Le groupe Altares a dévoilé les chiffres des défaillances d’entreprises en Bretagne administrative pour l’année 2022. Avec 1589 procédures ouvertes sur l’année, le nombre de cessations de paiement accuse une hausse historique de 61 % par rapport à 2021. C’est toutefois 400 défauts de moins qu’en 2019. Si le retour aux normes d’avant Covid s’amorce depuis un an, l’augmentation des défaillances s’accélère de manière alarmante pour les très jeunes entreprises et les PME. Dans ces conditions, 4 100 emplois directs sont aujourd’hui menacés.
La défaillance d’entreprise correspond à l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, redressement judiciaire ou liquidation judiciaire directe auprès d’un Tribunal de Commerce ou Judiciaire. Cela concerne aussi les ouvertures après résolution du plan de redressement. En revanche, les statistiques de défaillances ne considèrent ni les procédures amiables (mandat Adhoc ou conciliation) ni les suites d’ouverture (arrêt de plan ou conversion en liquidation).
Le nombre de défaillances d’entreprises en Bretagne s’envole de 61 % en 2022, soit 11 points de plus que la moyenne nationale (+ 49,9 %)
Avec 1589 procédures de redressements ou liquidations judiciaires ouvertes dans la région Bretagne, le nombre des défaillances augmente très fortement (+61 %) en 2022 en comparaison de 2021. Une tendance nettement supérieure à l’échelle nationale, qui enregistre une hausse historique de +49,9 %.
Le niveau des défauts est néanmoins encore nettement inférieur (-20%) à celui de 2019, année de référence avant-covid, où près de 2000 cessations de paiement avaient été enregistrées.
A ces défaillances s’ajoutent 32 ouvertures de procédures de sauvegarde, un dispositif de prévention accessible aux seules entreprises qui ne sont pas encore en cessation de paiement, afin de favoriser leur réorganisation. Ce nombre est au plus haut depuis 2016 mais représente seulement 2 % de l’ensemble des procédures.
Le Finistère, département le plus résilient. La situation se dégrade dans le Morbihan et en Ille-et-Vilaine
Le Finistère compte moins de 400 procédures (395), un chiffre en augmentation de 44,7 % soit 16 points de moins que de la moyenne régionale. Une bonne performance pour ce département qui enregistrait en 2021 la plus forte baisse de la région (- 32 %).
Les Côtes-d’Armor font également mieux que la moyenne régionale avec une augmentation de 51 %. 2021 avait été plus délicate, la baisse n’était que de 4 % (-22 % en Bretagne).
Dans les deux autres départements, la hausse est au-dessus de 70 % en 2022 après un recul supérieur à 20 % en 2021. Le Morbihan enregistre ainsi 401 procédures contre 229 un an plus tôt (+75,1%) et l’Ille-et-Vilaine près de 500 (491) contre 285 en 2021 (+72,3%). |
Les PME à la peine et des jeunes entreprises trop vulnérables
En Bretagne, les TPE concentrent l’essentiel des défaillances (94 %) et donnent donc le ton pour les tendances régionales. Près de 1500 (1493) entreprises de moins de 10 salariés ont défailli en 2022, un nombre en augmentation de 60,9 % mais encore inférieur de 387 par rapport à celui de 2019.
Près d’un quart des TPE est de création récente (moins de trois ans). Or ces jeunes entreprises sont très vulnérables : leur nombre (351) a plus que doublé sur un an (+114%).
Pour les PME, la tendance accélère fortement, tout particulièrement pour celles de moins de 50 salariés : 89 jugements en redressement ou liquidation directe, une hausse de près de 64,8 % sur un an soit un niveau proche de 2019 (91).
Les sociétés de plus de 50 salariés résistent à peine mieux (+40 %) mais sont peu nombreuses (7).
Dans ces conditions, le nombre d’emplois menacés bondit et passe de 2600 en 2021 à 4100 en 2022. C’est donc 1 500 de plus sur un an.
Les activités B2C en première ligne sur le front des défauts, mais le B2B est aussi en tension
CONSTRUCTION
Le secteur de la construction, qui concentre près du quart des faillites, repasse au-dessus des 300 défauts avec 343 procédures ouvertes soit 66,5 % de plus qu’en 2021. Une tendance atténuée par le gros œuvre (66 ; +18 %) tandis que le second œuvre affiche une dégradation rapide (189 ; +71 %).
COMMERCE
Le commerce dépasse également 300 défauts (352), en hausse de 85,3 %.
Le commerce de détail affiche les tendances les plus sévères (226 ; +101,8 %) en particulier dans le détail alimentaire (+172 %) ou l’habillement (+79 %).
SERVICES
Dans les services aux entreprises (216), les défauts augmentent de 43 %. Une tendance ralentie par les services administratifs (110 ; +18 %). A l’inverse, les services scientifiques techniques sont à la peine (106 ; +83%), avec notamment le conseil en communication et gestion (+56 %) ou les activités d’architecture et d’ingénierie (+70 %).
Dans les services aux particuliers, la dégradation est rapide (+77 %), où les activités de coiffures et soins de beauté (50 ; +213 %) retrouvent les niveaux de 2020 et 2019.
INDUSTRIE
Dans le secteur de l’industrie, le nombre de défaillances d’entreprises (126 ; +56 %) renouent avec les niveaux de 2019 (130). Si la manufacture résiste mieux (65 ; + 20%), l’agroalimentaire (61) dérape de +126 %, tirée par les boulangers-pâtissiers (+129 %).
TRANSPORTS
Dans le transport routier de marchandises (34 ; +62 %) la sinistralité est au plus haut depuis 2014 (39).
RESTAURATION
Dans les activités de restauration le nombre de défaillances (149) s’est envolé de + 126 %, tiré par la restauration assise (101 ; +120 %) et la restauration rapide (49 ; +133 %). Les débits de boisson (54 ; +135 %) sont également durement touchés tandis que l’hébergement résiste très bien en présentant des niveaux stables (10 ; 0%).
AGRICULTURE
Après une année 2021 compliquée (+37%), l’agriculture est dans le vert en 2022 (87 ; -16 %).
2023, une année de transition à bien négocier
Thierry Millon directeur des études Altares conclut : « Il y a un an, nous rejetions l’hypothèse d’une explosion des défaillances en 2022, en anticipant malgré tout une hausse sensible des défauts. Si le cataclysme n’a pas eu lieu, le rythme est plus soutenu qu’envisagé, faisant craindre un retour aux valeurs d’avant crise plus tôt que prévu. 2019 s’était achevé sur 52 000 défaillances, 2023 pourrait dépasser ce seuil et nous ramener aux valeurs de 2017 au-delà de 55 000 à l’échelle du pays. La Bretagne pourrait être proche des 2000 défauts. Un nombre certes important mais plutôt raisonnable au regard du contexte très difficile que nous traversons.
Pour certaines TPE et PME, les chances de survie sont compromises. Pour une partie d’entre elles, la fragilité de leur structure financière est en cause. Pour d’autres c’est paradoxalement leur incapacité à honorer des carnets de commandes pourtant bien remplis qui pourrait les amener au défaut. En cause, les difficultés d’approvisionnement, l’explosion des coûts des matériaux et les problèmes de recrutement. Dans tous les cas, les prêteurs seront plus exigeants et se concentreront sur les sociétés dont les bilans seront les plus solides.
Les contraintes financières (remboursement des dettes Covid et notamment PGE ; inflation ; hausse des taux ; facture énergétique, etc.) sont malheureusement vouées à peser toujours plus lourd. Alors que les tensions sur les trésoreries des entreprises se font déjà ressentir, le financement de l’exploitation et donc du BFR (Besoin en Fonds de Roulement) aura à n’en pas douter l’attention des directions financières des TPE PME comme des ETI. »
Méthodologie | Les statistiques Altares de défaillances d’entreprises comptabilisent l’ensemble des entités légales disposant d’un numéro SIREN (entreprises individuelles, professions libérales, sociétés, associations) et ayant fait l’objet d’un jugement d’ouverture de procédure prononcé par un Tribunal de Commerce ou Judiciaire (ex TGI – TI)