Quand on ne peut pas devenir député, il reste le Sénat. Encore faut-il se trouver en position éligible sur la liste. C’est vrai à droite et à gauche. En Loire-Atlantique, Johanna Rolland est contrainte de tenir compte du rapport de force actuel (socialiste-écolo) et des prochaines élections municipales. Pour Pascal Bolo, c’est rapé.
Les notables se mobiliseront le dimanche 24 septembre pour les élections sénatoriales. En Bretagne, deux départements sont concernés : Loire-Atlantique et Morbihan. Le premier compte cinq sortants : Yannick Vaugrenard (PS), Michelle Meunier (PS), Ronan Dantec (écolo), Laurence Garnier (LR) et Joël Guerriau (indépendant). Le second compte trois sortants : Muriel Jourda (LR), Jacques Le Nay (Union centriste) et Joël Labbé (écolo).
Pour l’instant, c’est la Loire-Atlantique qui semble la plus « dynamique », grâce à Pascal Bolo (PS), un « vieux de la vieille » qui est à la fois adjoint au maire de Nantes – sécurité, tranquillité publique (sic) et finances – et conseiller départemental ; il a été pendant longtemps le suppléant de François de Rugy au Palais-Bourbon. Il se serait bien vu terminer en beauté sa carrière au Palais du Luxembourg. Encore faut-il se trouver en position éligible sur la liste de gauche… Mais l’affaire se présentait mal. « J’ai retiré ma candidature. Les dés étaient pipés », assure-t-il. « J’étais en quatrième position sur la liste proposée au conseil fédéral du PS. J’aurais été sorti de la liste finale, une fois les partenaires de gauche intégrés », poursuit-il (Presse Océan, vendredi 14 avril 2023). Effectivement, on parle beaucoup de Ronan Dantec et de l’élue nantaise Mahel Coppey (EELV) pour figurer sur la liste socialiste.
Mais la situation s’aggrave lorsque Bolo découvre que Johanna Rolland lui a préféré Karine Daniel pour figurer en position éligible sur la liste PS. Cela et le reste mettent l’adjoint en colère : « C’est irrespectueux de mon parcours. Un deal a été passé avec l’écologiste Ronan Dantec pour constituer la liste finale », souligne-t-il (Presse Océan, samedi 15 avril 2023). Pascal Bolo a d’autant plus de raisons d’être vexé que Karine Daniel n’est pas une « vedette » de la politique. Suppléante de Jean-Marc Ayrault, elle avait hérité de la circonscription (Nantes-Saint-Herblain) de l’ancien maire lorsque ce dernier était devenu ministre des Affaires étrangères de François Hollande. Un fief socialiste puisque Ayrault y avait été élu député pendant trente ans. Malheureusement pour elle, en 2017, Karine Daniel est liquidée dès le premier tour, la sortante doit se contenter d’un modeste 13,75 %. Comme Johanna Rolland est une bonne copine, elle avait donné à Karine Daniel un lot de consolation : présidente du fonds de dotation de l’Arbre aux hérons – ce qui permet de manger. Mais cette opération étant tombée à l’eau, il fallait donc trouver autre chose pour l’ancienne députée. D’où l’idée d’en faire une sénateur…
Johanna Rolland oublie ses « vieux » camarades
Dans une intervention, Pascal Bolo vide son sac : « Les dés étaient pipés. Le seul poste masculin éligible est réservé à Ronan Dantec (écologiste). Je n’avais donc aucune chance, pas plus que quiconque étant né de sexe masculin et n’envisageant pas de le renier. A quoi va servir un troisième mandat du sénateur Ronan Dantec. A garantir le rassemblement de la gauche aux prochaines municipales à Nantes ? Douteux ! A assurer la victoire finale de la gauche rassemblée, y compris pourquoi pas avec nos amis locaux de la Nupes ? Non bien sûr. A part assurer à Ronan un niveau de vie convenable et une retraite heureuse cela ne va servir à rien. En tout cas pas pour contribuer à replacer le Parti socialiste au centre de la gauche. » Bien entendu, Bolo est désormais fâché avec Johanna Rolland : « On peut demander des sacrifices aux bons soldats, les humilier n’est pas une bonne idée. Or, c’est ce que je ressens » (Presse Océan, lundi 17 avril 2023). Conséquence : « Ce n’est pas le grand soleil. Je vais lever le pied à la mairie », annonce-t-il (Presse Océan, samedi 15 avril 2023)
Dès le départ, Bolo aurait dû comprendre que le conseil fédéral du PS de Loire-Atlantique étant composé majoritairement de partisans de Johanna Rolland, sa candidature ne pouvait pas être favorisée. Le statut d’électron libre ne paie pas toujours. Surtout lorsqu’on manque de prudence : « J’ai fait campagne pour Hamon, mais au dernier moment, j’ai voté pour Macron » (Ouest-France, Loire-Atlantique, lundi 24 avril 2017). Autre exemple qui devait enchanter ses « copains » du PS – en particulier l’entourage de Mme Rolland : « Je n’ai pas de problèmes avec la diversité des convictions, ni avec les Insoumis, même si j’ai des désaccords importants. Ce qui me met en colère, c’est que les dirigeants de mon parti se soumettent à LFI ». La Nupes, estime-t-il « n’est qu’un accord électoral, qui ne survivra pas au-delà de quinze jours après les élections » (Presse Océan, vendredi 10 juin 2022)
Rappelons aussi que Ronan Dantec a toujours été partisan de la réunification de la Bretagne, ce qui n’est pas le cas de Pascal Bolo. Lors du vote pour la réunification de la Bretagne au conseil départemental de Loire-Atlantique (lundi 17 décembre 2018), ce dernier avait voté contre…
Bernard Morvan
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Une réponse à “Nantes : Pascal Bolo (PS) n’aura pas son bâton de maréchal”
Bolo est un vieux politicien professionnel, malin mais usé par trop de combines et de compromissions. Son éviction serait sans doute un geste salutaire de la part de Johanna Rolland et du parti socialiste si elle n’était destinée à faire de la place pour Karine Daniel ! Karine Daniel a été une catastrophe pour son parti : devenue députée en tant que suppléante, elle s’est empressée de perdre le siège à première élection. Comme vous le dites, la direction (et non la présidence, assurée par un grand patron nantais) du Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons a probablement servi à lui assurer un revenu. Or, à ce poste, elle s’est montrée d’une inefficacité à peine croyable. Sa mission était de rassembler auprès de mécènes, déjà identifiés pour la plupart, 12,5 millions d’euros déductibles fiscalement à hauteur de 60%, donc en réalité de l’ordre de 7 millions d’euros net) au profit d’un projet porté par la municipalité nantaise et encensé de toutes parts. En principe, cela aurait dû être du billard… et elle n’y est pas parvenue. Le Sénat l’attend les bras ouverts !