Décédé en 2015, le sculpteur animalier José Maria David a laissé une succession compliquée, avec un certain nombre de bronzes d’art toujours sous scellé et un litige qui était arrivé jusqu’en cour de Cassation. Celle-ci vient de le trancher et de supprimer la créance réclamée, qui obérait de façon significative la succession.
En février 2007, le sculpteur, en proie à des difficultés financières, avait fait l’objet d’un plan de redressement judiciaire sur dix ans, arrêté le 17 octobre 2008, élaboré par le tribunal de Saint-Nazaire. Peu après, il avait passé un accord avec une société WTA, de Haute-Garonne, à laquelle il avait vendu 14 œuvres dont quatre bronzes sur lesquels il avait fait une saisie-contrefaçon le 22 novembre 2011 et assigné ladite société pour demander la restitution de ses œuvres, tandis qu’elle demandait des dommages-intérêts. En fin de compte, les deux parties ont transigé et l’artiste s’est engagé le 3 août 2015 à lui fournir une œuvre exclusive qui serait fondue en dix exemplaires. Cependant, il décède des suites d’un accident de la route le 8 octobre 2015, est inhumé à Conquereuil le 17 octobre, et l’oeuvre promise n’est jamais fournie.
Ladite société, qui estime sa perte au prix moyen d’une œuvre de l’artiste, 46.480€ multiplié par dix exemplaires, réclame cette somme de 464.800 € au liquidateur – le plan de redressement s’étant transformé en liquidation judiciaire – Me Philippe Delaere. La cour d’appel de Bordeaux lui donne raison le 26 octobre 2020, estimant que l’inexécution d’un engagement, qu’il soit ou non fautif, doit entraîner l’indemnisation.
Mais la cour de Cassation a cassé et annulé cette décision ce 29 juin, et indiqué qu’il n’y avait plus lieu à renvoi. « Il s’agit d’une obligation de faire personnelle, qui ne pouvait être réalisée que par l’artiste », relate le liquidateur. « Sa mort annule cette obligation, puisqu’il n’y avait que José Maria David qui pouvait réaliser du José Maria David ». Et maintenant ? « Cette somme substantielle qui disparaît est retirée de la liquidation, on paie tout le monde et à la fin de l’année cette succession sera enfin terminée ».
Des affaires tous azimuts
Néanmoins, la succession de l’artiste pourrait donner lieu à d’autres litiges, d’autant que l’enjeu est grand – son Guépard s’était ainsi vendu 252.000 euros en 2010, dans une vente à Deauville. Une enquête visant cinq commissaires priseurs qui se seraient entendus pour faire augmenter ses cotes avait été démarrée en 2013, et au cours de celle-ci, 83 bronzes du sculpteurs placés sous scellés dans son manoir de Conquereuil, faute de place pour les stocker et de budget pour les surveiller.
Mais quelques semaines après la mort de l’artiste, ces œuvres avaient été volées, puis 72 d’entre elles retrouvées à Paris, soit dans un hangar, soit chez des collectionneurs – en 2018, elles ont fait l’objet d’une vente aux enchères à la maison Ivoire (Couton et Veyrac) pour éponger ses dettes liées à la passion des chevaux, son train de vie et ses redressements fiscaux – son manoir et ses voitures de luxe ont été vendus. Cette vente a rapporté plus de 700.000 euros, avec un rhinocéros d’Afrique aux aguets adjugé 58.000 euros.
A partir du 1er octobre 2020, les cinq commissaires priseurs concernés ont été jugés par le tribunal correctionnel de Nantes. Mais le jour même, le tribunal correctionnel de Nantes a du se déclarer incompétent et se dessaisir au profit de celui de Saint-Nazaire, où l’affaire a commencé à être instruite. Depuis plus de nouvelle d’un procès qui n’arrangeait pas plus les collectionneurs – un seul parmi la vingtaine identifiés dans la procédure s’est constitué partie civile, puis s’est retiré une fois son œuvre restituée – et pour cause, ils craignaient que la cote baisse.
«Les œuvres de José Maria David se vendaient bien, mais tous les vingt ans il était ratissé par un proche ou un indélicat », se rappelle un proche. « Et puis tout le monde en a un peu profité. Par exemple, il y a des œuvres qui devaient être fondues en huit ou dix exemplaires authentifiés – eh bien, il y en avait douze. C’est possible qu’on en entende encore parler une fois la succession clôturée ».
LM
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