Douarnenez. Une hausse de la taxe d’habitation qui ne passe pas [Lettre ouverte]

Un lecteur de Douarnenez nous a adressé une lettre ouverte à Jocelyne Poitevin, maire de Douarnenez, au sujet de la hausse de la taxe d’habitation. Nous reproduisons sa lettre ci-dessous, sous couvert d’anonymat que notre lecteur a tenu à garder, pour des raisons de sécurité.

Madame le Maire,

Je suis résident secondaire à Douarnenez depuis plus de vingt ans, résigné à supporter en tant que tel, une majoration particulière de 22% du montant de ma taxe d’habitation bien que petit consommateur des services communautaires.

Il n’y a pas si longtemps, quelques-uns de vos élus m’avaient donné l’espoir d’un retour à plus de justice en matière de contribution locale. Conscients que notre présence à temps partiel à Douarnenez et de notre apport substantiel à l’économie locale, ils avaient proposé la suppression de notre surtaxe afin de ramener tous les habitants à l’égalité. Ils ne furent pas entendus.

Leurs vainqueurs, faisant fi aujourd’hui de toute retenue, ont décidé que les résidents secondaires, en plus du désagrément d’être désormais les seuls assujettis à la taxe d’habitation, auraient à supporter par le biais d’une majoration de 113 % du taux d’intercommunalité, une augmentation de celle-ci de 36 %.

Il s’ensuit que pour chacun des quatre mois de vacances scolaires à Douarnenez, il me faudra débourser pas moins de 600 €. C’est révoltant !

Saisissant la perche idéale du décret du 25 août 2023 que vous tendait le gouvernement, vous avez choisi de déclarer ouvertement une guerre idéologique aux propriétaires des résidences secondaires (16 % des habitations de Douarnenez). Aucune ambiguïté dans votre motivation qui a le mérite de la franchise : vous voulez, par le mécanisme mis en place reporter sur les seuls résidents secondaires le coût de la rénovation de la voierie. « Cette option décidée à l’échelle communautaire est très ciblée ». On veut privilégier les résidents à l’année. « Je n’ai pas envie que Douarnenez devienne un Bénodet » avez-vous affirmé. Et continuant de glisser sur la pente du parti pris, vous avez menacé en fin de séance de porter la surtaxe à 60 %, voire 100%, si des tensions venaient à apparaître dans la recherche d’habitat.

Comble d’infamie, on a même entendu dans votre conseil que le temps était venu de définir un statut d’administré privilégié, réservé aux résidents permanents.

L’opprobre grandissante envers les touristes de passage vous amènera t’elle bientôt à les taxer aussi dans la même proportion que les résidents secondaires, à savoir : 20 € /jour quand ils auront choisi l’hôtel, la chambre d’hôtes, le camping, le meublé, le gite rural ou le centre de vacances ?

En faisant cela vous feriez d’une pierre deux coups : en les étrillant une bonne fois pour toutes, vous leur passeriez l’envie de revenir.

En cédant au classisme, comme on dit maintenant, et au wokisme, autre terme à la mode pour désigner la lutte contre le colonialisme touristique parasitaire, vous laissez s’ installer à Douarnenez une ambiance délétère qui ne laisse rien présager de bon.

Vous avez pu comme moi, lire ici et là sur des adhésifs sauvages et anonymes, de qualité professionnelle :

« Parisiens et autres touristes envahisseurs, la Bretagne n’est pas une résidence secondaire. Cassez-vous ! » ou « A bas le tourisme ! ».

Même, les étrangers, passagers lucratifs des petits paquebots en escale pour un jour, ont été également conspués et rejetés.

En procédant au lynchage fiscal de ses résidents secondaires réduits au rôle de « pompes à fric », votre commune donne la fâcheuse impression d’accompagner un courant de haine ciblé qui se superpose à celui plus folklorique jusque-là, des touristes de passage.

En quelques mois, les résidents secondaires et tous les touristes quels qu’ils soient, autrefois sauveurs de misère puis facteurs de richesse, sont devenus des parias accusés de porter atteinte au droit au logement et à la culture bretonne. Douarnenez ne peut à la fois continuer d’affirmer que le tourisme est un facteur important de son développement économique, et se faire complice « à l’insu de son plein gré » de la chasse aux « étrangers » au pays. Vous ne pouvez sans risque majeur de perdre sur tous les tableaux, poursuivre la culture de ce paradoxe malsain.

Il est malvenu de faire des résidents secondaires, les boucs émissaires de la crise du logement en Bretagne alors qu’ils ne sont que l’arbre qui cache la forêt des choix politiques qui sont la cause directe ou indirecte de l’insuffisance de logements sociaux : emprunts communaux toxiques, endettement hors normes de l’Etat, augmentation de 40 % du prix de l’énergie qui plombe le prix de la construction neuve et les réhabilitations, abandon des zones rurales dépouillées des services essentiels, record mondial des prélèvements sociaux et fiscaux en France, déclassement des logements vétustes (DPE) non compensé par la construction de logements nouveaux, hébergement d’urgence de l’immigration massive, et pour finir une inflation galopante de 24 % en trois ans du panier des « gilets jaunes », accompagnée d’ une hausse insupportable du taux du crédit immobilier qui interdit au plus grand nombre l’accès à la propriété ou à la location de qualité.

Il ne faudrait pas non plus oublier d’invoquer l’explosion du nombre des divorces et des violences conjugales qui provoque un doublement dans l’urgence des lieux de résidence des familles. Gardez aussi à l’esprit la crise du logement des étudiants.

Gardez- vous de faire le procès des français, bretons ou pas, qui libérés des loyers très élevés des grandes villes par le télé-travail, ont gagné la province maritime chère à leur cœur pour préserver leur niveau de vie mis à mal par l’inflation. Ce faisant ils ont provoqué bien involontairement une forte tension des prix de l’immobilier dont ils se seraient bien passés eux aussi. Il ne faut pas être surpris si les français, chacun à son niveau de « richesses », tentent d’échapper à la paupérisation en migrant en France même, au détriment des moins bien lotis qu’eux.

Les bretons que j’ai vus autrefois se réfugier l’été dans leur appentis pour payer leur maison avec les loyers des touristes ne me semblent pas contrariés de la revendre de nos jours à prix d’or aux « parisiens ». Ils le sont d’autant moins qu’il s’avère selon l’INSEE que leurs acquéreurs sont en grande majorité des bretons ! Ceux qui espèrent encore vendre aux « bretons de Paris », seront moins ravis de déduire de vos propos qu’ils devront céder leur maison à prix cassé, aux travailleurs venus d’ailleurs, résider en permanence à Douarnenez pour occuper les emplois d’avenir promis à la Bretagne.

En attendant, l’agence ADEUPa Brest-Bretagne dénombre en mars 2023, 41 000 logements vacants dans le Finistère, dont 18 000 inoccupés depuis plus de deux ans. Probablement que bon nombre d’entre eux sont interdits à la location par la loi récente, pour cause de vétusté à laquelle leur propriétaire ne peut remédier faute de moyens importants ou d’espérance d’un loyer suffisant permettant d’amortir les travaux de remise à niveau. Et puis sans doute, que le coût du transport individuel et la désertification des villages en dissuadent plus d’un d’aller habiter en zone rurale dépourvue de transport public et d’emplois.

S’ajoute à cela, l’immigration qui vient amplifier le besoin pressant de logements en Bretagne et suscite une grogne montante : « Logement, priorité aux français », « Paris garde tes immigrés », « Breton, maitre chez toi !», lit -on en maints endroits de la région.

Qui aurait pu prévoir qu’un jour, les « résidents secondaires » qu’ils soient de France ou d’Afrique, qu’ils soient détestés ou plaints, qu’ils rapportent ou qu’ils coûtent, monteraient dans la même charrette ou plutôt, finiraient à la mer dans le même bateau ?

Après un tel inventaire, je veux croire que preuve est faite que la disparition des résidents secondaires en Bretagne ne résoudrait rien, et que ceux qui les pourchassent participent au chaos de la guerre de tous contre tous, dont ils finiront par être eux- mêmes les victimes.

Pourquoi mes amis bretons, autonomistes/régionalistes/ nationalistes, se trompent ils si facilement de cible en visant les résidents secondaires acquis à leur cause et sources importantes et durables de richesses locales ?

Je devais vous dire que le breton que je suis par mes grands- parents originaires du Croisic d’un côté, et de la Croix-Héléan de l’autre, souffre de la profonde blessure que lui causent sa taxe d’habitation méchamment augmentée, assortie d’une « touristophobie » qui va gangréner notre Bretagne bien aimée.

Ancien élu local, connaisseur des difficultés de la gestion municipale, je vous laisse méditer avec vos conseillers mes longues et tristes réflexions, nécessairement politiques.

Le risque d’actes de vandalisme envers les maisons et les véhicules des « touristes » qui ne pensent pas comme vous, n’étant pas exclu, je suis contraint, sécurité oblige, de garder pour l’instant l’anonymat.

En vous remerciant de votre attention, je vous souhaite Madame le Maire, bonne chance et bon courage.

Crédit photo : DR (photo d’illustration)
[cc] Breizh-info.com, 2024, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

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11 réponses à “Douarnenez. Une hausse de la taxe d’habitation qui ne passe pas [Lettre ouverte]”

  1. Bohanne dit :

    Ils ont bien raison de taxer les touristes, la priorité doit être pour les habitants, sur la côte c’est devenu impossible de se loger avec toutes ces maisons secondaires….

  2. Massip Marie Laure dit :

    Le tourisme vous aide à vivre !

  3. Ar Baot dit :

    Toujours la chute libre de la France et de ses régions, avec, aux commandes, nos séides de la ripouxblique… et en tête d’affiche, pour Douarnenez, la joyeuse participation de son maire, Jocelyne Poitevin.

    Triste France, triste Bretagne… jusqu’à quand ?

    Un jour, proche, le réveil surviendra, n’en doutons pas. Il sera, hélas, très violent, et surprendra bien des édiles. Il n’y aura plus lieu alors, de verser des larmes de crocodile et de se repentir du feu qu’ils auront contribué, sans complexe, sciemment, à répandre…

  4. JP VARESE dit :

    Bohanne,Vous justifiez la taxation des personnes qui vivent dans des résidences secondaires (donc de touristes) dont une partie fait vivre la ville de Douarnenez. Je préfère – et de loin – des « touristes » de ce genre qui apportent de l’argent à des migrants/ « mineurs isolés » qui vivent sur la communauté.
    Donc je remercie vivement la personne qui a écrit à la Mairie de Douarnenez cette lettre intelligente, remplie d’arguments solides.

  5. Etienne dit :

    Merci pour votre lettre pleine de bon sens. Monter les Francais les uns contre les autres est de tout temps la solution de facilité usitée par les politiques médiocres en manque de vision et de projets. « Diviser pour mieux régner ». Heureusement qu’une petite part de touriste est là pour apporter un peu soutien économique. Il est absolument faux de faire croire que les touristes conduisent à la hausse du prix de l’immobilier à DZ. C’est vrai pour les maison avec vue sur mer mais pour le reste c’est une ville où l’immobilier est peu cher avec beaucoup de logements vides dans le centre. Accuser les touristes et les parisiens est injuste et stupide, et reflète un état d’esprit mesquin et une grande fainéantise intellectuelle. Quand les touristes et parisiens en auront assez s’être traites comme des parias et des vaches à lait par des ingrats, ils partiront vers des contrées plus accueillantes et la Bretagne pourra retrouver à sa misère séculaire et les remplacera par des africains en quête de logements. Les bretons apprécieront ces nouveaux venus qui font le bonheur des grandes villes actuellement.

  6. jacques nedelec dit :

    C est bien une municipalité coco ?
    Donc c est pas étonnant

  7. zozo83 dit :

    Pour le gouvernement, on est riche lorsqu’on est propriétaire: alors lorsqu’on est propriétaire d’une maison secondaire…pour eux, on est super riche. et, devinez où ils trouvent l’argent, dans leur poche.
    Un conseil: revendez votre résidence secondaire et allez à l’hôtel, ça vous coûtera bien moins cher et vous perdrez moins de temps en palabres avec votre édile.

  8. ALREN dit :

    On voudrait nous faire croire que s’il y avait moins de résidences secondaires sur la côte bretonne, il y aurait plus de place pour les candidats bretons à un logement. En fait tout le monde fait semblant de rêver que le littoral pourrait accueillir tous ceux qui ont la prétention de vivre dans une maison ou un appartement avec vue sur la mer. Moi aussi j’en ai rêvé avant mon retour au pays mais il a fallu être réaliste. Ce fantasme de vie les « pieds sur le sable fin et la vue sur le grand large n’est pas compatible avec la protection du littoral si on ne veut pas ériger un mur de béton entre mer et arrière pays. Il faut rééquilibrer la démographie vers le centre Bretagne et arrêter les concentrations d’entreprises sur les zones à l’extérieur des 2×2 voies qui ceinturent la Bretagne. Je vis en Centre-Bretagne (à 40 km du littoral donc pas si loin de la mer), les entreprises sont les bienvenues et le foncier sera plus accessible aux futurs propriétaires qui veulent s’y intéresser, encore faut-il que les Bretons du littoral pensent à visiter l’intérieur des terres, ils s’apercevront qu’on n’est pas dans la brousse sauvage qui semble les effrayer. .

  9. patphil dit :

    ben il faut bien un pognon de dingue pour subventionner les bateaux de migrants en méditerranée, les gazaouis, et autres

  10. Le Gall Nicole dit :

    Pour ceux qui croient que Douarnenez a encore  » une municipalité coco » : cela fait le troisième mandat
    que la Mairie est dirigée par des divers-droite. Madame Jocelyne Poitevin cumule les postes de Maire de Douarnenez, de Présidente de la Communauté de Communes du Pays de Douarnenez et de Vice-Présidente du Conseil Départemental du Finistère( dont le Président est Maël de Calan )
    A signaler que pour tous les propriétaires la taxe foncière est elle aussi excessivement élevée à Douarnenez.
    Une Douarneniste

  11. Xsian dit :

    Tout cela est déplorable, Douarnenez qui a un long passe communiste commençait à se réveiller avec un changement vers la droite ,mais cette mesure folle qui vise souvent des Bretons qui ont gardé des attaches en Bretagne est déléraire et ne résoudra en rien les problèmes économiques. Le tourisme fait vivre de nombreuses personnes agent immobilier Notaires , commerces et ces mesures de taxes excessives si elles peuvent a court terme libérer du foncier détruisent des emplois sur le long terme et notamment les locaux qui vivent du tourisme

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