La question de la réforme des retraites agite le monde politique et syndical. Focus sur quelques personnalités bretonnes qui ont un avis sur la question…
Sophie Errante – Pour justifier la réforme des retraites, Sophie Errante (Renaissance, ex PS), député de Vertou (le vignoble), développe une analyse que ses électeurs apprécieront : « C’est un sujet difficile à porter, mais il faut le faire pour sauver notre système par répartition. Et ce ne sera pas la dernière réforme sur ce sujet. Ce projet est très perturbant, particulièrement pour les personnes qui préparent leur retraite » (Dimanche Ouest-France, Loire-Atlantique, 12 mars 2023). A coup sûr, elle devrait expliquer son point de vue aux manifestants qui défilaient à Clisson : ils étaient 1 500 (mardi 5 mars) et 1 000 (samedi 11 mars) ; elle obtiendrait un grand succès. Elle pourrait également regarder de près le résultat d’un sondage récent. Question : « Vous personnellement, êtes-vous favorable ou pas favorable à la demande adressée par l’intersyndicale au gouvernement de retirer son projet de réforme des retraites ? » La réponse est claire, c’est ce que montre une étude de l’Ifop (L’Humanité, lundi 6 mars 2023). Total favorable : 65 % (dont 37 % tout à fait favorable et 28 % plutôt favorable). Total pas favorable : 35 % (dont 16 % pas du tout favorable et 19 % plutôt pas favorable). Dans sa circonscription, il y a de fortes chances pour que les gens pensent la même chose. Pour l’information de Mme Errante, on peut terminer avec la cote de popularité d’Emmanuel Macron : 64 % des Français ne lui font pas confiance, 30 % lui font confiance et 6 % sont sans opinion (Baromètre Kantar Public, Le Figaro Magazine, 3 mars 2023).
Simon Lagadec – « L’avenir de notre système est menacé. Quand on est à trois cotisants par retraité dans les années 1970, puis deux à partir de 2000, et 1,7 aujourd’hui, on voit bien que l’équilibre n’est plus assuré », affirme Elisabeth Borne, la Première ministre (Le Journal du dimanche, 5 février 2023). Dans Ouest-France (lundi 6 février 2023), Sylvain Maillard (Renaissance, premier vice-président de son groupe à l’Assemblée nationale), explique pourquoi la réforme des retraites est indispensable : « Si nous ne faisons rien, le système par répartition ne pourra plus garantir le niveau de pensions actuel à tous les retraités. Selon le rapport du Conseil d’orientation des retraites (Cor), ce niveau de pensions pourrait baisser jusqu’à 20 % d’ici à vingt ans. Nous ne le voulons pas. C’est pourquoi nous demandons aux Français de travailler deux ans de plus. Mais pas à tous : quatre sur dix s’arrêteront avant 64 ans.» Mais tout le monde ne partage pas cette façon de voir les choses ; c’est le cas du docteur Simon Lagadec, médecin à Brest. La majorité de ses clients estime que deux ns de plus, ce n’est pas possible. « Par exemple, les personnes qui travaillent dans les usines de volailles à Châteaulin sont déjà complètement cassées à 50 ans. La réforme des retraites de 2010 a eu pour conséquence d’augmenter de 4,2 % en moyenne par an les arrêts de travail. » (Le Télégramme, Brest, mardi 7 mars 2023)
Les 19 sénateurs bretons – Samedi 11 mars, grand jour au Sénat avec le vote définitif du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale qui prévoit en particulier, dans son article 7, de porter l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans. Comment ont voté les sénateurs bretons ? Dans le groupe Les Républicains : Muriel Jourda (Morbihan), Dominique de Legge (Ille-et-Vilaine), Laurence Garnier (Loire-Atlantique) ont voté pour, tandis que Alain Cadec (Côtes-d’Armor) et Philippe Paul (Finistère) se sont abstenus. Dans le groupe Union centriste : Jacques Le Nay (Morbihan), Françoise Gatel (Ille-et-Vilaine) et Michel Canévet (Finistère) ont voté pour. Dans le groupe Les Indépendants – République et territoire : Joël Guerriau (Loire-Atlantique) a voté pour. Dans le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (macronistes) : Nadège Havet (Finistère) a voté pour. Dans le groupe Socialiste, écologiste et républicain : Sylvie Robert (Ille-et-Vilaine), Annie Le Houérou (Côtes-d’Armor), Jean-Luc Fichet (Finistère), Yannick Vaugrenard (Loire-Atlantique) et Michelle Meunier (Loire-Atlantique) ont voté contre. Dans le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste : Gérard Lahellec (Côtes-d’Armor) a voté contre. Dans le groupe écologiste – Solidarité et territoires : Ronan Dantec (Loire-Atlantique), Joël Labbé (Morbihan) et Daniel Salmon (Ille-et-Vilaine) ont voté contre. Rappelons qu’en septembre, deux départements bretons (Morbihan et Loire-Atlantique) sont renouvelables. Les grands électeurs – souvent des ruraux – se souviendront-ils du vote de Jourda, Le Nay, Garnier et Guerriau ? On peut également ajouter que Joël Labbé (écolo, Morbihan) a déjà annoncé qu’il ne se représentait pas.
François René, vicomte de Chateaubriand – Si l’auteur des Mémoires d’outre-tombe revenait sur terre, il serait obligé d’ajouter un chapitre à son ouvrage. En effet, conséquence de la réforme des retraites, on a manifesté devant son château de Combourg ; ce qui n’appartient pas à la culture locale. Mardi 7 mars, la gendarmerie a compté 875 manifestants et les organisations syndicales 1 200 (Ouest-France, Ille-et-Vilaine, mercredi 8 mars 2023). Ce qui est beaucoup pour une commune qui compte 6 000 habitants.
Laurence Maillart-Méhaignerie – En ces temps troublés, être député Renaissance (parti macroniste) n’est pas chose aisée. Pour justifier le passage à 64 ans, Laurence Maillart-Méhaignerie (Renaissance), député de Rennes-Cesson-Sévigné, utilise un argument budgétaire : « La réforme des retraites est nécessaire, quand on voit les enjeux démographiques : on a moins d’actifs et plus de retraités. Dans les dix ans, les déficits cumulés, c’est presque 150 milliards d’euros. Demander aux gens de travailler plus longtemps, c’et difficile et mal accepté… Mais il faut le faire » (Ouest-France, Ille-et-Vilaine, 4-5 février 2023). Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, lui, dénonce « un projet qui vise d’abord à résorber le déficit du régime des retraites, et pas une réforme de progrès social. A la CFDT, nous n’avons jamais nié la réalité de ce déficit. Et nous ne sommes pas opposés à la nécessité de prendre des mesures pour le résorber. Mais les mesures présentées ne font peser les efforts que sur les travailleurs. Nous pensons que ce déficit est sous contrôle, comme le dit le Conseil d’orientation des retraites, et qu’il peut être géré autrement » (Dimanche Ouest-France, 15 janvier 2023). Pour ce qui est de faire « peser les efforts que sur les travailleurs », il faudrait demander l’avis de François Pinault ; son groupe Kering a en effet réalisé 20,4 milliards de chiffre d’affaires en 2022, soit une progression de 15,3%. Quant au résultat net, il atteint 3,6 milliards d’euros, soit une progression de 14 % (Le Monde, vendredi 10 mars 2023). La famille Pinault possède 1,6 % de la capitalisation de l’indice phare de la Bourse de Paris (CAC 40) d’après Le Figaro Economie (mercredi 8 mars 2023).
Laurent Berger – De passage chez lui, à Saint-Nazaire, Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, a répondu aux questions de Presse Océan (jeudi 9 mars 2023). A propos de la place du monde du travail : « Il y a longtemps eu un impensé au sujet du travail. Avec l’accélération post-pandémie, ce qui émerge, c’est une exigence de reconnaissance des travailleurs de première et deuxième lignes. A la place, on leur dit vous allez bosser deux ans de plus. Il faut redonner du sens, du respect, car il y a un sentiment de mépris des travailleurs ». Il n’oublie pas Saint-Nazaire : « C’est mon berceau et mon terreau. C’est aussi un lieu du collectif. La chance ici, c’est que les gens savent encore se parler. » Rappelons que Laurent Berger a été secrétaire de l’union locale CFDT de Saint-Nazaire de 1996 à 2002. Aujourd’hui, Laurent Berger est en guerre avec Emmanuel Macron mais ça n’a pas toujours été le cas. Effectivement, les journalistes oublient toujours de souligner que Berger et son compère Philippe Martinez (CGT) ont soutenu Emmanuel Macron (banquier d’affaires, Rothschild) au second tour de l’élection présidentielle de 2022, alors que le candidat du monde de l’argent annonçait dans son programme qu’il porterait l’âge légal de la retraite à 65 ans ! Des syndicalistes soutenant un banquier d’affaires, ça ne manque pas de sel ! C’est ainsi que Macron annonçait qu’il allait revaloriser les retraites «en décalant l’âge de la retraite à 65 ans. Parce que nous avons un déséquilibre démographique, parce que je ne veux pas laisser les pensions baisser, parce que je veux continuer à prendre en compte la pénibilité et les carrières longues. » (Ouest-France, mercredi 6 avril 2022). Quant au tandem Berger-Martinez, afin que nul n’en ignore, il publiait dans Le Journal du dimanche (17 avril 2022) une tribune intitulée « Marine Le Pen, un danger pour les travailleurs ». L’idée centrale du propos : « Le RN n’a pas changé, tout son programme est centré sur le rejet de l’autre et le repli sur soi ». Pas un mot sur la question sociale et les 65 ans de Macron. Comme, pour le second tour de la présidentielle, il n’y a que deux candidats, si on fait campagne contre l’un, cela signifie que l’on soutient l’autre, même si on n’appelle pas explicitement à voter pour lui. Certes, les classes populaires n’ont pas compris le message de Berger-Martinez puisque c’est chez les ouvriers, les employés et les travailleurs indépendants que Marine Le Pen réalise ses meilleurs scores.
Illustration : DR
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3 réponses à “Réforme des retraites : il y en a pour tous les goûts…”
en tout cas, cette péripétie a permis aux LR de rejoindre la macronie, aux syndicats de comprendre (si possible?) qu’il vaut mieux ne pas voter pour quelqu’un qui affiche une seule idée contraire à la leur (si possible) et aux électeurs que la plupart ne s’inquiète pas de leur opinion
Cette réforme est injuste !
Il faut la combattre !
Dommage que, encore une fois, les patriotes, les identitaires, les nationalistes etc soient absent de la lutte sociale et de l’action syndicale…
Encore une fois cette absence profite a l’extrême gauche…
Une présence massive sous chasuble gilets jaunes et drapeaux régionaux seraient pourtant nécessaire…
Seul quelques héritiers du nationalisme révolutionnaire que l’on trouve a égalité et réconciliation, osre rébellion, etc semblent se manifester…
Cela fait longtemps que le système de retraite par répartition a entamé sa lente agonie. La seule façon de le sauver, c’est d’y ajouter un complément de retraite par capîtalisation (oh ! « capital » ! quel vilain mot pour des oreilles de gauche !) Quant au sacro-saint âge de départ, pourquoi ne pas laisser chacun décider ? Si je veux partir plus tôt, j’accepte de toucher une retraite moindre, et lycée de Versailles. Tout ça, c’était dans le « Livre blanc des retraites », que Michel Rocard a sorti en 1992, juste après s’être fait lourder du gouvernement par Mitterrand, comme un malpropre. Tout y était écrit, et Rocard concluait en disant que + on tardait à réformer, + ce serait douloureux. Ça a été écrit il y a + de TRENTE ANS !!!!