Si l’on en croit la quasi-totalité de la presse mainstream, les manifestations qui ont précédé ou suivi les débats de l’Assemblée nationale à propos du projet de loi gouvernemental sur la réforme des retraites, le recours à la procédure prévue par l’article 49.3 de la Constitution, dit d’« engagement de responsabilité », qui permet au gouvernement, au cours des débats sur un texte qu’il présente, d’engager sa responsabilité, et le rejet des deux motions de censure présentées respectivement par le groupe LIOT et le Rassemblement national, seraient « spontanées »
Est-ce la réalité de ces manifestations ou une désinformation de la part de ces médias ?
Que veut dire « spontané » ?
La définition la plus courante de l’adjectif spontané est « Qui se produit de soi-même, sans avoir été provoqué ».
Une autre dit que l’adjectif spontané « qualifie tout d’abord une chose qui semble arriver d’elle-même, sans cause apparente ».
Le dictionnaire Larousse ajoute que cela se dit « d’un comportement qui n’est pas réfléchi, qui est fait sans calcul ».
Ces manifestations, qui ont eu lieu en dehors des appels à la grève des syndicats et des cortèges qui les suivent alors comme ce jeudi 23 mars, correspondent-elles à ces définitions ?
Des manifestations sauvages
Les manifestations organisées par les syndicats ou par des partis politiques représentés au Parlement sont annoncées et suivent les règles légales, c’est à dire sont déclarées, tout en s’efforçant dans une certaine limite d’éviter les débordements et les actions violentes grâce à leur propre service d’ordre.
Au contraire celles dites » spontanées » par de nombreux médias sont des manifestations sauvages. En effet, si une manifestation n’a pas besoin d’être autorisée pour être légale, sa déclaration est obligatoire. Pour la loi française, non déclarée, elle devient de fait illégale, ce qui est le cas de ces rassemblements.
La référence juridique est l’article 431-3 du Code pénal, qui renvoie à la participation délictueuse à un attroupement.
Sont-elles spontanées ?
Peut-on sérieusement dire « qu’elles semblent arriver d’elles-mêmes, sans cause apparente » ? Non, elles ont une cause tout à fait affirmée et répétée : s’opposer à cette réforme du régime des retraites et, plus encore, à ce gouvernement et au Président Macron.
Les participants ont-ils « un comportement qui n’est pas réfléchi, qui est fait sans calcul » ? Non, tous leurs interviews confirment qu’ils sont là pour ces raisons politiques à minima.
En effet, aujourd’hui, ces rassemblements sont activés par des messages sur les réseaux sociaux.
Il existe de nombreux sites gérés par des militants de gauche radicale, sans appartenance officielle à des partis ou des mouvements déclarés qui incitent à agir dans la rue comme d’ailleurs le préconise Jean Luc Mélenchon, selon les méthodes traditionnelles des mouvements trotskistes, et certains militants syndicaux.
À titre d’exemple, à Nantes, il existe un site « contre attaque », qui a remplacé « Nantes révoltée » et qui incite à ce type d’action. Ainsi, le 6 mars 2023, dans un article intitulé : « Et maintenant ? Trois scénarios possibles », après un premier scénario intitulé « retrait de la réforme », il est écrit dans un second intitulé « soulèvement » :
« Le scénario le plus optimiste, mais pas le plus probable. Comme on s’y attendait, Macron ne lâche rien, le mouvement s’étend, déborde largement la question des retraites et prends une forme inspirée des Gilets jaunes : les lieux de pouvoir sont visés, des segments plus larges de la population rejoignent le mouvement, les affrontements se généralisent. La facs sont durablement bloquées, comme en 2006, quand elles avaient été occupées pendant presque 3 mois par les étudiant-es. La contestation ne veut plus se limiter aux retraites, la situation devient hors de contrôle, sur le modèle du soulèvement chilien de 2019 qui a conduit à un changement de régime grâce à la conjugaison de grèves historiques et d’émeutes. Tout est alors possible ».
Après avoir envisagé le scénario « défaite », l’article se concluait ainsi : « Il faudra au contraire imaginer une agitation durable, durant le printemps et au-delà, pour ne pas rester bloquer sur la seule bataille des retraites et frapper plus fort. ».
Voilà comment se préparent ces manifestations que ces journalistes baptisent du qualificatif « spontanées ».
JF Lebreton
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3 réponses à “Opposition à la réforme des retraites. Les manifestations récentes sont-elles vraiment spontanées ? [L’Agora]”
Le mot « spontané » n’est pas nouveau. Il a été abondamment utilisé au 19e siècle dans l’expression « génération spontanée », l’illusion, nourrie par certains « savants », d’une vie née ex nihilo. On retrouve le même genre d’illusion aujourd’hui dans l’expression « manifestation spontanée ».
Le mot « spontané » tel qu’utilisé ces derniers temps est révélateur d’un vieux fantasme soudain réactivé : il désigne le premier stade d’une ‘ »insurrection » ou d’un « soulèvement populaire ». Les maoïstes de mai 1968 étaient souvent appelés « mao spontex », car ils croyaient à la révolution spontanée. Je crois que le mot est un marqueur : le journaliste qui l’utilise peut être soupçonné d’être en réalité un militant.
la prise de la BASTILLE était elle une révolte spontanée ?….et le 5/6 octobre 1789….et le 10 aout, ou l’on détourna versParis les « marseillais » et leur marseillaise , massacra les suisses de la garde, la spontanéité n’exixte pas en politique , et si notre histoire n’était pas falsifiée elle serait ainsi enseignée
Vu qu’aucune solution est apportée par le gouvernement au sujet de toutes les préoccupations des Français, soyons cyniques et, dans le doute, attendons les résultats de ces actions, et comme disait l’Abbé Amaury en 1209 avant le sac de Béziers « …Dieu reconnaîtra les siens »