Sergio Velasco est politologue, analyste politique et spécialiste de la politique de l’Europe centrale et orientale. Opinionniste dans les médias anglo-saxons. Fondateur du projet Filosofia Politica. Il revient sur une affaire très grave qui s’est déroulée cette semaine en Roumanie, touchant un parti identitaire qui est en lice pour dimanche aux élections européennes.
Hier, il s’est passé en Roumanie quelque chose que nous n’avions pas vu depuis des décennies, des choses qui relèvent d’une dictature et non d’une démocratie européenne à part entière. Cette semaine, une enquête a révélé que le parti conservateur roumain, Alianta Pentru Unirea Românilor (AUR), aurait falsifié des signatures pour pouvoir se présenter aux élections européennes et locales. Cette affaire est révélée quatre jours seulement avant les élections européennes et locales, ce qui pourrait influencer le vote des Roumains. Dans la plupart des démocraties européennes, comme c’est le cas en Espagne, toute enquête concernant un parti ou un homme politique avant une élection est dissimulée afin de ne pas influencer le résultat. Cependant, dans le cas de la Roumanie, ils ont décidé de la révéler afin d’influencer le vote lors des prochaines élections.
Le pire n’a pas été de rendre cette condamnation publique, mais le modus operandis suivi par la police. Les personnes appartenant à l’AUR ont été sorties dans la rue, attendues devant les escaliers, détenues comme s’il s’agissait des pires criminels. Les membres de l’AUR ont subi ces abus. Les sympathisants et les membres de l’AUR ont été humiliés devant leurs voisins, fouillés dans la rue, on leur a confisqué leur téléphone, ils ont été traités comme de véritables criminels, alors qu’on leur avait dit qu’ils étaient des témoins de l’affaire.
« Je ne pensais pas revoir de telles images en Roumanie », a déclaré Claudiu Târziu, cofondateur d’AUR, président du conseil d’administration national du parti AUR, sénateur roumain et numéro deux pour les élections européennes.
De même, George Simion, président de l’AUR, a déclaré : « Je m’attendais (…) à une manœuvre cette semaine, à une tentative de manipulation de l’opinion publique pour écarter l’AUR de la course électorale ».
« Ils ne nous intimideront pas, ils ne nous arrêteront pas ».
Cependant, cette manœuvre peut s’avérer contre-productive pour les partis traditionnels, car elle peut inciter davantage de personnes à soutenir AUR et des personnes qui hésitaient à voter pour eux à finir par le faire. Normalement, lorsqu’on essaie de « réprimer » un mouvement politique, on peut avoir l’effet inverse et lui apporter plus de soutien, comme ce qui s’est passé avec Donald Trump aux États-Unis.
Il faut noter que l’AUR était en tête dans la plupart des sondages pour les élections européennes depuis le début de l’année 2024. Voyant que le phénomène AUR pourrait s’étendre aux autres élections en Roumanie cette année (locales et présidentielles), les partis de l’establishment politique ont décidé de s’unir pour la première fois de leur histoire et de former une coalition électorale pour les élections européennes. Le PSD et le PNL ont décidé d’unir leurs forces en raison de la possibilité que l’AUR ait un effet de balayage en Europe et que cela puisse conduire à d’autres élections en Roumanie et à une perte de pouvoir.
En outre, l’AUR peut jouer un rôle crucial en Europe, car la plupart des sondages prévoient que le parti conservateur roumain sera la deuxième force et qu’il pourra obtenir 8 à 10 députés européens. L’AUR a l’intention de rejoindre l’ECR, en fait, il entretient de très bonnes relations avec Fratelli d’Italia, comme en témoigne la présence de George Simion, leader du parti, à l’événement Atreju, organisé par Giorgia Meloni, présidente de l’Italie et leader de Fratelli d’Italia. Malgré leurs bonnes relations avec l’ECR, ils ont également de bonnes relations avec l’ID, de sorte que l’AUR pourrait entrer dans l’un des deux grands groupes de conservateurs européens.
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4 réponses à “Persécution politique de l’AUR juste avant les élections européennes et locales en Roumanie”
comment on influencerait le vote des electeurs ? on ne verrait pas ça en france en tout cas !😆
Entre-nous, que peut-on attendre de la Roumanie ?… Une fois de plus, que cette histoire soit vraie ou fausse (Moi je parlerais d’un intermède), nous assistons à l’exemple type que « Faire l’Europe » n’est ni aisé, ni possible. Tout au moins avec en mains les éléments actuels qui n’ont strictement aucune similitude avec ce qui se pratique ailleurs. Je veux dire par là que la Roumanie s’eveille à l’aube d’une modernité envers laquelle elle n’etait -ni n’est toujours pas- préparée.
première mesure de mussolini: faire taire ses opposant, et en cas de récidive, élimination physique; il appelait ça du fachisme
C’est sans doute maladroit de la part de l’AUR de « falsifier des signatures » surtout s’il se trouvait en tête. Du coup le pouvoir menacé en profitte pour frapper fort, reste à savoir s’il va bénéfiser de ce buzz brutal.