L’UDB vient de fêter la soixantième anniversaire de sa création à Pontivy avec, en vedette, Edwy Plenel, le cofondateur de Médiapart. L’UDB est le seul parti breton digne de ce nom. Evidemment, il y a boire et à manger dans son discours.
L’impact électoral de l’UDB demeure limité ; on a pu le vérifier aux élections législatives de 2022. D’abord le parti n’a pu présenter des candidats que dans 22 circonscriptions (sur 37), signe d’une insuffisance en militants et en ressources financières. Ensuite aucun candidat n’a pu dépasser la barre des 5 % des suffrages exprimés : 1,65 % pour Fanny Darras (Saint-Brieuc) ; 1,49 % pour Françoise Le Scour (Guingamp) ; 2,13 % pour Trefina Kerrain (Lannion) ; 2,47 % pour Bernard Le Rest (Quimper) ; 2,01 % pour Sandrine Migerel (Brest) ; 2,21 % pour Michel Beaupré (Morlaix) ; 3,33 % pour Angélique De Cecco (Landivisiau-Landerneau) ; 3,05 % pour Philippe Plouzané (Carhaix) ; 4,76 % pour Maxime Touzé (Douarnenez) ; 2,11 % pour Jean-François Monnier (Rennes-Bruz) ; 2,11 % pour Mathilde Lahogue (Rennes-Cesson-Sévigné) ; 1,61 % pour Céline Blatéron (Redon) ; 1,29 % pour Eliane Leclercq (Saint-Malo) ; 1,75 % pour Joël Le Gall (Rennes-Saint-Jacques-de-la-Lande) ; 2,73 % pour Gwenaël Duret (Nantes-Saint-Herblain) ; 1,23 % pour Hervé Carro (Saint-Nazaire) ; 1,06 % pour Françoise Ramel (Vannes) ; 1,79 % pour Jean-Christophe Cordaillat-Dallara (Auray) ; 1,92 % pour Lydie Massard (Pontivy) ; 3,31 % pour Gaël Briand (Lorient) ; 4,19 % pour Tiphaine Siret (Gourin-Hennebont). Il faut ajouter Paul Molac (Ploërmel), député sortant, qui était présenté comme « soutien » (Le Peuple breton, juin 2022). Un mauvais coup pour les finances du parti puisque, d’après l’article L. 167 du code électoral, « il est remboursé aux candidats ayant obtenu au moins 5 p. 100 des suffrages exprimés le coût du papier, l’impression des bulletins de vote, affiches, circulaires ainsi que les frais d’affichage ». Les adhérents ont donc intérêt à sortir leur carnet de chèques…
Avec la poussée des insoumis, la situation se présentait mal pour l’UDB, forcément victime du vote utile qui bénéficiait à la Nupes. Avant le scrutin, Tréfina Kerrain, adjointe à la culture à Lannion, avait fait feu : « La soi-disant “grande union“ autour de Jean-Luc Mélenchon, s’est en réalité faite à l’aide d’un pistolet posé sur la tempe de partis affaiblis par un vote contestataire mais non représentatif. Drôle de façon de reconstruire la démocratie ! La manière dont les négociations ont été menées reflète tout autant l’autoritarisme de la France insoumise et des grandes instances nationales : pas de place pour les acteurs locaux du territoire, pas de discussions avec ceux qui s’impliquent sur le terrain. C’est à prendre ou à laisser ! Beaucoup se sentent NUPéS. Pour ces législatives, l’UDB entend incarner une gauche non-mélenchoniste pour un électorat orphelin. » (Le Peuple breton, juin 2022) Gaël Briand apparaît tout aussi remonté : « Le projet Nupes qui fait la UNE des médias n’est rien de moins que LFI “cédant“ des circonscriptions à EELV, au PCF et au PS » (Le Peuple breton, juin 2022).
Les élections régionales rendent service à l’UDB
Pour expliquer ces scores modestes, Romain Pasquier, politologue et directeur de recherches au CNRS, croit trouver une explication : « Les partis régionalistes, et en particulier l’UDB, ont été les aiguillons de la décentralisation et de la défense des langues. Mais l’essentiel de leur pensée politique a été captée par la gauche socialiste et par la gauche écologiste. » Autre explication : « Comme la plupart des partis régionalistes et nationalistes en France, l’UDB reste un parti d’alliances. Elle arrive à se positionner sur les scrutins de listes, en s’entendant avec les socialistes ou les écologistes. Elle s’est d’ailleurs plutôt bien débrouillée aux dernières régionales. L’UDB a réussi à former un groupe, avec des élus d’expérience. » (Le Télégramme, mercredi 24 avril 2024).
Effectivement, aux élections régionales de juin 2021, l’UDB s’est associée avec les écolos (EELV) pour présenter une liste intitulée “Bretagne d’avenir, écologique, autonome et solidaire“ ; 91 candidats dont 22 UDB. Elle obtient 126 323 suffrages (14,84 %) au premier tour et 176 767 voix (20,22 %) au second. Résultats qui ont permis de constituer un groupe au conseil régional (« Breizh a-gleiz – autonomie, écologie, territoires ») avec quatre UDB (Gaël Briand, Nil Caouissin, Christian Guyonvarc’h, Ana Sohier) et deux associées (Aziliz Gouez et Valérie Tabart), tandis que les écologistes constituaient le leur (Les Ecologistes de Bretagne/Ekologourien Breizh) avec six élus.
Romain Pasquier insiste sur le fait que l’UDB possède « une réelle capacité à promouvoir des débats. Et à avoir une vraie réflexion intellectuelle (…) Ce qu’a fait Nil Caouissin , avec son manifeste pour un statut de résident, a permis à l’UDB d’imposer ses thématiques dans le débat aux dernières élections régionales » (Le Télégramme, mercredi 24 avril 2024). Au conseil régional, ses élus sont capables de défendre un dossier avec ardeur. Mais les points faibles du parti méritent d’être évoqués. L’absence d’un leader possédant la dimension régionale et, de ce fait médiatisé, constitue un handicap sérieux. La composition sociologique de l’UDB ne favorise pas son développement ; on a l’impression d’avoir affaire à une formation de profs et de fonctionnaires, des gens incapables de « parler » aux classes populaires – on pratique l’entre-soi. Il est vrai que le parti se veut « de gauche », mais pas « socialiste » – il ne connaît pas la lutte des classes ! « Ecologiste », davantage en paroles qu’en actes. On avait pu le remarquer lors de la bagarre concernant le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes : l’UDB avait évité de prendre position ; silence radio au Peuple breton.
Les immigrés n’ont pas envie de parler breton
Le zèle que met l’UDB à vouloir s’associer aux initiatives de la gauche hexagonale étonne toujours. Faut-il voir là la crainte de ses cadres de se voir contestée leur qualité d’hommes de gauche ? Autre sujet d’étonnement : le discours de l’UDB en faveur de l’immigration. Alors que plus il y aura d’immigrés en Bretagne, plus il sera difficile de faire avancer la cause bretonne. L’immigré ne se sent pas Breton et il n’a pas l’intention d’envoyer ses enfants chez Diwan ; il n’est pas davantage intéressé par l’« autonomie » que défend l’UDB. Il attend simplement des papiers et des aides… Ne comptons pas sur lui pour voter en faveur de l’UDB ; ses seuls repères politiques s’appellent Mélenchon et LFI. On ne comprend donc pas l’intérêt politique et électoral que l’UDB peut tirer de ce choix qui ne correspond pas à la position de la majorité des Bretons. Pourtant, dans le prochain numéro du Peuple breton, Gaël Briand pourrait mettre en valeur, avec une belle enquête, l’action des immigrés dans le quartier du Blosne à Rennes : cocaïne, crack, kalachnikov, agressions verbales ou physiques envers les employés communaux… Le syndicat Sud Solidaires des agents territoriaux dénonce « ce climat permanent d’insécurité » et cette situation « qui devient de plus alarmante, voire explosive » (Ouest-France, Rennes, mercredi 24 avril 2024). Une interview de Stéphane Morandeau, secrétaire de la section syndicale SUD CT 35, s’impose…
Soixante ans après sa création, l’UDB prouve que le sérieux et la suite dans les idées paient. Avec de petits moyens, ses cadres parviennent à sortir chaque mois Le Peuple breton, tandis que leur image et leur potentiel électoral leur permettent de bénéficier de quelques strapontins dans des municipalités et de constituer un groupe au conseil régional. La droite – régionaliste et autonomiste – bretonne ne peut pas en dire autant ! Elle essaie de se réveiller la veille des élections et s’endort ensuite…
Bernard Morvan
Illustration : DR
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3 réponses à “UDB : soixante ans de militantisme à gauche”
« Le seul parti breton digne de ce nom » ? Digne de ce nom, peut-être, mais pas de cet adjectif !
Euh…faire venir l’incendiaire et fake newsaire Edwy Plenel…laisse pantois! Je comprends que d’aucuns aient filé au Parti breton moins inféodé à la gôche au goût de caviar.
Dans la charte de constitution de ce parti lors de sa création il est clairement précisé : « L’udb est un parti charnière entre le mouvement breton et la gauche française ». Ce qui explique son opposition virale au nationalisme breton… Aujourd’hui, après 60 ans de bonne collaboration et de soumission à la gauche et l’extrême-gauche françaises, ce parti a bien du mal à dépasser les 2 % aux élections. En fait, un parti de Bretons et rien de plus !