Grands tours et classiques, duels d’anthologie, lieux cultes : Jean-Noël Blanc raconte avec gourmandise la grande et la petite histoire du cyclisme et de ses champions, dans un nouvel ouvrage paru chez Glénat intitulé Une histoire des courses cyclistes
En 50 micro-chapitres illustrés par de nombreux documents d’archives et des photos contemporaines, cet ouvrage brosse par petites touches un panorama du cyclisme, avec ses « forçats de la route », grimpeurs, rouleurs, sprinteurs ou simples équipiers, ses heures de gloire et ses drames, ses beaux gestes et ses tricheries, ses évolutions techniques et ses décors de théâtre. Tour de France, Bordeaux-Paris, Paris-Brest-Paris, Six Jours de Paris, Milan-San Remo, Tour des Flandres, Flèche wallonne, Paris-Roubaix, Tour de Lombardie, Paris-Nice, Critérium du Dauphiné, Giro : il fait revivre toutes les grandes courses, qu’elles appartiennent au passé ou qu’elles soient toujours à l’affiche. Une histoire non encyclopédique mais subjective, écrite dans une langue savoureuse par un amoureux du vélo et de l’écriture.
Pour en discuter nous avons interrogé l’auteur Jean-Noël Blanc
Breizh-info.com : Pouvez vous vous présenter à nos lecteurs ? Qu’est-ce qui vous a amené à la passion du cyclisme ?
Jean-Noël Blanc : Disons que j’ai publié une cinquantaine d’ouvrages (déjà), surtout des romans et des recueils de nouvelles. Chez Ramsay, Seghers, au Seuil, chez Joëlle Losfeld et chez de « petits » éditeurs (dont La Légende des cycles au Castor Astral). Il se trouve que certains de ces textes parlent de sport parce que cette activité propose des situations fortes pour les personnages romanesques. Cela m’a valu, un prix Louis Nucéra (nous étions complices au sujet du vélo) et le Grand prix de littérature sportive pour Le Nez à la fenêtre (un roman articulé autour d’une étape du Tour).
Dernier point : je peux parler de sport presque « de l’intérieur » (quoique de très loin par rapport aux champions), puisqu’après avoir été longtemps un footeux je suis devenu cycliste solitaire, avec une propension pour les cols (eh oui, chacun ses défauts).
Breizh-info.com : Je m’attendais en lisant votre livre à retrouver une présentation des principales courses cyclistes, par entrées. Ce n’est pas le cas, pour quelles raisons avez vous décidé d’agencer ainsi votre livre ?
Jean-Noël Blanc : Il y a eu déjà beaucoup de littérature sur ce thème et la question était donc de ne pas reproduire le énième ouvrage méthodique. Et comme le principe de la collection chez Glénat est « une page – une image » j’en ai profité pour tourner autour du fil de la chronologie (elle est bien là, c’est bien une histoire), en jouant sur quelques anecdotes plus ou moins savoureuses – et en donnant sa place à une question souvent négligée : l’évolution du matériel. Je crois qu’avec la belle iconographie trouvée par Glénat on obtient ainsi « une » histoire des courses, à la fois marquée par un ton personnel et respectueuse des faits dont beaucoup sont déjà connus.
Breizh-info.com : Vous vous intéressez beaucoup aux principaux changements, aux principales évolutions dans le monde du vélo. Quand se situe la révolution totale et le quasi changement de sport ?
Jean-Noël Blanc : Je ne crois pas qu’il y en ait une. Je crois plutôt à une évolution par bonds successifs, provoqués par un grand nombre de causes diverses : la presse écrite, la radio, la télévision (et ses propres évolutions techniques) ; l’imposition des chambres à air, les progrès sur le poids des machines, les travaux sur l’aérodynamique, le passage à l’électronique ; l’évolution du dopage (des amphétamines aux manipulations géniques) ; l’irruption de l’économie d’entreprise (Tapie bien sûr, mais on a fait mieux – ou pire – depuis) ; etc. Et il va y avoir d’autres évolutions sans doute (je parle de l’arrivée du e-coureur, et je ne sais pas ce qui nous attend encore).
Breizh-info.com : Quels sont les souvenirs que vous gardez, à titre personnel , des courses de votre enfance ou jeunesse ?
Jean-Noël Blanc : Le Tour de France, bien sûr, à l’époque de Louison Bobet (par exemple) : j’étais encore enfant mais je rêvais. Adolescent, j’ai vu au vélodrome de Saint-Etienne une soirée où Fausto Coppi était opposé à Roger Rivière (le vieux contre le jeunot) : cela vous marque. Et puis la période Merckx. Et surtout Hinault, dont la hargne et le goût de l’audace me séduisaient. La suite a été moins drôle – jusqu’au Tour 2022 où tout d’un coup on a retrouvé du panache.
Breizh-info.com : Depuis quelques années, avec l’émergence de la génération Dorée (Van der Poel, Evenepoel, Pogacar, Van Aert…) les classiques redeviennent en vogue en France, particulièrement suivies (elles l’ont toujours été en Flandre certes). Les Grands tours doivent ils se renouveler eux aussi pour parvenir à capter l’attention trois semaines ?
Jean-Noël Blanc : Sans doute. Mais les classiques ont encore beaucoup à faire pour parvenir à la hauteur populaire du Tour de France, qui a pour lui la télévision, l’argent et les mythes. Que les classiques en profitent, tant mieux, mais le risque est qu’elles soient obligées d’obéir aux canons télévisuels pour atteindre une belle audience (comme Paris-Roubaix, avec à mon goût un côté un peu trop fabriqué pour le spectacle).
Breizh-info.com : Quel regard portez vous sur ce Tour de France 2023 que nous lisons actuellement ?
Jean-Noël Blanc : Attendons, attendons. Le duel attendu est au rendez-vous, et c’est vrai qu’on n’avait pas vu cela depuis longtemps. Mais on commence à entendre une petite musique : ces deux-là sont tellement au-dessus du lot, et la vitesse est tellement élevée, qu’on va finir par se demander si… Toujours hélas ce doute sur les performances. Mais tant qu’on ne sait rien, profitons du spectacle.
Propos recueillis par YV
Crédit photo : A.S.O./Pauline Ballet
[cc] Breizh-info.com, 2023, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine