Economiste élu président le 10 décembre 2023, Javier Milei soumet depuis 6 mois son pays à une expérience libertarienne radicale. Secteur par secteur, en voici les premiers résultats, du plus réussi au moins abouti.
– Objectif zéro déficit atteint : en 2023, le budget argentin était en négatif de 34 milliards de dollars US, soit – 5,2 % du pib (à comparer aux – 5,5 % français). En quelques mois, Milei est parvenu à un excédent de 300 à 620 millions de dollars, selon les sources (+ 0,05 à + 0.1 %).
Le président à la tronçonneuse a coupé tous les rameaux qui dépassent, pas mal de branches mortes mais aussi quelques racines : suppression de 9 ministères sur 18 ; renvoi de 50 000 à 60 000 fonctionnaires ; fermeture de Telam (l’AFP local) ; dissolution de l’Inadi (institut contre le racisme et les discriminations, doté de 400 fonctionnaires, une version australe de la Dilcrah) ; suspension des aides publiques à la presse (34 milliards de pesos économisés, c’est-à-dire environ 34 millions d’euros) ; réduction des subventions à l’énergie, aux transports, à la construction de routes et d’infrastructures publiques, provoquant explosion des tarifs ou arrêt des chantiers non entamés (- 21,7 % pour l’activité de construction en janvier). Les dépenses pour les retraites ou pour l’université (une des seules gratuites d’Amérique) ont été maintenues sur le papier, mais compte tenu de l’inflation, elles ont baissé en termes réels.
– Dette publique en nette diminution : en 2023, elle atteignait 154,5 % du pib ; après les mesures de purge, elle a été réduite à 86,2 % du pib (contre 110,6 % en France).
– Inflation en décélération : dans un premier temps, la dévaluation du peso (à qui Milei a retiré 54 % de sa valeur) et la réduction des subventions ont fait galoper une inflation déjà record. Mais l’arrêt complet de la planche à billet pour alimenter les déficits de l’État commence à avoir ses premiers effets anti-inflation, conformément à la théorie économique : les prix ont grimpé de 25,4 % en décembre, 20,6% en janvier, 13,2% en février, 11% en mars, 8,8 % en avril. Sur l’année, l’inflation devrait passer de + 211 % en 2023 à + 154 % en 2024.
– Logements moins inabordables : dès décembre, une décision présidentielle a libéralisé totalement le secteur. Après une hausse des loyers, le marché commence à se retourner : jusque-là gardés en réserve par des propriétaires rebutés par l’encadrement des loyers, de nouveaux logements ont été mis sur le marché. Selon une étude de la chambre de l’immobilier argentin (avril 2024), le nombre d’appartements disponibles à Buenos Aires serait passé de 6 600 en décembre à 19 000 trois mois plus tard.
Cette augmentation de l’offre a déjà des effets positifs sur les prix : selon le site immobilier argentin Zonaprop, la hausse des loyers dans le centre de Buenos Aires depuis un an se monte à + 262 %, mais depuis décembre 2023, on constate une décélération : + 21 % en janvier, + 2,9 % en février, + 1,3 % en mars, soit en dessous de l’inflation générale.
Les prix restent très élevés : il faut payer en ce moment 276 000 pesos par mois pour un studio en centre-ville, soit 292 euros (à comparer aux 400 euros du salaire moyen argentin).
– Des réformes structurelles à 50 % inabouties : cette dérèglementation du logement était l’un des 366 articles du « Décret de Nécessité et d’Urgence » adopté par Milei 10 jours après son arrivée au pouvoir. 7 jours plus tard, ce « Mégadécret » était complété par la « Loi des bases et points de départ de la liberté des Argentins », surnommée « loi omnibus », avec pas moins de 664 articles.
Privatisation de 41 entreprises publiques (dont la poste, la compagnie aérienne, la société pétrolière, les chemins de fer, la radio-télé publique, quelques banques ou le fabricant de satellites Arsat) ; divorce sans juge et donc sans frais d’avocat ; période d’essai allongé pour les travailleurs et licenciement moins coûteux pour les entreprises ; obligation d’une « présence à 100 % » pour les fonctionnaires ; liberté individuelle de choix de la mutuelle santé et liberté pour celle-ci de fixer ses tarifs ; chèque-éducation remis directement aux parents pour qu’ils puissent faire jouer la concurrence entre écoles ; suppression des limites d’accès au foncier pour les investisseurs étrangers, par ailleurs appâtés par des divers privilèges fiscaux … ce ne sont que quelques-unes de ces centaines de mesures qui veulent relancer l’économie dans l’immédiat et plus durablement jeter les bases d’une société libertarienne.
Ces nouveautés sont loin d’être toutes passées dans la réalité. La plupart doivent être entérinées par le parlement, où le parti de Milei est minoritaire mais peut compter sur l’alliance des partis de droite et du centre. Le 30 avril, un compromis a été négocié avec les députés : de 300 à 400 des 664 articles de la loi omnibus ont été entérinés. Reste à obtenir l’accord du Sénat.
– Casse sociale 100 % garantie : sous l’effet de l’austérité budgétaire, la récession de l’économie s’est aggravée : après -1,1 % en 2023, on s’attend à – 2,8 %, voire – 3,5 % en 2024. Le chômage passerait dans le même temps de 6,6 à 8 %.
Déjà catastrophique avant Milei, la situation de la majorité des Argentins, s’est donc encore aggravée. Selon l’Université catholique argentine, les pauvres représentent maintenant 57 % des Argentins, contre 49 % au moment de l’élection de Milei et 36 % au début de 2023 (l’essentiel du passif est donc à attribuer à la présidente péroniste battue Christina Kirchner).
Le gouvernement Milei a bien fait le geste d’augmenter les allocations familiales et les bons alimentaires, mais la dévaluation du peso et l’inflation ont davantage pesé sur le pouvoir d’achat des familles.
Sur la santé, Milei s’apprêterait même à revenir à une certaine régulation, car les mutuelles ont eu la main très lourde sur les tarifs, conduisant de nombreuses familles à se passer d’assurance.
– Popularité conservée : et pourtant, Milei garde une popularité assez large, avec une base sociale populaire de gens travaillant hors cadre légal, dans ce secteur informel qui représente la moitié de la population active argentine : ces électeurs fidèles connaissent la dérégulation depuis toujours et n’attendent rien de l’État ni des syndicats seulement implantés dans le secteur privé et public classique.
Un sondage de l’institut Proyeccion Consultores de début mai crédite Milei de 50,2 % d’opinions favorables (contre 38,7 pour Kirchner). Pour 53 % des sondés, Milei tient ses promesses ; pour 52 % il a un plan cohérent ; pour 49 % il est honnête ; pour 47 % il est crédible ; mais seuls 38 % lui accordent une stabilité émotionnelle et un sens du dialogue et à peine 35 %, de l’empathie pour les milieux sociaux les plus vulnérables.
Milei a demandé aux Argentins 2 ans de patience, avant de voir l’économie refleurir. Il semble qu’il soit encore largement entendu : selon le sondage, 42,5 % des Argentins sont optimistes pour l’avenir du pays, 32 % incertains et 25,5 % pessimistes.
Enora
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6 réponses à “Argentine. Des premiers résultats encourageants pour Javier Milei”
Bonjour , je pense qu’en France il faudra en passer par la car la France croule sous le poids de son administration et des impôts.
Si nos les services de l’état fonctionnait bien mais rien ne marche dans notre pays. Il est vrai que nous sommes dirigés par des politiques irresponsables et corrompus qui ont confisqué la démocratie au peuple.
Et surtout faire le Frexit pour retrouver notre souveraineté.
Très bon papier qui résume bien la situation actuelle de l’Argentine. Dans la jungle des chiffres, il est toujours possible de trouver quelques points de divergence. Par exemple, la dette publique aurait atteint 88% du PIB en décembre 2023. La suite n’est pas très pertinente dans le sens où le PIB a baissé fortement et le Trésor a pris en charge des dettes de la banque centrale. On peut aussi estimer que la dévaluation du peso officiel par Milei n’a pas eu un impact majeur sur l’inflation chauffée à blanc par les déficits du gouvernement antérieur.
quand je vois les mesures radicales et efficaces de ce président et que je compare la mesurette de lemaire (qui s’attaque avant tout a des aides et a la rente ) je suis mdr !pas étonnant que notre pays sombre a vitesse grand v !
Pour bien connaitre l’Argentine, je le dis sans ambages : Milei se doit de reussir! C’est l’unique chance -et probablement la dernière- pour ce Grand pays de l’Amérique latine qui a tellement souffert sous les diverses présidences socialistes.
Effectivement il y a des contradictions entre les statistiques, quand on cherche à les creuser un peu. Par exemple, la dette publique semble avoir fondu comme par magie…n’étant pas économiste, je ne trouve pas l’explication. Il faut prendre ces données comme des ordres de grandeur.
un gars qui ne flatte pas le peuple , courageux et qui tente de redresser son pays, c’est pourquoi les argentins l’ont élu