S’il est un fait que l »Italie détient plus de la moitié du patrimoine culturel mondial, son richissime sous-sol n’en finit décidément pas de nous surprendre.
En juillet dernier, après 3 ans de recherches, une équipe internationale d’archéologues des universités de Sienne, Dublin et Chypre ramenait à la lumière à Casciano dei Bagni en Toscane, une gigantesque structure de sanctuaires d’époque impériale. Une stèle votive reportant une inscription latine « Apollini scacrum pro salute... » remerciait à la divinité solaire pour la guérison d’une ligne d’infanterie romaine, rappelant au passage le syncrétisme entre les civilisation grecque et romaine.
Mardi 8 novembre, les fouilles confirmèrent leur caractère prometteur : 24 statues en bronze de très grande qualité étaient retrouvées. Une découverte sans précédent qui a eu un écho international et qui, selon l’archéologue Jacopo Tabolli, « réécrira l’histoire et sur laquelle travaillent déjà plus de 60 experts du monde entier ».
Ces statues, très raffinées, sont dans un parfait état de conservation ayant été ensevelies depuis 2300 ans dans la boue et l’eau chaude de bassins sacrés de cette riche région thermale. 5 d’entre elles mesurent plus d’un mètre de hauteur. Parmi les plus remarquables : une statue d’Hygée, déesse grecque de la santé, un serpent enroulé sur le bras, un jeune éphèbe, Apollon, d’autres divinités, des matrones, des enfants et autres empereurs. En outre, des inscriptions en étrusque, en latin et « des milliers de pièces en plus d’une série d’offres végétales tout aussi intéressantes ».
Le territoire avait déjà offert de nombreux ex voto, « des dizaines et des dizaines de jambes, de bras, d’oreilles, de foies, d’utérus et de pénis » tous reproduits en bronze et recouverts d’inscriptions en étrusque et latin, dédicaces aux divinités. L’espace mis au jour serait donc un temple qui servait en même temps d’hôpital et de spa, avec plusieurs piscines de différentes dimensions remplies d’eaux bouillantes et curatives (entre 38 et 42 degrés). Fondé par les Étrusques, un des plus antiques peuples italiques, puis occupés par leurs cousins Romains, il serait, comme l’affirme l’archéologue italien « un espace de soin et de prière », quelque chose de plus qu’un simple complexe thermal, mêlant la science aux pratiques divinatoires. Le sanctuaire existait au moins depuis le IIIe siècle av. J.-C., et resta actif jusqu’au Ve siècle après J.-C. quand, à l’époque chrétienne, il fut fermé sans cependant être détruit.
Pour le ministre de la Culture Gennaro Sangiuliano, il s’agit d’une « découverte exceptionnelle qui nous confirme une fois de plus que l’Italie est un pays fait de trésors immenses et uniques. »
Une bouffée d’air pur en ces temps moroses pour les Italiens, toujours si prompts à dénigrer leur italianité, mais qui, à l’annonce de ces découvertes, renouent avec une certaine fierté identitaire et un sens d’appartenance : dans ces moments-là, il ne fait aucun doute pour eux d’appartenir à la nation la plus riche en matière d’art et d’histoire.
Peut-être Dostoïevski avait-il raison lorsqu’il écrivait “la beauté sauvera le monde”.
Audrey D’Aguanno
Crédit photo: Ministère italien de la Culture
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