Portrait historique. Salomon de Bretagne

Après Anne de Bretagne il y a quelques mois, ou encore Surcouf, ou Cadoudal, ou Nominoe, nous vous proposons de découvrir la vie d’un autre personnage majeur de l’histoire de Bretagne, Salomon.

Salomon, de son nom breton Salaün, naît au début du IXème siècle entre 810 et 820. Son nom, issu de la Bible, renvoie au roi juif Salomon.

Salomon est le fils de Riwallon, comte de Poher. Il serait également le neveu de Nominoë.

Les annales de l’abbaye de Saint Bertin nous indiquent que Salomon aurait reçu rien de moins qu’un tiers de la Bretagne du roi des Francs Charles le Chauve. Il se serait ainsi vu octroyer, sous l’autorité du roi breton Erispoë, cousin de Salomon, un vaste territoire comprenant les comtés de Nantes, de Rennes, ainsi que le pays de Retz. Le comte Salomon devient dès lors un acteur clef du paysage politique breton.

Les relations entre les deux cousins se tendent rapidement à la suite de la montée en prestige du puissant comte. Ce dernier rassemble autour de lui les Bretons mécontents des tentatives de rapprochement avec la Francie occidentale opérées par Erispoë et complote afin de le renverser.

C’est dans l’ignominie que Salomon prend le pouvoir, assassinant son propre cousin sur l’autel de l’église de Talensac, lieu de foi et d’asile, dans les premiers jours de novembre 857.

Cet acte marque la fin tragique de la dynastie de Nominoë, qui n’aura duré qu’une vingtaine d’années seulement. Salomon n’en reste pas moins fervent défenseur de son peuple.

Il montre un front uni face au pouvoir carolingien, désireux de profiter du changement de souverain en Bretagne mais qui renonce finalement à l’envahir et reconnaît Salomon comme nouveau roi breton.

Salomon, contre toute apparence, se montre très habile diplomate. Il n’entre jamais directement en guerre contre la monarchie carolingienne mais s’emploie ardemment à affaiblir son belliqueux voisin en soutenant ses ennemis. Il soutient ainsi Louis le germanique, roi de Francie orientale et frère de Charles le Chauve, Robert le fort lorsqu’il entre en révolte avec d’autres vassaux contre Charles ou encore les Normands.

Profitant de ces nombreux conflits dont devait souffrir le roi franc, Salomon obtient par le traité d’Entrammes en 863, le territoire « entre deux eaux », c’est-à-dire une partie de l’Anjou avec notamment l’abbaye Saint-Aubin d’Angers, contre un faible tribut. Toutefois, les clauses du traité seront rapidement ignorées par Salomon qui ne s’acquittera du paiement du tribut que durant la seule année 864.

Le royaume breton s’agrandit encore en 867 par le traité de Compiègne qui permet à Salomon de mettre la main sur le Cotentin et l’Avranchin.

Au sommet de son pouvoir, Salomon se fait désormais appeler « prince de toute la Bretagne et d’une partie de la Gaule ».

Nominoë et Erispoë s’étaient affichés essentiellement comme des guerriers et avaient brillés par leurs vertus militaires. Salomon s’en distingue en s’affirmant comme doué d’un sens politique aigu sans pour autant être dénué de bravoure.

Il s’inspire du pouvoir carolingien et s’entoure d’une cour importante et érudite composée en grande partie de comtes, d’évêques et d’abbés. Il envoie de nombreux inspecteurs royaux sillonner la Bretagne afin de relever les abus et protéger les plus démunis.

Comme le roi biblique dont il tire son nom, les chroniques d’alors prêtent au nouveau roi breton une habileté toute particulière à rendre la justice de manière inflexible.

Paradoxalement à son acte criminel perpétré à l’encontre de celui qui était alors son cousin et roi, Salomon se montre durant son règne très proche de l’Eglise. Soucieux de se repentir, il protège les églises et monastères et accorde au souverain pontife, le pape Adrien II d’importants présents, tels qu’une statue d’or, une couronne d’or ornée de pierreries… Il replace également à la tête des évêchés bretons les évêques déposés en son temps par Nominoë et s’attelle à libérer l’Eglise bretonne de la tutelle de l’archevêché franc de Tours sans succès cependant.

A partir de 868, inquiet face à l’accroissement des raids vikings, Salomon s’emploie à repousser les Hommes du nord. Quelques années plus tard, en 874, il vient en aide à Charles le Chauve lors du siège d’Angers afin d’en chasser les pirates scandinaves et d’écarter toute tentative d’incursion sur ses terres.

De retour en son royaume, Salomon lassé du pouvoir et probablement saisi de remords à l’encontre du régicide commis pour accéder au trône, décide d’expier ses fautes en se retirant dans un monastère après avoir confié le pouvoir à son fils Wigon.

Une telle retraite aurait été trop facile pour un roi tel que Salomon ayant concentré autant de pouvoirs et ayant fait maints envieux tout au long de son règne. Son gendre Pascweten, le gendre d’Erispoë, Gurwant, et quelques seigneurs francs et bretons fomentèrent un complot contre le roi repentant. Le 24 juin 874, les conjurés forcent l’entrée du monastère et s’emparent de Salomon avant de le livrer aux Francs qui l’achèvent le lendemain après lui avoir crevé les yeux et probablement exécuté son fils Wigon.

Les bienfaits du gouvernement de Salomon ainsi que sa mort tragique, expiatoire de ses crimes, le firent proclamer martyr par l’Eglise et par le peuple breton.

Les Bretons reconnaissant dès lors le roi comme un saint dont la fête est encore célébrée le 25 juin.

Gwenn Mamazeg

Photo d’illustration : DR
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