Pr Daniel Nizri (Ligue contre le cancer) : « A l’origine de près de 160 000 décès par an en France, le cancer est la première cause de mortalité chez l’homme et la deuxième chez la femme » [Interview]

Depuis plus de 20 ans, la Ligue contre le cancer organise son colloque de la recherche, un événement qui permet de faire le point sur les dernières avancées en la matière et de présenter les résultats des projets soutenus par la Ligue, 1er financeur privé de la recherche en cancérologie en France. Organisé par Le Conseil Scientifique Inter-Régional du Grand-Ouest (CSIRGO) et porté par le comité départemental d’Ille-et-Vilaine, l’événement a lieu les 8 et 9 février, au Couvent de Jacobins de Rennes.

A l’occasion de cet évènement, nous avons interviewé le président de la Ligue contre le cancer, le Pr Daniel Nizri.

Breizh-info.com : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ? Qu’est-ce qui vous a amené à vous engager dans cette mission d’intérêt général qu’est la lutte contre le cancer ?

Pr Daniel Nizri (Ligue contre le cancer) : Oncologue, je débute ma carrière à l’APHP dans les services de radiothérapie et d’oncologie médicale de la Pitié-Salpêtrière. Devenu conseiller au Ministère de la santé, je participe à la mise en place du premier Plan cancer. Promu au poste d’inspecteur général des affaires sociales au ministère des Affaires sociales et de la Santé, je prends en 2019 la présidence du Programme national nutrition santé. Mon parcours professionnel m’a en effet très tôt fait comprendre que les inégalités sont lourdes d’impact face à la santé en général et au cancer en particulier. C’est ce constat qui m’a poussé à m’engager en rejoignant la Ligue contre le cancer.

Président du Comité départemental de Seine Saint Denis depuis, j’ai pu observer au quotidien les conséquences graves pour les malades avec une accélération notable depuis la crise du COVID 19 de la dégradation de notre système santé. Allongement des délais d’accès aux traitements, pénuries de médicaments, inégalités dans la qualité des parcours en fonction des origines socio-économiques ou géographique, restes à charge qui pèsent lourdement sur les personnes aux revenus modestes. La mission de la Ligue qui est d’accompagner les patients avant, pendant et après la maladie prend ici tout son sens. Elu vice-président de la Ligue en , je succède en tant que président à Axel Kahn après que ce dernier m’ait demandé d’assurer son intérim en juin 2021.

Breizh-info.com : Le 24ème colloque de la recherche se déroule les 8 et 9 février à Rennes, quel  le programme ?

Pr Daniel Nizri (Ligue contre le cancer) : Le colloque de la recherche est un temps des temps forts de la Ligue. Il permet aux chercheurs soutenus par la Ligue de venir présenter leurs plus récentes avancées. Temps d’échanges entre professionnels mais également opportunité pour les Ligueurs, bénévoles, salariés et élus de pouvoir constater le fruit de leur travail. Au programme cette année, les axes de recherche les plus prometteurs : avancées dans la prise en charge du mélanome, thérapies cellulaires innovantes, ARN thérapeutiques, innovations en oncopédiatrie mais également des interventions sur les interventions non médicamenteuses et l’accès aux thérapies innovantes pour tous et partout.

Breizh-info.com : Concrètement, à quoi servent les dons que font les particuliers, les mécènes, les entreprises, à la Ligue contre le Cancer ? Comment sont-ils utilisés?

Pr Daniel Nizri (Ligue contre le cancer) : Structure associative, la Ligue ne vit que des dons des particuliers et des entreprises et des libéralités de ses testateurs. Une grande partie des dons puisque telle est la volonté de nos donateurs est consacré au financement d’une recherche destinée à faire avancer la connaissance du cancer et permettre la mise au point de thérapies innovantes. Mais au-delà de la recherche la Ligue intervient dans bien d’autres domaines tous en lien avec la lutte contre la maladie cancéreuse.

Avant la maladie en prévention pour lutter efficacement contre le cancer. On le sait aujourd’hui près de 40% des cancers sont évitables si l’on adopte des comportements promoteurs de santé. La Ligue communique régulièrement sur les bienfaits d’une hygiène de vie adaptée, sur les facteurs de risque et sur l’importance des programmes de dépistages organisés. Nous agissons aussi pour le respect ou le renforcement des lois et des réglementations visant à interdire la diffusion de produits industriels nuisibles à la santé.

Pendant la maladie, la Ligue intervient concrètement aux côtés des malades et de leurs proches aidants. Pour agir au plus près des personnes fragilisées par la maladie cancéreuse, nos 103 Comités départementaux présents sur l’ensemble du territoire Outre-Mer compris propose un ensemble de services : soutien financier, accès au prêt, activité physique adaptée, aide psychologique, soin socio-esthétique, amélioration du confort à l’hôpital, aide-ménagère…

La Ligue demeure également présente dans l’après-cancer, elle a développé une palette d’offres qui vont de la rééducation des troubles cognitifs liés au cancer, à un service dédié de conseils pour le retour à l’emploi, d’une aide active pour le maintien de la possibilité d’emprunter mais aussi de l’adoption par les pouvoirs publics d’un droit à l’oubli qui permet aux personnes qui ont souffert d’un cancer passé quelques années après leur guérison de ne plus avoir à mentionner leur maladie lorsqu’il ont besoin d’accéder à l’emprunt.

Enfin, porte-parole des personnes malades et de leurs proches, la Ligue œuvre agit auprès des institutions et des entreprises afin de promouvoir les droits des patients et des usagers du système de santé. Par le biais de ses quatre missions sociales parfaitement imbriquées, la Ligue contre le cancer est le seul acteur indépendant dans le paysage français de la lutte contre le cancer à posséder une vue d’ensemble et à avoir une approche globale de la maladie.

Breizh-info.com : Pourriez-vous nous donner un aperçu de la situation actuelle du cancer en France ? Quelles sont les tendances en termes de prévalence, de survie et de mortalité ?

Pr Daniel Nizri (Ligue contre le cancer) : A l’origine de près de 160 000 décès par an en France, le cancer est la première cause de mortalité chez l’homme et la deuxième chez la femme. En 2023, ce sont près de 430 000 personnes qui se verront diagnostiquer un cancer. Vieillissement de la population, variations dans l’exposition aux facteurs de risque et développement du dépistage ont conduit à un doublement de l’incidence du cancer au cours des 30 dernières années. De nombreux facteurs de risque interviennent dans l’apparition des cancers. Ils peuvent être liés à l’âge, à l’histoire familiale, être liés à des comportements ou à l’environnement. A ce constat, on doit opposer qu’on a fait ces dernières années de grands pas dans la compréhension de la maladie cancéreuse. Les innovations thérapeutiques telles que les immunothérapies ou les thérapies cellulaires sont venu renforcer l’arsenal dont dispose la médecine pour traiter le cancer. Ces progrès ont une incidence sur le taux de guérison qui varie en fonction de la localisation du cancer, mais tous cancers confondus la médiane de survie à 5 ans avec 60% est en augmentation.

Breizh-info.com : Quelles sont les principales stratégies et initiatives que la Ligue contre le cancer met en œuvre pour lutter contre cette maladie ?

Pr Daniel Nizri (Ligue contre le cancer) : Réduire le nombre de cancers repose sur l’éducation à la santé et une politique ambitieuse de prévention et de dépistage, mais aussi en investissant dans une recherche qui garantit à tous et partout l’accès aux innovations. Si les évolutions liées à la démographie sont subies, celles liées à l’exposition aux principaux facteurs de risque sont quant à elles en grande partie évitables. Ainsi, l’augmentation préoccupante du nombre de cancers du poumon chez la femme est la conséquence du développement du tabagisme. Ainsi, la croissance importante du nombre de cancers de la peau est due à l’augmentation de l’exposition aux rayons UV. Ces chiffres doivent conduire tout le monde à prendre sans tarder le virage de la prévention. Car on ne le dira jamais assez, près de la moitié des cancers pourraient être évités grâce aux changements de nos comportements et de nos modes de vie (tabac, alcool, alimentation déséquilibrée, sédentarité, exposition aux rayons UV). Pour éviter les cancers de demain, c’est aujourd’hui qu’il faut agir

Breizh-info.com : Pouvez-vous nous parler des avancées les plus prometteuses dans la recherche sur le cancer en France ou à l’international ?

Pr Daniel Nizri (Ligue contre le cancer) : La recherche française est très performante dans le champ de la cancérologie et nos équipes n’ont pas à rougir face à leurs confrères étrangers. Les avancées les plus prometteuses se situent dans la compréhension du fonctionnement de la tumeur et de ses interactions avec son environnement. De ces découvertes découlent de nouvelles approches, immunothérapies, thérapies cellulaires, ARN thérapeutiques.

Breizh-info.com : Comment la Ligue contre le cancer soutient-elle la recherche et quel rôle joue-t-elle dans le financement de nouveaux traitements et technologies ?

Pr Daniel Nizri (Ligue contre le cancer) : Le soutien de la recherche à la Ligue s’appuie sur l’expertise de son conseil scientifique national mais aussi de ses quatre conseils scientifiques interrégionaux. La Ligue a également fait le choix de soutenir des chercheurs et leurs équipes dans la durée au plan national comme régional. Ses différents appels à projets permettent de financer la recherche clinique, translationnelle et pré clinique.

Breizh-info.com : En termes de prévention, quel message souhaitez-vous faire passer au grand public?

Pr Daniel Nizri (Ligue contre le cancer) : 40% des cancers pourraient être évités en modifiant nos modes de vie. En diminuant par exemple l’exposition à certains facteurs de risque avérés tels que le tabac et l’alcool. Mais également en luttant contre la malbouffe, le surpoids, la sédentarité et la surexposition solaire. Et même si les facteurs de risques liés à l’environnement ne sont pas aujourd’hui, en l’état actuel des connaissances scientifiques, encore fermement démontrés, des comportements de précaution semblent être indiqués.

L’aménagement des territoires, parce qu’il permet d’agir sur les environnements et le cadre de vie, est un formidable levier d’action pour donner plus d’ampleur à promotion de la santé et à la prévention. Il permet d’avoir un impact direct sur l’exposition des populations à certains facteurs de risque tels que le tabac, l’exposition solaire, la pollution de l’air, le radon… mais également d’agir sur des facteurs protecteurs (activité physique, air de bonne qualité, espaces verts, vaccination, campagne de dépistage…).

Les environnements physique, socio-culturel, économique représentent plus de 60% des déterminants de la santé. Un environnement favorable tel que préconisé dans la Charte d’Ottawa, exerce une influence positive sur l’état de santé des individus en faisant la promotion des comportements promoteurs de santé. Il est ainsi prouvé que le déploiement des environnements favorables à une incidence sur la santé des personnes, notamment pour ce qui concernent les deux principaux facteurs de risque que sont le tabac et l’alcool.

Propos recueillis par Breizh-info.com

Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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5 réponses à “Pr Daniel Nizri (Ligue contre le cancer) : « A l’origine de près de 160 000 décès par an en France, le cancer est la première cause de mortalité chez l’homme et la deuxième chez la femme » [Interview]”

  1. T. Gwilhmod dit :

    C’est complètement faux : la première cause de mortalité et de très loin en France et dans le MONDE (50 millions de morts), c’est les avortements (234000 victimes en 2022, un enfant sur quatre).

  2. Eschyle 49 dit :

    T. Gwilhmod écrit :  » La première cause de mortalité et de très loin en France et dans le MONDE (50 millions de morts), c’est les avortements (234000 victimes en 2022, un enfant sur quatre). » En réalité,
    il faut y ajouter les embryons surnuméraires issus de la fécondation in vitro (FIV), soit réimplantés
    mais avortés, soit non réclamés et détruits au terme du délai de 5 ans; soit un total annuel d’un demi-million de français tombés au champ d’honneur; soit, depuis la loi Weil, 0,5 million X 48 ans, soit 24 millions d’habitants; soit un pays de: 66.415.896 + 24.000.000 = 90.415.896 millions d’habitants.

  3. André dit :

    Les facteurs environnementaux sont importants mais c’est surtout le stress qui accable les habitants dans leurs vies quotidiennes et qui est aussi une des causes de la maladie.
    Insécurité permanente, chômage, lois liberticides, problèmes financiers, avenir anxiogène, et toujours la manipulation médiatique distillant de la peur en permanence pour mieux contrôler la population !
    Drogues et Alcool sont les anxiolytiques des pauvres pour oublier leur triste réalité.

  4. Henri dit :

    La probalibilté de mourir un jour est de 100 %. Cela signifie que, si l’on baisse la mortalité par ca,cer, on augmente fatalement- la mortalité par d’autres causes. D’accord, on va me répondre « Oui, mais le but est mourir le plus tard piossible, hein ! » Ayant vu en direct la longue agonie de ma mère qui a erré durant sept ans dans le désert aride d’Alzheimer, je me montre plus que réservé devant cette perspective. Eh non, tout ça n’est pas si simple.

  5. gaudete dit :

    BLA BLA BLA j’ai accompagné mon épouse, ni alcool ni tabac mais un stress dû au rejet de sa mère en particulier et d’une partie de sa famille. Tant que ces concepteurs ne feront pas l’effort de tenir compte que l’homme n’est pas une machine mais un être avec une âme, un esprit et un corps ils pourront chercher toutes les drogues qu’ils voudront. IL faudrait qu’ils se posent aussi la questions des engrais chimiques qui déstabilisent le sol les plantes et par la suite l’homme, les produits chimiques vendus par l’agro-chimie les mêmes d’ailleurs qui fabriquent les médicaments.Il y aurait tant à dire, si cette fameuse ligue était moins idéologues ils se pencheraient sur les travaux de certains chercheurs tels que le professeur Beljanski et bien d’autres, mais que feraient les pauvres laboratoires et big pharma?

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