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Sécession. Etats et sociétés parallèles : le Hezbollah au Liban

Une série d’articles vous fera découvrir les états et sociétés parallèles existant à travers le monde. Avec le délitement des sociétés et des institutions occidentales et la guerre ethnique qui s’annonce en Europe et en Amérique du Nord, il est instructif de comprendre comment certaines organisations ont réussi à mettre en place des administrations et des systèmes globaux parallèles au sein même d’états organisés et reconnus. De la simple mise en place de services sociaux pour une population déshéritée et abandonnée au proto-Etat, les situations sont fort différentes et recouvrent des réalités parfois surprenantes. Mais pourraient-elles être appliquées en France, pays sur-administrés s’il en est ? Notre rédacteur en chef, Yann Vallerie, a émis l’hypothèse de la « sécession créatrice » pour les autochtones de l’Hexagone. Rompant à la fois avec les grandes métropoles et avec la République française, créant, par le fait, un « bastion rural » où le Blanc -car il faut l’appeler ainsi désormais- pourra vivre selon ses règles, selon ses lois, selon ses coutumes, selon sa religion et selon sa ou ses langues. C’est dans cette perspective qu’il convient d’étudier ce qui se fait ailleurs. Car nombre de « sécessions » de ce type existent déjà à travers le monde et certaines pourraient correspondre, au moins partiellement, à nos situations.

Je vous propose ici de les découvrir…

« Hezbollahland », la « société de résistance » chiite du Liban

Nous empruntons ce terme « d’Hezbollahland » à Hanin Ghaddar, chercheuse au Washington Institut, think-tank pro-israélien ayant une forte influence sur la politique extérieure américaine.

Le Hezbollah a été fondé en 1982 et représente la communauté chiite du Liban, communauté historiquement pauvre et marginalisée dans un Liban dominé par la classe dirigeante et éduquée chrétienne et son pendant sunnite. Né du choc de l’invasion du Liban par les troupes de Tsahal voulant venir à bout du problème palestinien, le Hezbollah répond avant tout à un délitement et à une faiblesse systémique de l’Etat Libanais. Car en ce début d’années 80, l’Etat Libanais est bafoué, à la fois par les fedayins palestiniens qui ont eux-mêmes formaient un état parallèle au sein du Liban à la suite de leur expulsion de la Jordanie en septembre 70 (Septembre Noir) et par les différents groupes politico-religieux autochtones (Druzes, Phalangistes, …).

Implantée principalement dans le Sud-Liban, dans la plaine de la Bekaa à l’est et dans la banlieue sud de Beyrouth, la communauté chiite n’aura pas d’autre choix, avec la guerre civile libanaise qui éclate en 1975, que de se tourner vers ses nombreuses organisations politico-religieuses d’où émergera progressivement le Hezbollah.

Le Hezbollah agira, dès le départ, sur deux fronts : le front militaire, à travers sa branche armée, la « Résistance Islamique » (et ses multiples branches et sous-branches), et à travers son organisation sociale et politique. Car ce qui a fait le succès du Hezbollah réside avant tout dans son maillage social, politique mais aussi culturel. Cet ensemble a un nom : mujtam‘a al-muqâwama, ou « société de résistance ».

L’organisation globale du « Parti de Dieu » s’inspire largement du « monde rouge » des différents partis communistes ayant, jadis, réussi à construire de vastes contre-sociétés du monde occidental au monde arabe (le leader du Hezbollah étant même un « secrétaire général »). Largement financé par l’Iran (et dans une moindre mesure par la Syrie), le Hezbollah propose ainsi des services publics et sociaux efficients là où l’Etat libanais est rongé par la corruption et le clientélisme dûs à son organisation propre (le Liban reconnaît 18 communautés religieuses et chaque responsable politique ou administratif agit, avant tout, pour sa communauté). Les chiites vont ainsi se faire soigner dans les centres médicaux ou les hôpitaux du Hezbollah, achètent leurs médicaments dans les pharmacies du Hezbollah et envoient leurs enfants sourds et muets dans les centres spécialisés du Hezbollah. Pas besoin d’enseignes spécifiques, ces établissements affichent la couleur sous la forme de portraits de l’Ayatollah Khomeiny et du « secrétaire général » Hassan Nasrallah. L’emprise médicale du Parti est tellement implantée dans le pays chiite que le sud de Beyrouth (le tiers de la population beyrouthine tout de même) ne compte tout simplement aucun hôpital public de l’Etat Libanais ! Ce système médical global, dont le centre névralgique est l’hôpital du Liban-sud, s’appelle la « Société islamique de santé » (al-Hay’a al-sihhiyya al-islâmiyya).

Le système scolaire des chiites est également géré par le Hezbollah avec des écoles primaires, des collèges et des établissements d’enseignements supérieurs, là aussi fortement liés au système iranien. Et là encore, le Hezbollah pallie aux manques de l’Etat Libanais où 60% des écoles sont privées et payantes.

Ecoles fortement idéologisées, les écoles du Hezbollah célèbrent les « valeurs islamiques », le « culte des martyrs de la lutte contre Israël » et forme, au passage, le futur clergé chiite. C’est notamment à partir de ses écoles que le Hezbollah est dispensateur de « normes ». Normes sociales, normes idéologiques, normes scolaires, normes sociétales. Inutile de dire que les dérives occidentales LGBT sont inimaginables dans les écoles Hezbollah. Lors d’une émission de France Inter consacrée au « Parti de Dieu », une intervenante expliquait notamment comment, dans les années 90, les élèves étaient amenés devant des écrans pour regarder des vidéos de propagande du régime iranien… entièrement en persan ! Pour des élèves uniquement arabophone, l’exercice pouvait parfois paraître bien long…

En dehors de l’école, la jeunesse est également encadrée dans les organisations de scoutisme chiite contrôlées par le Parti, sans parler des clubs de foot (au Liban, les clubs sont communautaires), des écoles de musique et autres associations diverses.

Mais l’emprise sociale du parti chiite va encore plus loin : ainsi lors des différents conflits avec Israël, les maisons détruites de membres de la communauté chiite sont reconstruites par le Hezbollah qui fournira également, à travers son réseau d’ingénieurs formés en Iran ou en Syrie, l’électricité, l’eau et assurera le ramassage des ordures. D’ailleurs, l’Ordre des ingénieurs et architectes du Liban est largement dominé par le Hezbollah !

En matière de médias, là aussi, le Hezbollah « dispense sa norme » avec sa tête de gondole qui est la célèbre chaîne Al Manâr. Citons également le quotidien Al-Akhbar, l’hebdomadaire Al-Intiqâd, le mensuel Baqiyatu Allâh, la radio Al-Nûr et les multiples médias internet liés au Parti. Une maison d’édition diffuse la pensée politique et religieuse de l’allié des Mollahs et il existe même des jeux vidéos Hezbollah, des expositions, des foires…

Bien entendu, chaque secteur économique a son syndicat Hezbollah, sa revue Hezbollah, etc…

En bref, dans un pays où l’Etat est systémiquement faible, le parti chiite a réussi à créer une contre-société, une « société de la résistance » parfaitement organisée et quasiment indestructible. D’une part parce que tant que les Mollahs seront au pouvoir en Iran et Bachar El-Hassad à la tête de la Syrie, le Hezbollah sera financé (même s’il a ses propres sources d’argent), d’autre part, parce que le Hezbollah compte une force militaire à côté de laquelle l’armée libanaise fait figure de groupuscule para-militaire. Soulignons par exemple que, selon la CIA, le Hezbollah compte le plus de matériaux militaires légers, type lance-roquettes, au monde !

Cela n’empêche pas de fortes disparités au sein de la « Société de la Résistance ». Un seul exemple, il existe des écoles privées du Hezbollah où sont envoyés les enfants des cadres, la piétaille n’y ayant pas accès et se contentant de ses propres écoles. Les zones à majorité chiites ne sont également pas traitées de la même manière, l’argent du Parti étant investi prioritairement dans les zones ayant fourni le plus de « martyrs » dans ses multiples confrontations avec Israël ou jadis avec d’autres formations politiques (dont les rivaux chiites de Amal).

De surcroît, il est important de préciser que le Hezbollah n’entre pas dans une logique séparatiste de ses zones d’influences et est avant tout patriote libanais, avec son propre agenda qui n’est pas obligatoirement celui du régime iranien. Concernant son implantation en France, nos confrères du Point, avaient mis en ligne en 2021 un très intéressant article où l’on apprenait notamment que le Parti de Dieu stockait dans l’Hexagone du… nitrate d’ammonium, composé rentrant dans la composition d’explosifs !

Crédit photo : Wikipedia Commons

[cc] Breizh-info.com, 2023, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

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4 réponses à “Sécession. Etats et sociétés parallèles : le Hezbollah au Liban”

  1. Alan al Louarn dit :

    Le Liban historique est composé de montagnards chrétiens et druzes. La gloutonnerie française y a rajouté une partie syrienne chiite, et a appuyé les mercantis sunnites qui ont mis si longtemps le pays au pillage.
    Or, la France n’a aucune crainte à avoir envers les chiites, et en revanche, a tout à craindre des sunnites du nors de l’Afrique. Il convient donc de favoriser un axe chiite de l’Iran à la Syrie, coupant ainsi le monde sunnite qui est en train de nous envahir puis de nous remplacer.

  2. Jairaison dit :

    « Par ailleurs, dans la mouvance droitiste ou proche de Soral/Dieudonné, certains affichent avec fierté leur liens et intérêts avec les islamistes chiites libanais, le tout dans un gloubiboulga “antisioniste”  »

    Le coup de pied de l’âne. On se croirait sur Riposte Laïque.

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