Janusz Korwin-Mikke est un homme politique nationaliste et libertarien polonais qui est connu dans son pays, mais aussi à l’étranger, pour ses nombreuses déclarations controversées. Siégeant autrefois au Parlement européen, il est désormais député en Pologne, élu sur les listes de la Confédération de la liberté et de l’indépendance qui compte 11 députés sur 460, dont son parti, intitulé KORWIN (Coalition pour la restauration de la liberté et de l’espoir de la République), est une des composantes. Lionel Baland a interrogé Janusz Korwin-Mikke, lors du Forum économique de Karpacz en Pologne, pour Breizh-info.
Breizh-info : Que pensez-vous du parti conservateur Droit et justice (PiS) qui gouverne la Pologne ?
Janusz Korwin-Mikke : Un ramassis de communistes !
Breizh-info : Quelle est votre position par rapport à la guerre en Ukraine ?
L’intérêt de l’État polonais est une petite victoire de l’Ukraine, juste pour être débarrassé de Monsieur Poutine car ce dernier était vraiment bon en tant que président de Russie, mais il est en train de prendre le contrôle du Belarus. Le président de ce pays, Alexandre Loukachenko, prétend être indépendant, mais dans les faits nous pouvons nous retrouver avec l’armée russe en Belarus, à la frontière polonaise. Et pour nous, mieux vaut ne pas être dans cette situation.
Vladimir Poutine a passé un accord avec Alexandre Loukachenko. Durant deux décennies, ce dernier a défendu l’indépendance du Belarus et, après vingt-et-un an, s’est soumis et a accepté d’entrer dans l’ainsi-dénommée union entre le Belarus et la Russie et a signé avec la Russie 28 accords, dont le dernier prendra effet l’année prochaine et consistera en l’unification de l’armée et des autres services, ce qui signifiera la fin de l’indépendance du Belarus. En conséquence, je prie pour que la Russie perde la guerre avant l’année prochaine.
Breizh-info : Que pensez-vous de la politique actuelle du gouvernement polonais à propos de cette guerre ?
Janusz Korwin-Mikke : Des marionnettes des États-Unis ! La Pologne est une marionnette des USA, mais pour ces derniers, cela a été très facile d’obtenir cette situation, car dans notre pays le sentiment antirusse est fort. 85 % des Polonais, par éducation, sont antirusses.
Breizh-info : Au cours de l’histoire, des problèmes ont aussi existé entre les Polonais et les Ukrainiens ?
Janusz Korwin-Mikke : Nous avons des problèmes depuis très longtemps. Cela a commencé avec le cosaque ukrainien Bogdan Khmelnitski au XVIIe siècle. À l’époque, la République des Deux Nations comprenait le royaume de Pologne et le grand-duché de Lituanie. Il était possible et très facile d’intégrer l’Ukraine à cette entité. Si nous l’avions fait, cela aurait été très bien. Malheureusement, le roi a commencé à se battre avec Khmelnitski et les Russes ont aidé les Ukrainiens. Cela a été une grande erreur du roi polonais.
Breizh-info : Quelle est votre position à propos de l’OTAN ?
Janusz Korwin-Mikke : J’étais, il y a quarante ans, un des très rares politiciens à vouloir l’entrée du pays dans l’OTAN. Tout le monde pensait à l’époque que cela était impossible. Mais, maintenant je suis dépité parce que, après deux décennies de Pologne dans l’OTAN, cette dernière tente de devenir une alliance agressive, alors qu’au départ elle était défensive. Lors d’une réunion qui s’est déroulée à New-York, seul le royaume du Danemark s’est opposé à une telle évolution. Si les États-Unis désirent en faire une alliance agressive, alors la Pologne ne doit pas en faire partie.
Breizh-info : Pourquoi, en 2014, n’avez-vous par formé un groupe avec le Front national et ses alliés ?
Janusz Korwin-Mikke : Nous ne sommes pas nationalistes. Nous sommes conservateurs, mais pas nationalistes. Les négociations ont finalement été arrêtées parce que Mademoiselle (sic !) Le Pen ne désirait pas vraiment qu’elles aboutissent, et nous non plus.
Breizh-info : Le problème était idéologique ?
Janusz Korwin-Mikke : Parmi les formations politiques pouvant constituer le potentiel futur groupe figuraient l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), ainsi que Mademoiselle Le Pen dont nous ne partageons pas les idées politiques. Cela nous posait un problème. Avec la Ligue du Nord (Italie) et le FPÖ (Autriche), en revanche, nous pouvons former un groupe.
Breizh-info : Pourquoi l’AfD vous pose-t-elle problème ?
Janusz Korwin-Mikke : Nous avons peur de toute alliance avec un parti nationaliste allemand. Nous avons de trop mauvais souvenirs.
Breizh-info : Mais, l’AfD n’émet pas de revendications territoriales sur des territoires actuellement situés en Pologne !
Janusz Korwin-Mikke : Les Allemands et les Ukrainiens veulent prendre certaines parties du territoire de notre pays. Nous sommes effrayés de l’alliance entre les Allemands et les Ukrainiens et ces derniers sont toujours pro-allemands. Les Allemands sont aussi pro-Ukrainiens !
Quand des Ukrainiens bandéristes ont tué en 1934 le ministre polonais de l’Intérieur Bronisław Pieracki, qui entre parenthèses était pro-ukrainien, les auteurs ont fui en Allemagne et ce pays a refusé leur extradition.
Breizh-info : Êtes-vous effrayé par la Russie ?
Janusz Korwin-Mikke : Non, pourquoi ?
Breizh-info : Parce que vous avez eu en Pologne des troupes soviétiques à la fin de la Seconde Guerre mondiale et après.
Janusz Korwin-Mikke : La Russie a perdu la guerre contre l’Union soviétique en 1917 et a retrouvé son indépendance en 1991 lorsque le putsch de Guennadi Ianaïev a échoué et que l’URSS a été démolie, mais le grand ennemi de la Russie a été, bien entendu, l’Union soviétique. Cette dernière a tué plus de Russes que l’Allemagne ne l’a fait. Elle est le plus grand ennemi de la Russie.
La situation est comparable à celle des Normands qui ont conquis la Grande-Bretagne et soumis les Anglo-saxons, mais, progressivement, très lentement, après de nombreuses générations, les Anglo-saxons ont fini par reprendre le dessus. La Russie a été soumise par l’Union soviétique, puis finalement les Russes ont conquis le pouvoir au sein de cette dernière et sous Léonid Brejnev la Russie a commencé à devenir un État russe. Les bolchéviques étaient fortement antirusses. Ils étaient Juifs et ceux-ci haïssent les Russes, parce que ces derniers réalisaient des pogroms, etc… Les bolchéviques ont assassiné tout particulièrement des Russes. Ils ont utilisé les autres parties de l’Union soviétique – Belarus, Kazkstan, … – afin de limiter l’influence des Russes.
Breizh-info : Avez-vous peur de l’immigration en provenance d’Afrique ? Pensez-vous que dans le futur cette question se posera ?
Janusz Korwin-Mikke : Oui, j’ai peur de celle-ci. Je n’en veux pas. Nous essayons de la stopper. Nous ne voulons pas d’immigration en provenance d’Afrique, ni avoir trop de musulmans.
Breizh-info : Des mosquées existent-elles en Pologne ?
Janusz Korwin-Mikke : Je pense que Varsovie en abrite deux.
Breizh-info : Quelles sont les différences entre les tendances qui composent la Fédération dont votre parti est un des éléments ?
Janusz Korwin-Mikke : Les nationalistes sont opposés à l’immigration ukrainienne. Nous, nous ne désirons pas payer, mais nous ne sommes pas opposés à l’immigration ukrainienne en Pologne. Notre pays a besoin de travailleurs provenant de ce pays et nous sommes favorables à la présence de ceux qui travaillent honnêtement, alors que les nationalistes ne les veulent pas. Le Mouvement national (Ruch Narodowy) est nationaliste, alors que l’autre composante, la Confédération de la Couronne polonaise de Grzegorz Braun, est d’accord avec nous à propos des choix économiques, mais est sur la même ligne que le Mouvement national en matière d’immigration.
Breizh-info : Êtes-vous plutôt libéraux ou sociaux ?
Janusz Korwin-Mikke : Nous sommes absolument libéraux en matière économique. Nous désirons absolument la liberté de marché.
Breizh-info : Au Royaume-Uni, le Premier ministre Liz Truss [désormais remplacée] est à la fois libérale et pro-immigration.
Janusz Korwin-Mikke : Elle dit cela, mais je ne la crois absolument pas. Elle n’est pas Thatcher !
Breizh-info : Que pensez-vous de Margaret Thatcher ?
Janusz Korwin-Mikke : J’en pense beaucoup de bien et je l’ai connue personnellement.
Breizh-info : Et de Ronald Reagan ?
Janusz Korwin-Mikke : Je ne l’ai pas rencontré, mais je le trouve très bien et très rationnel.
Breizh-info : Comment percevez-vous la gauche en Pologne ?
Janusz Korwin-Mikke : Celle-ci est constituée de deux centre-gauches, un catholique, le PiS [Droit et justice], et un athée, PO [Plate-forme civique], ainsi que d’une gauche authentique. Nous avons donc le centre-gauche et la gauche. La Confédération de la liberté et de l’indépendance et le seul parti de droite.
Breizh-info : Quelle est votre vision du communisme et que faisiez-vous sous celui-ci ?
Janusz Korwin-Mikke : Je déteste le communisme, mais encore plus le socialisme. Je vivais en Pologne à cette époque. Je distribuais illégalement des tracts. J’ai été mis plusieurs fois en prison, bien que je fusse membre d’un parti légal, marionnette du système, le Parti démocratique, qui n’était pas, bien entendu, démocratique. Mais cela constituait la seule possibilité d’être membre d’un parti qui n’était pas communiste. Cette formation politique était très pratique !
Breizh-info : La Pologne croît fortement d’un point de vue économique !
Janusz Korwin-Mikke : Oui, grâce aux écrivains comme moi et d’autres, car nous représentons un fort mouvement en faveur de la liberté de marché et nous avons plus de cette dernière en Pologne qu’en Allemagne ou en France et la Pologne se développe plus fortement que ces deux pays. Bien sûr, la Pologne n’en fait pas autant dans ce domaine que nous le désirons, mais plus que les autres pays. Par exemple, les anciennes entreprises d’État de l’époque du communisme, qui ne dégageaient pas de bénéfices, ont été privatisées et ainsi nous ne payons pas pour ces colosses socialistes.
Breizh-info : Au Parlement, Droit et justice et ses alliés disposent d’une majorité.
Janusz Korwin-Mikke : Oui, nous ne savons rien faire, mais leur majorité est très étroite. Nous espérons constamment qu’ils glissent sur une peau de banane.
Breizh-info : Leur position est opposée à l’immigration ?
Janusz Korwin-Mikke : Non. Droit et justice accepte l’immigration officielle de pays comme les Philippines et le Népal et d’autres États, mais réalise cela d’une manière très rationnelle. Il n’y a pas de vagues de migrants en provenance d’un pays, mais un petit nombre issu de tel État et un autre de tel autre. Ils le font très rationnellement.
Breizh-info : Que pensez-vous d’une restauration de la monarchie en Pologne ?
Janusz Korwin-Mikke : Peut-être. Le Liechtenstein dispose d’un monarque.
Breizh-info : Qui voyez-vous à ce poste ?
Janusz Korwin-Mikke : Ce n’est pas important ! Si Monsieur Kaczyński [le dirigeant de Droit et justice] était roi de Pologne dans une monarchie absolue, il ne tricherait pas, ne serait pas corrompu et ne mentirait pas comme il le fait, car il n’en aurait pas besoin. Il serait peut-être un très bon roi. En revanche, dans une démocratie, il est contraint de développer de telles pratiques afin de gagner les élections.
Propos recueillis par Lionel Baland
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4 réponses à “Janusz Korwin-Mikke : « Si les États-Unis désirent faire de l’OTAN une alliance agressive, alors la Pologne ne doit pas en faire partie » [Interview]”
Malheureusemennt ils sont peu à avoir une ouverture d’esprit, surtout envers leur pays, pour montrer la verité, les Russes on demandé à l’ONU une enquete sur les labos financés par les americains en Ukraine, les deux pays qui ont dit non aux enquetes sont, l’amerique et la France !!! que cherche Maron pour la France ? faire la guerre aavec nos dix canons CAESAR et nos trois jours de munitions !!!!
Les Polonais se souviennent-ils que les Anglais et les Français leur ont promis une protection qu’ils se sont avérés incapable d’assumer, en 1939, car ils s’étaient endormis sur les faux lauriers de 1919, croyant leurs propres mensonges qui disaient avoir gagné une guerre dont le seul vainqueur était celui qui ne l’avait faite qu’au plus strict minima, juste pour paraître le grand vainqueur en imposant ses conditions aux traités de Versailles ?
Ont-ils compris que ces illusions d’impunité ont permis à un gouvernement de bravaches prétentieux qui fera leur malheur de s’associer honteusement à l’agression contre un pays faible, avec celui qui deviendra leur bourreau ?
Comprendrons-ils un jour que les apparences et le brouillard de guerre finissent toujours par se dissiper et que les responsables des conflits sont plus ceux qui les rendent inévitables par une agressivité qui les disqualifie moralement, que ceux qui les déclenchent pour se défendre ?
Et si le massacre de Katyn, perpétré en avril 41, est dénoncé et a fait l’objet d’un grand film montrant le destin des 20.000 victimes attribuées au NKVD, pourquoi les massacres de la Gestapo et du SD qui ont fait le triple de morts dès l’invasion nazie, fin 39, sont-ils tus ? Il ne faut pas vexer l’OTAN, ni accuser les proxys de l’Oncle Sam, les gentils descendants d’un Bandera formé par la Gestapo à Berlin dès la création de cette officine, en 33 ??? L’UE vaut bien un instant de silence…
Les polonais ont toujours manifesté un politique insensée à cause d’une haine viscérale envers la Russie. Je rappelle que la fête nationale de Pologne est celle du jour où la Pologne a occupé Moscou dans les années 1630 !
Cette haine les entraîne à s’allier avec l’Etat Woke américain. Ils se sont vassalisés avec les USA et sont prêts à toutes les guerres pour cela : voir la Russie morte et enterrée !
Il dit ne pas vouloir d’une OTAN agressive alors qu’il sait que l’OTAN est une arme des Etats-Unis qui est tournée contre la Russie…
Il dit ne pas craindre la Russie, mais il répugne à l’alliance de la Biéloérussie avec la Russie et prie pour que Poutine disparaisse..
Il fait semblant de ne pas être nationaliste… mais conservateur.
Ses positions sont pour le moins ambiguës. Ne s’est-il pas moqué de vous ?