Zelensky, de son côté, a cherché à obtenir un soutien unanime de la communauté internationale contre l’agression russe. Si la majorité des pays européens se sont alignés sur cette position, Orban a été plus ambigu. La Hongrie a condamné l’invasion russe, mais elle s’est abstenue de fournir un soutien militaire direct à l’Ukraine. Orban a également bloqué certaines initiatives européennes visant à renforcer l’aide militaire à Kiev.

Zelensky a critiqué à plusieurs reprises la position de la Hongrie, la qualifiant d’incohérente face à l’agression russe. Orban, en revanche, a justifié sa position en affirmant qu’il ne voulait pas entraîner la Hongrie dans un conflit qui pourrait avoir des répercussions graves sur la sécurité et l’économie du pays.

Les enjeux géopolitiques pour Orban

La position de Viktor Orban entre Zelensky et Poutine reflète des enjeux géopolitiques complexes. D’un côté, Orban doit faire face à la pression internationale pour soutenir l’Ukraine et s’aligner sur les politiques européennes. De l’autre, il doit gérer les relations avec la Russie, un partenaire économique clé pour la Hongrie. Cette position de balancier lui permet de renforcer son image de leader indépendant, capable de défendre les intérêts hongrois face aux grandes puissances. Et elle ouvre la voie à ce que pourrait être une position rationnelle de l’ensemble des Européens, si l’hystérie n’était pas devenue généralisée en matière de géopolitique en Europe, tout comme les visions à très court terme.

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2 réponses à “Hongrie. Orban, entre Zelensky et Poutine”

  1. Pschitt dit :

    La leçon d’Orban, c’est qu’un pays ne peut être vraiment indépendant s’il dépend d’un seul fournisseur d’énergie. Mais l’attitude de Viktor Orban envers la Russie a quand même un aspect étrange. Jeune dirigeant à la fin du XXe siècle, il était un membre moteur du groupe de Visegrad et a fait adhérer son pays à l’OTAN, de manière même très engagée (installation d’armes nucléaires sur le sol hongrois). Puis il semble avoir tourné casaque assez subitement.

  2. patphil dit :

    orban veut la paix, il est donc un tyran anti otan

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