La scène se passe dans une cour de récréation. Un groupe de 5 collégiens interpelle un camarade de classe sur un ton enjoué, entre l’amusement et la moquerie. Il est vrai que Louis, ce camarade, n’en impose pas vraiment : intello à lunettes maladroit et mal à l’aise, il n’a pour seule compagnie qu’un téléphone portable. Par contraste, le groupe monopolise les critères de la coolitude et de la « diversité » : l’un d’eux est même homosexuel, c’est ce que sous-entend le désir qu’on lui prête de « croquer » Louis comme il croque son goûter.
Nous sommes dans la dernière publicité pour le biscuit Granola (version longue). Elle met en scène une situation qui pourrait clairement déboucher sur du harcèlement scolaire. Mais dans le scénario retenu, il y a une totale inversion de la situation habituelle : Louis le blanc fragile est en fait le héros du groupe, car en manipulant les tubes à essai il a provoqué une mini catastrophe très divertissante en cours de chimie. « Jugez-le à sa juste saveur », conclut la pub. Autrement dit : plutôt que de le harceler, sachez apprécier les qualités cachées du boloss que vous croisez au bahut.
Vue comme ça, la pub s’inscrit dans la lutte contre le harcèlement scolaire. Et pourtant, elle crée du malaise : toute la scène est regardée avec les yeux des harceleurs et le scénario ne fait que conforter les stéréotypes, y compris de couleur de peau. A la fin du spot, le groupe se marre franchement, laissant entendre que tout depuis le début n’avait été que dérision et double sens.
Le message explicite est plutôt subtile, tandis que tout ce qui est implicite va dans le sens contraire et valorise finalement les auteurs de harcèlement. Comme si pour vendre de la malbouffe (1), les fils de pub avaient voulu mettre de leur côté les leaders d’opinion que sont les élèves « populaires ».
E.P.
1) Un biscuit Granola Lu classique contient l’équivalent d’un demi morceau de sucre. 100 g de Granola = 495 calories, soit 1/6ème à 1/4 des calories quotidiennes maximales recommandées pour un ado.
Visibles également dans le spot, les Granola Cookie font pire : 524 calories les 100 g, c’est-à-dire pour seulement 5 biscuits.
Lu était une ancienne entreprise bretonne, aujourd’hui filiale de la multinationale américaine Mondelez (3,4 milliards de dollars de profit en 2018).
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5 réponses à “Granola : une pub qui joue avec les codes du harcèlement scolaire et les stéréotypes raciaux”
J’ai toujours détesté cette pub tellement sectaire. Et dire que cela sort d’un cerveau d’une personne qui a fait des études pour ça ! Il (ou elle) faisait sûrement partie du groupe de petits malins qui se croient supérieurs… Bref ce genre de publicité ne devrait pas exister.
Cette pub, c’est le résultat de la déchristianisation.
Entre autres…
Les publicitaires connaissent les ressorts des comportements mieux que n’importe quel sociologue, parce que c’est leur métier ! Et quand les briefs des clients leur imposent des impératifs qui risquent de nuire aux résultats, il leur arrive de s’en accommoder adroitement. Par exemple, l’obligation politiquement correcte de présenter des couples mixtes a engendré une figure caractéristique de la publicité contemporaine : le couple Noir dépassé + Blanche nunuche (exemples typique : « J’en ai connu des ‘dates’ gênants » pour EDF ou « ça va être une belle journée » pour la Citroën ë-C4)
Rappelez vous ce que l’on disait en 1968 pendant les » évènements » : La publicité vous prend pour des khons et la publicité vous rend khons ! Et ça continue encore et encore comme le chante F.Cabrel…..