Mikan Oshidari : « Revenir à une vie sans smartphone a amélioré ma santé mentale » [Interview]

Ils sont partout. Ils occupent une partie folle de nos vies désormais. Observez la sortie d’un collège ou d’un lycée aujourd’hui, c’est fascinant. Vous y verrez les adolescents se jeter sur leurs téléphones. Plus rien n’existe autour. Observez les terrasses des cafés : parfois des amis s’y retrouvent….pour regarder leurs smartphones. Les rencontres se font massivement via smartphones, via applications, et plus spontanément dans une fête ou dans un bar.

Tout nous pousse et nous conditionne pour utiliser le smartphone en permanence. Et cela dès le plus jeune âge. Des parents totalement inconscients collent leurs enfants devant des smartphones ou tablettes dès 2-3 ans….Et pourtant, toutes les études montrent que les conséquences sont et seront désastreuses (on en profite d’ailleurs pour faire un peu de publicité pour l’initiative The Phone, un portable à 100 euros ressemblant à un Smartphone, mais ne servant qu’à appeler et envoyer des messages, parfait pour vos ados).

Alors comment nous libérer de ces smartphones et de leur emprise ? Comment sortir de cette dépendance qui ressemble à l’accoutumance cérébrale à une drogue dure, et qui peut littéralement bousiller le cerveau de nos enfants ?

Nous avons interrogé Mikan Oshidari, une japonaise qui fait des vidéos et qui écrit justement sur cette dépendance aux smartphones (en japonais uniquement mais elle espère prochainement en français et dans d’autres langues), et qui nous a contacté après avoir lu notre article sur les cabines téléphoniques bientôt de retour.

Breizh-info.com : Bonjour Mikan Oshidari, pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Mikan Oshidari : Bonjour, je m’appelle Mikan Oshidari. Je suis essayiste japonaise et j’ai écrit un livre intitulé « Je veux arrêter d’être l’esclave de mon smartphone ». J’ai acheté mon premier smartphone en 2013 et suis rapidement tombée amoureuse des réseaux sociaux, des jeux et des vidéos, devenant ainsi accro. Cependant, en 2017, j’ai réalisé que cette addiction nuisait à ma santé, alors j’ai décidé de passer à un dumbphone. Mon livre, basé sur cette expérience, est disponible uniquement en japonais pour le moment, mais je pense que la dépendance aux smartphones est un problème mondial. Je partage aussi mes idées sur YouTube en anglais et parle de détox numérique.

Breizh-info.com : Vous avez écrit un livre sur la dépendance aux smartphones. Comment cela s’est-il passé ?

Mikan Oshidari : J’ai acheté mon premier smartphone en 2013 et pendant quatre ans, j’en suis devenue gravement accro. Cela a eu des effets néfastes sur ma santé mentale et physique. En 2017, j’ai décidé de passer à un dumbphone pour préserver ma santé. Au début, c’était difficile car je ressentais un manque en ne pouvant pas utiliser les applications, mais je m’y suis habituée et j’ai trouvé cela plus confortable. J’ai réalisé que regarder constamment mon smartphone pour passer le temps était une perte de vie. J’ai donc commencé à lire des livres et à passer du temps à l’extérieur.

vComment vous êtes-vous débarrassée de votre dépendance aux smartphones ?

Mikan Oshidari : J’ai essayé plusieurs méthodes de désintoxication numérique, comme mettre mon smartphone dans une boîte verrouillée, mais rien n’a fonctionné. Finalement, j’ai décidé de me débarrasser de mon smartphone et d’utiliser un dumbphone (NDLR : un téléphone fait uniquement pour téléphoner). Cela peut sembler extrême, mais c’était efficace pour moi. Revenir à une vie sans smartphone a amélioré ma santé mentale. Ce n’était pas facile, surtout dans un monde où tout le monde est accro, mais je suis convaincue d’avoir fait le bon choix. Si j’étais restée accro, je pense que cela m’aurait détruite.

Breizh-info.com : Quels ont été les déclencheurs qui vous ont poussée à abandonner votre smartphone ?

Mikan Oshidari : Trois incidents principaux m’ont poussée à prendre cette décision. Premièrement, j’ai failli avoir un accident de la route en marchant tout en regardant mon smartphone. Deuxièmement, j’ai été isolée par mes amis sur les réseaux sociaux parce que je ne recevais pas assez de « J’aime ». Enfin, l’usage prolongé du smartphone causait des douleurs physiques et affectait ma vision. J’ai réalisé que ma santé était plus importante que cette addiction.

Breizh-info.com : Pensez-vous que le fait de ne pas être née avec un smartphone – comme c’est le cas pour les générations actuelles – a eu un impact positif sur vous ?

Mikan Oshidari : Absolument. Bien que les smartphones soient utiles pour certaines personnes, je frémis à l’idée de ce qui aurait pu se passer si je n’avais pas fait ce changement. Utiliser un dumbphone et un ordinateur pour naviguer sur Internet me procure plus de paix. Je pense que l’humanité est maintenant envahie par les smartphones.

Breizh-info.com : Quel message essayez-vous de transmettre au Japon et au monde concernant cette dépendance ?

Mikan Oshidari : Je veux encourager les gens à faire une détox numérique et à découvrir les bienfaits des dumbphones. Il est essentiel de réguler l’utilisation des smartphones, surtout pour les enfants. Des exemples de régulation existent, comme certaines restrictions aux États-Unis et au Royaume-Uni. Les parents doivent être conscients des dangers et privilégier des appareils moins addictifs pour leurs enfants.

Breizh-info.com : Comment expliquez-vous cette tendance des parents à donner des écrans à leurs jeunes enfants ?

Mikan Oshidari : Cela devrait être encadré par des directives mondiales. J’ai des amis dont les enfants sont déjà accros aux smartphones. Les parents doivent être conscients que donner un smartphone à un jeune enfant peut entraîner une dépendance. Les enfants devraient avoir accès à des dumbphones qui permettent seulement d’envoyer des e-mails et de passer des appels.

Breizh-info.com : Votre livre est écrit en japonais, mais vous mentionnez que c’est un problème mondial. Pourriez-vous en dire plus ?

Mikan Oshidari : Oui, la dépendance aux smartphones est un problème mondial. Au Japon, beaucoup de gens ne voient pas cette addiction comme un problème à cause de la pression des pairs. La majorité est accro, donc parler de ce problème est souvent tabou. J’espère que mon livre et mes vidéos YouTube en anglais aideront à sensibiliser davantage de personnes à cette question et à promouvoir la détox numérique.

Je souffrais d’addiction aux smartphones et je ne veux pas que d’autres personnes souffrent de cette dépendance. J’espère que la prochaine génération pourra éviter cette addiction.

Propos recueillis par YV

Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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5 réponses à “Mikan Oshidari : « Revenir à une vie sans smartphone a amélioré ma santé mentale » [Interview]”

  1. Verdier dit :

    Merci mille fois Yann… Breizh Info, une fois de plus… pour cet excellent éclairage à l’heure où la prochaine rentrée se profile…

    Peut-être faudra-t-il penser à le renouveler régulièrement…

    J’avais promis à notre dernier garçon de lui offrir son premier téléphone pour son entrée en sixième… et grâce au relais de Breizh Info, cela s’est fait le plus simplement du monde… J’ai immédiatement commandé « The Phone ».

    La première réaction de notre enfant sera peut-être, sans doute, déconfite… mais je m’en fiche royalement, tellement la cause est bonne et entendue. Je n’ai pas discuté au préalable, j’ai commandé !!! La discussion ne manquera pas de suivre…

    Bonne journée à tous !!!

  2. louis dit :

    un truc qui m’affole parce que fréquent c’est de voir des ados filles ou garçons a la terrasse d’un café ne se parlant pas et rester longtemps a regarder leur portable , pourtant a cette age là les filles c’est piplettes mais là non rien !🙄

  3. nicole dit :

    Moi aussi, comme elle, j’ai un simple téléphone mobile, et un ordinateur, que je n’utilise que l’après-midi et le soir, gardant la matinée pour ma vie sociale (achats en magasins, lecture, etc).
    J’ai un peu l’impression d’être une extra-terrestre, par exemple, quand, dans le bus, je sors un bloc-notes de mon sac, pour prendre des notes..

  4. Poulbot dit :

    Elles sont pipelettes mais en passant par les réseaux dit « socio » , ce qui les éloignes de la réalité autour d’elles.
    C’est identique pour les adultes smartophile qui ne le pose que pour dormir ; le jour ou un fabriquant sortira un appareil a ce greffé il est sur et certains que tous vont ce rué dessus , pauvre abruti qui en cas de panne de réseau ce retrouveront totalement perdu dans un monde qui aura avancé sans eux.

    Quand j’en vois un une ce dirigé vers moi le pif contre le smartphone , je ne bouge pas d’un centimètre , espérant qu’il me bouscule et que sont appareil tombe et ce casse ……..certes c’est un peux sadique je le reconnais mais raz le bol de voir tout ces zombis dans la rue.

  5. patphil dit :

    la majorité des gens qui déambulent dans la rue a un portable dans la main, des oreillettes blanches dans les oreilles, jouent des pouces sur leur écran, pitoyable, lamentable de craindre de ne pas pouvoir répondre à un appel

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