Les enfants de la discorde : une histoire à la Monte Cristo au milieu des guerres de Vendée et de la Terreur. Interview de Jonathan Werber

Décembre 1793, Nantes. Quand le jeune soldat républicain Simon Delmotte revient chez lui après avoir participé à la guerre de Vendée, il découvre que sa famille a été victime de la Révolution. Son père a été assassiné, sa mère arrêtée et leur atelier d’horlogerie saisi. Très vite, il soupçonne un homme : Jean-Baptiste Carrier, l’impitoyable consul qui tient la région d’une poigne de fer.

Avec la complicité du juge Phelippes et de l’intrigante courtisane Charlotte, Simon élabore une vengeance à la hauteur du criminel. Mais face à lui se dresse toute la brutalité de ce nouveau régime dont Carrier contrôle chacune des ficelles. Pour avoir une chance d’obtenir justice, Simon devra affronter la Terreur et plonger dans les noirceurs de son âme… en prenant garde de ne pas s’y noyer.

Avec Les enfants de la discorde (Robert Laffont) c’est un roman passionnant que vient de rédiger Jonathan Werber (son deuxième roman après Là où les esprits ne dorment jamais). Un roman qui nous plonge dans une époque où la République française, déjà, commettait d’innombrables horreurs dans nos contrées. Un roman qui complètera à merveille (mais de façon romancée) toutes les études qui ont pu être réalisées sur les guerres de Vendée, les noyades de Nantes, La Terreur.

Un beau cadeau de Noël, un roman remarquable à offrir sous le sapin en décembre.

Pour en parler, quoi de mieux que d’interroger l’auteur, Jonathan Werber ?

Breizh-info.com : Pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Jonathan Werber : Je m’appelle Jonathan Werber, j’ai 28 ans et les enfants de la discorde est mon deuxième roman, une histoire à la Monte Cristo au milieu des guerres de Vendée pendant la Terreur. Je suis un grand curieux et un passionné d’histoires et d’Histoire.
Mon parcours avant la littérature consiste d’études en école d’ingénieur et d’une licence d’audiovisuel qui m’a orienté vers le scénario. Je pense que ces deux univers m’ont permis de forger mon approche de la littérature, j’ai toujours l’idée de vouloir transporter dans le film que je me projette dans la tête. Selon moi, cela offre la meilleure immersion dans un univers dont le lecteur n’est pas forcément familier et personnellement, j’adore lui montrer des nouvelles choses.

Breizh-info.com : Qu’est-ce qui vous a amené à écrire les Enfants de la discorde, vous qui vous étiez intéressé pour votre premier ouvrage à l’illusionisme ? Qui a réalisé la couverture, superbe ?

Jonathan Werber : Pour mon premier roman, Là où les esprits ne dorment jamais, c’était l’histoire des fondatrices du mouvement, les sœurs Fox, qui m’avait fasciné. Ces prophétesses modernes qui ont créé une religion encore présente aujourd’hui, le mouvement spirite, et la dynamique retors de leur trio m’a inspiré cette enquête façon Sherlock Holmes menée par une illusionniste sur l’origine de la communication avec les esprits.
Pour le deuxième, j’ai mis du temps avant de trouver mon idée, mais quand la Terreur issue de la révolution française s’est offerte à moi au travers l’écoute de podcasts historiques, je savais que je tenais mon sujet.
L’étape d’après, c’était trouver l’angle au travers duquel je voulais en parler et après maintes recherches, Carrier et ses noyades de Nantes se sont imposées à moi. Je trouvais qu’ils cristallisaient parfaitement l’esprit de la Terreur, expliquant comment on en était arrivé là et jusqu’où les dérives ont pu pousser l’homme vers le penchant le plus noir de sa nature.

La couverture est de Marion Tigréat, qui avait déjà réalisé la couverture de la version poche de mon précédent. J’avais tellement aimé son travail que j’ai demandé à mon éditeur de l’engager à nouveau pour celui-là et en effet, je ne suis pas déçu.

Breizh-info.com : Votre livre raconte notamment, de manière romanesque, les massacres commis par l’impitoyable Carrier durant la Terreur. Est-ce un fait historique que vous estimez avoir été trop longtemps caché, mis de côté dans l’histoire de France ?

Jonathan Werber : Les noyades de Nantes sont affreuses mais la Terreur est remplie d’histoires toute aussi sordides. J’ai choisi de parler de Nantes parce que je trouvais que la situation de la ville était un parfait miroir de l’époque, pas un fait exceptionnel en ce temps-là. J’en évoque d’autres dans le roman, notamment les canonnades de Lyon à la mitraille afin d’accélérer les exécutions ainsi que les crimes de guerre commis en Vendée.
Je pense juste que la plupart des gens sont peu informés sur ce qu’était vraiment la Terreur, se rappelant surtout des guillotines, Robespierre et Danton, ce qu’on apprend en cours finalement.
Ce roman, c’était une manière pour moi de montrer les réalités de cette époque où la France a été déchirée par une de ces guerres civiles les plus violentes tout en offrant une histoire viscérale.

Breizh-info.com : Votre ouvrage évoque aussi la déchirure qui a pu exister à l’époque, dans des familles parfois détruites par les engagements des uns en faveur de la République, des autres en faveur de la Chouannerie, de la Vendée, de Dieu et le roi…Cela ne vous a-t-il pas demandé un gros travail de recherche historique ? Chez quels auteurs avez vous puisé vos références ?

Jonathan Werber : J’ai évidemment passé beaucoup de temps à rechercher l’époque, la documentation est pour moi une part cruciale dans l’écriture d’un roman. Selon moi, les lecteurs savent immédiatement reconnaître « la saveur » du vrai. Je trouve que cela donne immédiatement une autre dimension à l’ouvrage. Même si ça peut demander beaucoup de temps et d’énergie, connaître le réel quotidien de ses personnages, c’est primordial pour qu’ils prennent vie dans l’imaginaire du lecteur.
En termes d’approche romanesque, Ken Follet et ses « Pilliers de la Terre » a été un modèle dans son approche du roman d’aventure inscrit dans l’Histoire. Pour ma documentation le livre « Carrier et la Terreur nantaise » de Jean-Joël Brégeon est probablement le livre qui m’a le plus aidé.

Breizh-info.com : Quel regard portez-vous, à titre personnel sur cette partie sanglante de notre Histoire ?

Jonathan Werber : Une fascination morbide, sinon je ne pourrais pas en parler sur 500 pages. Pour moi, être auteur, c’est s’intéresser à l’humain. En écrivant les Enfants de la Discorde, j’ai dû me demander ce qui pouvait pousser certains hommes à devenir de tels monstres. Et la réponse à cette question, j’ai essayé d’y répondre tout au long du roman, car elle constitue pour moi la raison même de la Terreur.

Breizh-info.com : Avez vous eu l’impression d’avoir amélioré votre plume entre vos deux ouvrages ? Vos personnages notamment, semblent plus complets, plus fouillés que ceux du premier ouvrage ?

Jonathan Werber : Dur exercice que vous me demandez, je ne sais pas si un auteur peut vraiment apporter un regard critique sur son œuvre. Je pense que mes deux romans sont très différents et n’ont pas le même but, le premier se posant la question : qu’est-ce que la vérité dans un monde où la frontière du possible et de l’impossible change chaque jour ? et le deuxième : Peut-on obtenir justice dans le chaos ?

Personnellement, j’aime mes deux ouvrages et me demander de choisir l’un sur l’autre, ce serait comme me demander de choisir un enfant préféré. *rires*

Breizh-info.com : Comment a été reçu votre livre ? Avez vous déjà d’autres projets en tête ?

Jonathan Werber : Pour le moment plutôt bien, je suis heureux de voir que malgré mon drastique changement de sujet et d’approche, les lecteurs m’ont suivi et les retours sont extrêmement positifs !
J’ai aussi la chance d’enfin découvrir le monde des salons du livre (que je n’avais pas pu découvrir sur le premier à cause du Covid) et le contact avec les visiteurs m’a rassuré sur le fait que je n’étais pas le seul à être curieux sur ce qu’était réellement la Terreur.
Actuellement je suis plongé dans la documentation de mon troisième roman, qui sera quelque chose de complètement différent du premier et du deuxième. C’est un sujet auquel je tiens beaucoup et un projet assez ambitieux auquel j’ai envie de donner vie depuis longtemps. Ayant enfin trouver l’angle de mon histoire, il ne me reste plus qu’à l’écrire !

Propos recueillis par YV

Crédit photo : DR

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