Ah bah ça s’indigne à bloc en ce moment pour l’affaire de Carnac ! A pleins tubes ! Croa Croa ! Visiblement le maire reçoit des menaces de mort par tonneaux. Contre lui, sa femme, ses gosses même ! Qu’il a même fallu organiser une tournée spéciale du facteur !
Bande de c… !
J’ai horreur des lynchages médiatico-réseaux sociaux et cet homme est en train d’en subir un, donc courage à lui et honte aux acharnés de la souris. Car avez-vous pensé que tout ce gâchis archéologique n’est peut-être juste que le résultat d’une méconnaissance, d’un quiproquo, d’un manque de compétences ou d’une bête faute, tout simplement. Je lis ici et là qu’Olivier Pick, le maire donc, « a sûrement dû recevoir une enveloppe » de Mister Bricolo. Mais oui bien sûr ! Quelle couleur l’enveloppe ? Attendons le résultat de l’enquête pour nous rouler par terre d’indignation. Entre la DRAC, le maire, Mister Bricolo, le notaire, le Conseil municipal et la société en charge des travaux, il y a peut-être surtout beaucoup d’ignorance et de vérifications faites à la va-vite?
Car aujourd’hui, c’est le temps de l’écologie pas du patrimoine. La moindre mare au canard abritant un coléoptère à dos argenté peut faire dévier une autoroute, alors qu’une ferme en pierre remarquable sera rasée sans déclencher la moindre protestation. Le patrimoine humain, on s’en fout, les crapauds et le « climat » prennent toute la place !
Mais les acharnés des menhirs me font surtout bien marrer avec leur indignation en promo : et vos maisons carrées de merde qui salissent la campagne bretonne ? Toutes ces bouses à toit plat… « maisons d’architecte » qu’on appelle ça… pauvres conteneurs à palmiers échoués des cargos de la mondialisation… Pour un Mister Bricolo à Carnac, combien de lotissements à cubes ronds dans toute la Bretagne ?
Et les zones commerciales qui ont poussé à l’entrée de nos villes ? Qui est allé manifester à Cap Nord à Redon ? A Espace 23 à Ancenis ? A Porte Océane à Auray ? Bretagne moche ! Des centaines d’enseignes de 15m de haut qui clignotent nuit et jour. La Pataterie et Conforama. Que tout cela s’effondre pour que les campagnes retrouvent enfin le goût du sauvage et des vaches bouseuses. Tout ce qui se rapproche de moins de 50 bornes d’une ville est devenu laid, criard et pue les poubelles de chez Chantegrill.
A l’entrée de nos villes, nous avions jadis de superbes bâtisses en pierre ou en terre que le monde nous enviait. Anciennes auberges…Maisons d’octroi…. Aujourd’hui on a Jardiland !
NOUS avons laissé saccager la Bretagne pour des milliers de monsieur Bricolage. Carnac n’est qu’un micro-exemple. Un paléo-exemple éventuellement. Notre identité architecturale n’existe plus. Des maires se damneraient pour voir un lotissement des Ajoncs ou une zone commerciale avec 12 ronds-points et un Speedy dans le milieu se construire en périphérie de leur commune ! Emploi, développement économique. A n’importe quel prix. Surtout celui du moche ! Nous devons encourager l’activité économique et le commerce. Mais nous pourrions avoir quelques exigences de bon goût. Garder une certaine identité architecturale et urbaine !
D’ailleurs, les acharnés du permis de construire, allez voir dans votre mairie ceux qui ont été déposés et qui attendent actuellement le coup de tampon. Combien seront des permis de construire de maisons carrées ? Des « pop up houses » à énergie positive avec 50 panneaux solaires et des baies vitrées partout mais qui n’ont rien à voir avec la maison bretonne traditionnelle. Sûr que dans le lot, il y a celle de votre fils ou de votre cousin écolo. Et qui sera trop fier de présenter sa bouse à palmiers à toute la famille ! Du moment que c’est bon pour le climat, on s’en fout du patrimoine et de l’identité !
Le pire de tout est que la moitié des lecteurs qui lit actuellement cet article sont affalés sur leur smartphone dans une file d’attente d’un Monsieur BricoMerlin de Quimper ou de Fougères. Avec la voiture garée sur un parking goudronné grand comme un stade de foot.
Et s’il y avait des menhirs, camarade… là… juste sous tes pieds ?
Anne-Sophie Hamon
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3 réponses à “Menhirs de Carnac : l’indignation en promo ! NOUS avons laissé saccager la Bretagne pour des milliers de Mr Bricolage. [L’Agora]”
Nous ne sommes pas tous des Cons
Le rapport de la DRAC énonce :
« Il n’a pas été possible de définir la nature de ces découvertes […] des blocs avaient été déplacés […] il ne s’agit donc pas d’une file de menhirs en place historiquement. […] L’autre ensemble était plus complexe d’interprétation. Les blocs de 0,5 à 1 m de haut étaient implantés plus profondément dans la terre. Quatre d’entre eux présentaient des marques d’usure en position dressés depuis très longtemps.»
Il est donc clair que certains blocs en place «depuis très longtemps» témoignent d’un VESTIGE ARCHÉOLOGIQUE intact depuis des siècle (7000 ans ! ).
Il suffit donc de se réfugier derrière la notion de « valeur archéologique non établie » et de l’aval d’un architecte des bâtiments de France (qui n’est pas archéologue par définition), pour qu’un permis de construire soit accordé sur un site qui devrait rester intouchable même s’il y a «complexité d’interprétation».
C’est là que réside le scandale : reconnaître qu’il y a, en dépit de la « complexité d’interprétation», un vestige archéologique de par l’ancienneté et la disposition de certains menhirs et accorder néanmoins un permis de construire.
Cela s’appelle « se foutre du monde »
On traite donc par dessous la jambe une trace de l’Histoire moins importante qu’un édifice commercial fait de tôles et de plaques de béton alors qu’on refuse à un particulier un permis de construire à cause d’une fenêtre trop haute ou de volets en faux bois.
Quant aux menaces physiques à l’égard du maire et de sa famille, c’est absolument inadmissible et condamnable même si la colère de beaucoup de personnes soucieuses du patrimoine est légitime.
L’auteur de l’article a la fâcheuse tendance à mettre dans le même sac toutes les voix qui s’élèvent contre ce projet. Non, les gens indignés ne sont pas tous affalés dans un fauteuil, devant un écran, la souris à la main pour dénoncer ce qui s’apparente fortement à une « arnaque intellectuelle» destinée à minimiser, voire à réduire à néant, la valeur d’un patrimoine.
Les «acharnés des menhirs» peuvent vous «faire marrer» et si nombre d’entre eux habitent dans des « maisons carrées de merde qui salissent la campagne bretonne » c’est qu’ils n’ont pas les moyens de vivre ailleurs et qu’ils préfèrent habiter là plutôt que dans une grotte néolithique même à valeur patrimoniale. Ce ne sont pas eux, en particulier, qui édictent les règles architecturales en Bretagne ou ailleurs, ce qui n’enlève rien à leurs soucis de protection du patrimoine historique.
Non, ces gens indignés, ne sont pas tous des cons, camarade !
« Le pire de tout est que la moitié des lecteurs qui vous lisent sont affalés etc, etc « . Dites-le nous vraiment, pour moitié….pour vous, vos lecteurs sont des abrutis. Ben ouais, mais quand on écrit des articles comme les vôtres….il ne vous faut pas non plus espérer non plus avoir des lecteurs et lectrices qui ne vous ressemble pas et qui soient (quelque peu ?) rustique.
Pour la première fois, je prends ma plume de souris pour réagir à votre propos, madame Hamon. J’aime votre verve colérique, vos indignations fortes et non feintes, votre verbe fleuri. Je partage votre tristesse au regard de nos paysages villageois saccagés. Vivant dans une petite commune du littoral morbihanais, dans la rade de Lorient, je déplore ces nouveaux quartiers faits de cubes appelés maisons, plus encore je pleure quand je vois ces maisons de pêcheurs traditionnelles augmentées de terrasses, extensions cubiques qui les enlaidissent. Autrefois des familles souvent nombreuses y vivaient, il ne semblait pas incongru à des parents aimants d’offrir une chambre commune aux enfants… Un individualisme froid et connecté est arrivé. Peu d’enfants, mais chacun sa chambre ! Je partage votre colère.
Et pour finir sur une note poétique, il y a quelques années, je faisais découvrir les sites de Carnac à une nièce irlandaise qui était subjuguée. A sa question « Pourquoi ces alignements de pierres levées ? », je lui avais répondu qu’il n’y avait à ce’est our faire jour aucune réponse formelle, que des hypothèses. Mon petit dernier, Laouen, 4 ans à l’époque, avait dit « Moi je sais ! ». Nous l’avions regardé, incrédules. « C’est pour faire joli ! » Et si nos ancêtres avaient juste voulu faire joli ? C’est réussi !