Direction et base qui ne se parlent plus, présidente qui n’assite plus à certaines réunions, pétitions, courriers et contre-courriers, l’ambiance est irrespirable en ce moment au sein de Conseil Culturel de Bretagne, l’organe consultatif chargé d’orienter le Conseil Régional sur les questions culturelles !
Pourtant, l’arrivée de Rozenn Milin à la présidence en janvier dernier avait donné lieu à un concert de louanges. Mais le moins qu’on puisse dire est que sa pratique du pouvoir laisse quelque peu dubitatif, contrairement à ses prédécesseurs Bernez Rouz, Jean-Bernard Vighetti, Catherine Latour et Paul Molac. Aujourd’hui, la fronde se focalise principalement sur la gouvernance de Rozenn Milin et de son vice-président Hervé Richardot, un spécialiste de l’audiovisuel siégeant au CCB au nom de Breizh Créative/KUB.
Les mécontents, parmi lesquels on retrouve nombre d’associations culturelles bien connues en Bretagne, ont ainsi écrit un premier courrier sous forme de « lettre ouverte », envoyée la semaine dernière aux adhérents et à quelques personnes extérieures. Courrier que nous reproduisons ici in extenso :
À l’attention du bureau du Conseil culturel de Bretagne
Objet : Conseil Culturel de Bretagne, un temps de travail pour sortir de la crise actuelle
À Rennes, le 9 novembre 2023
Cher·e·s collègues,
Les structures et individus signataires de ce courrier sont très attachés à l’existence du Conseil culturel de Bretagne, instance unique en France métropolitaine, riche de sa capacité d’expertise et de proposition sur les questions culturelles, riche aussi pour sa création de dialogues, de réseaux et de rencontres entre les principaux animateurs de la vie culturelle bretonne.
Depuis le début de l’année toutefois, le Conseil culturel de Bretagne peine à avancer. De nombreux dysfonctionnements, incompréhensions, tensions ont émaillé nos dernières réunions, et il apparaît nécessaire de reposer tranquillement notre rôle, nos objectifs et notre fonctionnement, pour la sérénité de toutes et tous, l’efficacité de notre investissement et le bien-être des salariés et des conseillères et conseillers.
Nous souhaitons en effet ardemment que le Conseil culturel redevienne l’espace de dialogue qu’il a toujours été et qu’il fonctionne à nouveau de manière démocratique et collégiale.
Dès lors qu’elle sera dépassée, cette crise devrait nous permettre de consolider le rôle de ce Conseil, voulu par la Région, dont nous souhaitons renforcer le potentiel. Au-delà de sa fonction consultative, il doit devenir une véritable force de proposition au service de la diversité et des droits culturels en Bretagne, au service de tous les secteurs de la culture, des langues, du patrimoine et du tourisme.
Deux problèmes principaux semblent cristalliser les mécontentements et doivent être résolus prioritairement pour sortir par le haut de cette crise :
Une gouvernance dysfonctionnelle et déséquilibrée, trop opaque, descendante et centralisée, autour du tandem présidente/vice-président, marginalisant non seulement les conseiller·e·s et les salarié·e·s, mais aussi la majorité du bureau. Nous estimons urgent de revenir à un fonctionnement plus collégial, respectueux de toutes et tous, où le bureau joue son rôle de préparation et d’animation du travail de l’assemblée.
Des ordres du jour trop confus et tardifs, sources d’impréparation et d’inefficacité, dont l’élément le plus problématique est la multiplication des ateliers thématiques. Mis en oeuvre dans la plus grande confusion au printemps, sans préparation ni validation par l’assemblée, leur inefficacité est de plus en plus criante : beaucoup trop nombreux, ils ne sont pas organisés, et n’ont pas d’objectifs clairs. Les conseillères et conseillers ont le sentiment de sauter d’un sujet à un autre, sans que rien de concret n’en ressorte.
Face à ces problèmes profonds, qui menacent l’avenir même du Conseil culturel, nous demandons que la session du Conseil culturel du 2 décembre, qui sera vraisemblablement consacrée en matinée à un temps de travail sur les « Orientations budgétaires 2024 » de la Région Bretagne, soit en partie consacrée à revoir à la fois la gouvernance du Conseil culturel et le rôle des ateliers en lien avec nos objectifs. Ce travail pouvant être prolongé à l’occasion d’une session ultérieure exceptionnelle.
En matière de gouvernance, sans vouloir préempter les débats nécessaires au sein du Conseil culturel, nous estimons important d’aller dans le sens d’une plus grande collégialité et démocratie, avec un bureau non pas « gouvernant » mais « animateur ».
Une révision de nos statuts et règlement était nécessaire. Mais le projet d’évolution statutaire, trop rapide, s’est réalisé dans la confusion. D’une certaine façon, nous sommes restés au milieu du gué, entretenant plusieurs méthodes qui peuvent apparaître comme difficilement compatibles sur le long terme. Ainsi, le diptyque commission/atelier tel qu’il est ne fonctionne pas. Il faut reprendre le chantier à la lumière de l’expérience d’une année 2023 ratée.
Si les ateliers ont du sens, nous estimons important de leur donner un objectif clair, par exemple la rédaction d’un « livre » blanc (et noir) de la culture, des langues, du tourisme et du matrimoine/patrimoine en Bretagne à l’issue du mandat. Nous devons également, au préalable, nous accorder sur des modalités de fonctionnement et de choix des ateliers et établir un calendrier.
Il convient donc de réfléchir et définir l’architecture et la méthodologie de travail. Mais tout cela doit être débattu et décidé de manière claire par l’assemblée.
Rappelant leur attachement à un Conseil culturel ambitieux et utile, les cosignataires souhaitent que le temps passé par leurs représentants lors des réunions à Rennes ou en ligne soit consacré à des échanges fructueux, constructifs, dans un climat d’écoute et de bienveillance, tant entre les conseillères et conseillers qu’avec les salarié·e·s de la Région mis à la disposition du Conseil Culturel. Mais pour cela, il est urgent d’agir pour recréer du collectif et de l’enthousiasme.
Afin que les travaux du 2 décembre puissent être efficaces, les signataires souhaitent une réponse du bureau aux conseillères et conseillers le plus rapidement possible, pour qu’ils et elles puissent en référer à leurs instances.
Nous nous réjouissons des débats à venir et sommes toutes et tous prêts à prendre nos responsabilités pour sortir par le haut de cette crise.
S’en suit une liste de signataires.
Mis en cause par certains mécontents à mots couverts, Ali Aït Abdelmalek, enseignant à Rennes 2, a répondu aux frondeurs au matin du 17 novembre dans un texte au style quelque peu cabalistique où il soutient la direction :
Bonjour,
Pour quelle raison s’identifie-t-on ainsi, parfois, à des « victimes » d’un fonctionnement institutionnel, faisant fi aussi bien du réel – le fonctionnement « objectif » et non son « ressenti »… – que des principes les plus élémentaires de respect des personnes et des règles ? Pourquoi, si ce n’est là encore pour un effet de distinction ? N’est-il pas moralement répréhensible, quoi qu’on puisse penser de nos travaux et organisation au CCB, et quoi qu’on en dise, de procéder de la sorte et de procéder à des critiques, voire remise en question, de personnes, et, comme on dit parfois, « ad hominem », à argumenter « ad personam » ?
Les éventuelles réponses sont, au moins pour partie, dans les questions… Et gagnons un temps précieux pour tout le monde : l’emphase du texte ne saurait masquer les enjeux idéologiques, voire politiques, les enjeux – i.e. : tant individuels que groupaux (quasi-corporatiste) et qui sont, de fait, très éloignés de l’éthique et de la morale (républicaine et démocratique)… A l’instar de nombreux Conseiller.e.s (y compris, aussi, de Membres du Bureau, évidemment « non signataires de la Lettre »…), je me permets, ici, de récuser, et totalement, la démarche des auteurs, qui ont évoqué une « crise », justement provoquée par eux-mêmes et non par la Présidence et V.P. du CCB… !
Rappelons-nous : « Nemo auditur propriam turpitudinem allegans… », et donc : « Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude… ». Tout est dit, ou presque…
La « Lettre » ne tient en effet aucunement compte, dans son contenu, de l’investissement et de l’implication (en effet bénévoles…) de notre Présidente et de notre Vice-Président, dont le souci permanent n’est pas autre chose que de permettre, au CCB, non seulement de gagner en légitimité et prise en compte par les Elus régionaux, mais aussi que nous puissions mener nos actions – émettre des avis, proposer des suggestions, etc. – dans les meilleures conditions possibles.
Il est absolument hors de question, pour moi et ce jour, de procéder à une quelconque analyse de contenu, à savoir d’un texte à la fois uniquement à charge, truffée de bonnes intentions et de suggestions toutes aussi tautologiques les unes que les autres, injuste et ingrate à l’égard de nos camarades, dont la légitimité et la moralité ne sauraient être mise ainsi en doute, et même d’inexactitudes voire de mensonges … Avec ce « courrier », s’est substituée au plaisir de débattre sereinement et en bonne intelligence, la suspicion (i.e. : l’agression stérile et les conflits contre-productifs !). Oser ainsi solliciter auprès de nous, sous couvert d' »améliorer un fonctionnement », une « signature » (alors que 3 membres du Bureau ont déjà signé – ou participé à l’écriture du texte), et donc une caution pour une telle démarche, et approche non seulement de la vie institutionnelle mais des relations humaines, des liens sociaux respectueux des personnes… est non seulement surprenant mais un pur scandale ! Ce faisant, en effet, voudrait-on imposer une nouvelle « culture (politique) institutionnelle » et instaurer de nouveaux jugements de valeurs, dont le critère opératoire, comme disent les philosophes, ne serait plus la recherche de vérités (certes toujours provisoires et qui peuvent évoluer…), ni même la rigueur intellectuelle… mais… l’apparence et les attaques personnelles ! Il y aurait, ainsi, des personnes authentiquement « engagées » et des personnes qu’on érigerait en « contre-modèle » ?
Il est encore temps, car il faut là comme ailleurs garder l’espoir, de se ressaisir et d’abandonner la rhétorique vengeresse qui devenue, malheureusement, chez certains, la marque de fabrique dans les « champs idéologiques » … Ne pourrait-on pas, dans l’intérêt bien compris de l’institution (C.C.B.) abandonner les considérations binaires, à la fois conceptuellement et historiquement bancales, et dont découlent nécessairement la mise en accusation ?
Alors non seulement, je ne signerais jamais une telle prose mais je souhaite vivement que la raison l’emporte, en se donnant, évidemment collectivement, les moyens de revenir à une réflexion politique, et ce, après avoir entendu une clarification des mobiles, des motifs et des attentes réelles des uns et des autres. La lecture du « courrier » – les échanges, la discussion auraient permis d’entendre, à l’évidence, et tellement plus respectueusement, diverses « revendications », suggestions, etc. en matière de structuration, d’organisation et de fonctionnement – m’incite enfin à terminer par une petite réflexion : les mêmes personnes qui « conspuent le mensonge »… s’en accommodent pourtant, notamment quand il s’agit de satisfaire leurs divers projets, y compris culturels et politiques, ou autre.
Mon soutien, ma reconnaissance et mes sentiments, affectueux et amicaux, à l’égard de Rozenn et d’Hervé, sont entiers bien évidemment. Je salue, ainsi, leurs actions et présidence, leur ouverture et leur prise en compte de toutes les diversités et sensibilités plurielles, y compris linguistiques… Bref, j’ai hâte de découvrir la position et la réaction des Elu.e.s régionaux, face à de telles allégations, encore une fois, totalement inacceptables.
Nous trouverons, ensemble, les moyens d’une issue « par le haut ». Et, à l’évidence, un Audit s’impose au CCB, afin de (re)penser le fonctionnement,…
Dans cette attente, soyez assuré.e.s, cher.e.s Conseiller.e.s, de mon sincère dévouement et de mes salutations respectueuses.
Très cordialement.
Kenavo,
Ali Aït Abdelmalek
Membre du Bureau,
Président de la Commission 4
CCB- Rennes
BZH
Prise de position complétée aussitôt par une « contre-lettre ouverte » envoyée aux membres du CCB le 17 novembre.
Aux membres du Conseil Culturel de Bretagne
Membres du Conseil Culturel de Bretagne, nous venons de prendre connaissance d’un courrier signé par un collectif de membres du Conseil culturel pointant (…) « de nombreux dysfonctionnements, incompréhensions, tensions [lors] de nos dernières réunions ».
Nous sommes étonnés de recevoir ce mail via l’adresse officielle [email protected] alors qu’il n’émane pas de la structure susdite mais d’une partie de ses membres. Curieusement, le mail n’est signé ni par Mari Lubrano, chargée de la vie de l’assemblée, ni par l’iniateur.trice du texte. Nous nous interrogeons donc quant à l’origine de ce courrier.
Nous sommes aussi surpris que certains membres du Conseil Culturel de Bretagne aient été sollicités, alors que d’autres n’ont pas été informés de l’initiative. La méthode est assez troublante et témoigne d’un réel manque de confiance vis-à-vis des membres de l’assemblée.
Le courrier fait état :
« Une gouvernance dysfonctionnelle et déséquilibrée, trop opaque, descendante et centralisée, autour du tandem présidente/vice-président, marginalisant non seulement les conseiller·e·s et les salarié·e·s, mais aussi la majorité du bureau. (…) »
Nous rappelons que le Bureau du Conseil Culturel de Bretagne a été élu démocratiquement en janvier 2023, il y a moins d’un an. Sa Présidente a été élue avec 75% des voix exprimées, montrant la confiance des 70 membres du CCB envers sa personne et son projet exprimé en toute clarté. Rozenn Milin a choisi d’impulser une dynamique nouvelle au sein du Conseil Culturel, en proposant une révision des statuts, en installant une organisation transversale, en poussant les membres de notre assemblée à être force de proposition.
Nous sommes bien conscients que de tels changements ne peuvent, a priori, satisfaire tout le monde. Le courrier reçu affirme que la majorité du Bureau du CCB approuve les contestataires. Pourtant nous ne relevons que trois signataires sur les 10 membres qui composent le Bureau.
Par ailleurs, un malaise des salarié.es du service de la Région affecté au CCB est évoqué. Nous souhaitons que soient clarifiés les points suivants : quelle est la mission exacte des membres de ce service, et de quelle hiérarchie relèvent-ils ?
Le courrier évoque ensuite
« Des ordres du jour trop confus et tardifs, sources d’impréparation et d’inefficacité » (…)
Nous souhaitons connaître les responsabilités respectives. Les retards sont-ils du fait d’un défaut d’organisation du Bureau, d’une surcharge de travail des services, d’un problème de communication entre les acteurs ?
La question des ateliers thématiques semble aussi poser problème :
« Mis en œuvre dans la plus grande confusion au printemps, sans préparation ni validation par l’assemblée, leur inefficacité est de plus en plus criante : beaucoup trop nombreux, ils ne sont pas organisés, et n’ont pas d’objectifs clairs. Les conseillères et conseillers ont le sentiment de sauter d’un sujet à un autre, sans que rien de concret n’en ressorte. »
Il est trop tôt pour évoquer l’inefficacité des ateliers, qui répondent à un vrai besoin d’expression des membres du Conseil Culturel. Parler d’une « année 2023 ratée » est exagéré, à moins de vouloir enterrer toute velléité de travail collectif. L’objectif pourrait être, comme évoqué, la création d’un Livre Blanc de la Culture Bretonne. Le Bureau pourrait utilement rappeler la finalité des ateliers et leur fonctionnement pour dissiper tout malentendu.
Nous sommes tout autant soucieux que les signataires de l’avenir du Conseil Culturel de Bretagne et de la sérénité des débats en son sein.
Nous approuvons donc toute démarche constructive qui améliorera le fonctionnement du Conseil Culturel de Bretagne, qui développera son autonomie, sa créativité, sa notoriété, pour être une force de proposition au service des Bretonnes et des Bretons. Cela implique que soit mené un travail de redéfinition des missions et de l’organisation globale du CCB.
Organe consultatif officiel rattaché au Conseil Régional, le CCB ne peut se payer le luxe d’une crise de gouvernance à l’heure où les enjeux culturels sont si importants. Le président du Conseil Régional, Loïg Chesnais-Girard, est en tout cas appelé par certains acteurs à mettre de l’ordre dans la classe avant que la crise ne prenne trop d’ampleur.
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Une réponse à “Avis de tempête au Conseil Culturel de Bretagne (CCB)”
Vagissements de socio-cul habitués à causer, causer, causer… vexés que Rozenn Milin qui – contrairement aux Vighetti et autres qui ont vécu sur le dos de l’associatif – n’a pas toute sa vie dépendu des subventions publiques, veuille mettre de l’ordre et (re)mettre au travail ces braves gens qui se délectent à causer, causer, causer…