En 1994, le fondateur de TFP, Plinio Corrêa de Oliveira, a dénoncé les efforts déployés par les autorités de l’Église catholique et de la société civile pour imposer le « mariage » entre personnes du même sexe. L’enseignement moral catholique sur l’homosexualité étant clair et irréformable, il voyait cette action autoritaire déclencher une scission : « Il y aura alors un conflit interne au sein de l’Église, et ce choc interne produira l’un des plus grands bouleversements de l’histoire »
L’ouvrage The Breached Dam de José A. Ureta et Julio Loredo montre comment et pourquoi la récente déclaration de Fiducia supplicans du Vatican a précipité le choc à venir. Pour eux, le document lancé par le nouveau préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi, le cardinal Victor Manuel Fernandez, connu pour ses errances, est le « couronnement » de l’action menée depuis longtemps au Vatican par le « puissant lobby LGBT ». Et constitue un « demi pas hautement symbolique sur la longue route vers une pleine reconnaissance ».
Une étude sur le lobby LGBT dans l’Eglise sur des décennies
Malgré les oppositions en effet, l’idée s’est répandue largement dans l’opinion et dans l’Eglise que celle-ci est ouverte aux unions de même sexe, « c’est pourquoi la bénédiction “non rituelle” autorisée par Fiducia Supplicans a ouvert une grande brèche dans la digue de la morale catholique et représente une victoire pour le mouvement homosexualiste (…) ». Dans son avant-propos au livre, Robert Mutsaerts, évêque auxiliaire de Bois-le-Duc, estime que Fiducia Supplicans « refuse de nommer le mal » et se trouve « dans le ton de l’esprit du temps. La négation du péché, conséquence du subjectivisme dominant et du relativisme d’aujourd’hui, la négation de la vérité, qui, par définition, s’applique à tous en tout temps ». The Breached Dam est une étude en profondeur, sur plusieurs décennies, de l’action du lobby LGBT dans l’Eglise qui a su « opérer avec adresse tant dans le domaine du militantisme de réseau que dans celui des études et de la théologie, avec pour but d’éliminer de la doctrine catholique le caractère de péché grave que l’Eglise a toujours attribué aux actes homosexuels, et même de les approuver comme des signes authentiques de l’amour de Dieu ».
Fiducia Supplicans, couronnement d’un coup de force
Le livre constate aussi la résistance générale de l’Eglise au coup de force de Fiducia Supplicans, notant par exemple que le texte a été « enterré » en Afrique. C’est une réaction saine et non une attitude schismatique, selon Loredo et Ureta : « S’il existe un petit groupe d’idéologues aux tendances schismatiques, on ne doit pas le chercher parmi les prélats, les clercs et les fidèles qui défendent la vérité, le bien et la beauté de l’enseignement traditionnel de l’Eglise », mais plutôt parmi les dissidents progressistes qui reviennent sur la condamnation solennelle portée par la Congrégation pour la Doctrine de la foi dans les années 1990. « Encouragé par les ouvertures du pape François, il a dressé la tête et conquis de l’espace durant les onze années de son pontificat. Pourtant ce courant homohérétique manque de soutien populaire même en Allemagne où il a la main sur les leviers administratifs qui dirigent le chemin synodal avec le soutien d’une grosse majorité de la hiérarchie. »
Fermes dans la foi face au cléricalisme schismatique
Le côté hautement clérical et antidémocratique de la révolution synodale en cours est ici parfaitement détecté. Pour Ureta et Loredo, ce soutien clérical européen fait rêver le lobby LGBT d’une victoire totale : « une bénédiction liturgique avec un rituel analogue à celui du sacrement du mariage ».
La conclusion est donc obligée : « De ce fait, les catholiques doivent demeurer fermes dans un non possumus inflexible parce que “Nous devons obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes” (Actes, V, 29). Si la résistance respectueuse mais inébranlable à l’autorité mène à une rupture, ce ne sera pas la faute de ceux qui défendent le dépôt de la foi pour la maintenir intacte, mais plutôt de ceux qui cherchent à la réinterpréter en se fondant sur de prétendues données de la science moderne ou une évolution supposée de l’humanité. »
Avant propos du livre The Breached Dam
La déclaration Fiducia supplicans (FS) a suscité des remous dans le monde entier, notamment en raison de la confusion qu’elle crée. FS prévoit la possibilité de bénir les couples de même sexe alors que, deux ans plus tôt (Responsum 2021), le Vatican s’était clairement prononcé contre cette possibilité. Le point de vue selon lequel FS est cohérent avec ce Responsum et avec la doctrine et la tradition sur le sujet est indéfendable. FS présente des contradictions évidentes. La Bible et la Tradition sont parfaitement cohérentes en ce qui concerne les implications morales de l’homosexualité. FS rompt avec cette cohérence en offrant la possibilité de bénir une relation pécheresse au nom de Dieu. Bien sûr, le fait que cette bénédiction ne dure que quelques minutes et ne soit pas donnée près d’un autel ne change rien à cette vérité. Il n’y a aucune base dans l’Écriture ou la Tradition pour une telle bénédiction.
Le cardinal Fernández a déclaré que la doctrine du mariage restait inchangée. Mais là n’est pas la question. La question est la suivante : un prêtre peut-il donner sa bénédiction à une union que la Bible considère comme un péché ? Il s’agit d’une question rhétorique. Vous demandez certainement la bénédiction de Dieu pour guérir la rupture dans votre vie, et non pour perpétuer votre situation désordonnée. On ne peut pas rejeter le jugement et les exigences morales de Dieu tout en faisant appel à sa miséricorde.
Le problème réside principalement dans le fait que FS n’aborde pas la dimension morale de la relation. FS refuse de nommer le mal. À cet égard, elle est en phase avec l’air du temps : la négation du péché, qui est une conséquence du subjectivisme et du relativisme dominants aujourd’hui, et la négation de la vérité, qui, par définition, s’applique à tout le monde et à tout moment.
Un autre problème est que la miséricorde est proclamée sans repentance. Tout le monde est le bienvenu. Todos, todos, todos*, tout le monde, crie sans cesse le pape François. Tout le monde est-il le bienvenu ? Certainement. Mais pas sans condition. Dieu a des exigences. Toute la Bible pourrait se résumer à un appel à la repentance et à une promesse de pardon. L’un ne peut être séparé de l’autre. Tout le monde est le bienvenu, mais tout le monde n’accepte pas l’invitation. Nous connaissons certainement la parabole du roi qui invite tout le monde aux noces de son fils. Il arrive un moment où la porte est fermée. En enfer, le scénario est différent. Tout le monde y est accueilli sans condition. Le slogan du diable est : « Viens comme tu es »**. Vous n’avez pas à changer. Vous n’avez pas à demander pardon. Vous ne devez pas lever le petit doigt pour aider les autres dans leurs besoins. Tout le monde est le bienvenu en enfer. Todos, todos, todos.
La miséricorde existe parce que le péché existe. La miséricorde existe parce que le jugement existe. La miséricorde existe parce que l’enfer existe. Là où le péché est caché, l’essence de la miséricorde est également cachée. Le but de la miséricorde n’est pas de dire aux autres à quel point ils sont mauvais, mais de leur parler du pardon des péchés. Tout ce que vous avez à faire, c’est de demander sincèrement. Il n’y a pas de conditions à remplir. Je remercie Dieu chaque jour pour son infinie miséricorde. Je vois tellement de colère et d’agressivité à notre époque. Les gens ne seraient pas aussi agressifs et en colère s’ils connaissaient le pardon de Dieu. Cependant, demander le pardon implique de reconnaître le péché. C’est la clé de la paix de l’esprit et du cœur. Rien n’est plus désastreux que de nier le mal. En général, les choses vont de mal en pis.
Il semble que FS veuille faire la paix avec la société séculière, mais la paix au détriment de la morale et de la vérité est la « paix » la plus impitoyable que l’on puisse imaginer. Dieu aime tout le monde. Il aime tous les pécheurs, mais il déteste vos péchés. Il espère ardemment que vous reviendrez à lui, tout comme il a espéré le retour du fils prodigue. Il ne veut rien d’autre que de vous faire partager son amour.
Pour ces raisons, je me réjouis de la clarification apportée par le livre opportun de José Antonio Ureta et Julio Loredo, The Breached Dam (Le barrage brisé). Il démontre pleinement que la Fiducia supplicans est le résultat d’un processus préparé par un groupe de pression très bien organisé au sein de l’Église catholique.
+ Rob Mutsaerts (évêque auxiliaire de ‘s-Hertogenbosch aux Pays-Bas).
Pour découvrir le livre c’est ici
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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4 réponses à “The Breached Dam : la Fiducia Supplicans capitule devant le mouvement LGBT”
Il existe une liberté incontestable de vivre ensemble pour des individus de même sexe. Mais ça ne peut
être dans le cadre d’un mariage religieux de la chrétienté.
Tiens ?… On revient sur l’épisode de l’Eglise face aux problèmes de sexes ?…
Autant que je me souvienne, il y a un mois grosso-modo, BREIZH Info avait bloqué mes commentaires à propos de Monseigneur Bergoglio, concernant l’époque où il officiait en Argentine, et qui n’est autre que Sa Sainteté Papale actuelle …
Remarquable commentaire. Comme j’aimerai avoir le même évêque !
BRAVO à l’évêque néerlandais et aux deux auteurs de ce bouquin !