D’où viennent Les graines de la moutarde de Dijon ? Et le thon bleu-blanc-rouge ? Et les fraises des confitures françaises ? Indications partielles, fantaisistes ou inexistantes : sur les origines, la transparence est mise à rude épreuve et la loi n’est pas systématiquement de son côté. Afin de permettre à tous de faire le choix de son alimentation en toute conscience, les 48 marques alimentaires réunies au sein du Collectif En Vérité se mobilisent pour dévoiler des pratiques qui portent préjudice à tout l’agroalimentaire et demander une clarification de la législation au bénéfice de la transition alimentaire. Bienvenue en Absurdie, pays des origines à géographie variable !
Informations trompeuses sur l’origine des produits alimentaires
Le « made in France » joue-t-il franc jeu ?
Massivement apparu sur les étiquettes, le drapeau tricolore est un argument marketing puissant pour les marques. Et un gage de confiance pour les consommateurs recherché, particulièrement depuis le début de la crise sanitaire. Mais derrière le “fabriqué en France”, que trouve-t-on réellement ? A-t-on raison de faire aveuglément confiance aux mentions patriotes ?
Attachez vos ceintures, le voyage est lunaire
Dans les rayons, les Français sont parfois confrontés à des indications et étiquetages lunaires, or, ils ne sont pas tous astronautes… Pour permettre à tous les consommateurs d’enfin s’y retrouver en un clin d’œil, sans recherche digne d’une exploration spatiale parmi les labels et indications d’origines, le Collectif En Vérité s’engage !
Des confitures françaises à base de fraises polonaises
Pour une confiture, se targuer d’être “fabriquée en France”, drapeau français à l’appui, est possible dès lors que sa dernière transformation substantielle a été réalisée en France. Et, en effet, « la majorité des confitures portant ces mentions sont entièrement transformées en France » explique Coline BURLAND, cofondatrice de Omie & Cie. Mais dans le chaudron, le fruit est-il français ? Ce n’est pas du tout obligatoire, y compris pour des fruits qui poussent très bien en France, comme les fraises. « Nous faisons le constat que, trop souvent, des produits labellisés “Made in France”, et sur lesquels est apposé un drapeau français, ne sont en fait composés que de produits importés.» Ainsi, « En faisant nos recherches d’approvisionnement, nous avons réalisé que les confitures de fraises « fabriquées en France » étaient composées de fraises qui venaient à 90%… de Pologne ».
Les consommateurs dans le brouillard sur les produits de la mer
« Il est possible de mettre un drapeau français sur une boîte de thon pêché par un bateau battant pavillon français, mais débarqué et fabriqué en Côte d’Ivoire. Il est en revanche impossible d’estampiller bleu-blanc-rouge du thon pêché par des bateaux irlandais, mais débarqué et fabriqué à Douarnenez », en Bretagne… en France donc ! explique Béatrice Feutré, Directrice Commerciale et Marketing de Maison Chancerelle (Connétable, Phare d’Eckmühl, Le Savoureux).
Pour les Français en quête de transparence quant aux origines des produits qu’ils consomment, difficile de s’y retrouver, avec des indications qui ne sont pas fiables et qui ne reflètent pas les attentes en termes d’origine. « Chez Connétable, nous avons décidé d’apposer la mention “préparé en Bretagne“, pour indiquer à nos consommateurs que l’ensemble des étapes de production sont réalisées en France ».
Une image contenant alimentation, assiette, intérieur, plat. Description générée automatiquement
Origines des produits alimentaires : des informations absentes ?
La moutarde de Dijon l’est-elle toujours ?
Réputée mondialement, l’origine de la moutarde de Dijon sonne comme une évidence pour les consommateurs. Son origine est indiquée dans le nom, difficile de faire plus clair ! Et pourtant, la grande majorité des grains de moutarde nécessaires à sa fabrication proviennent… du Canada.
« Dans les rayons, les marques affichent fièrement la mention “moutarde de Dijon“, laissant penser aux consommateurs qu’ils achètent bien un produit français, mais il n’en est rien. En retournant les bocaux, le constat est clair : la provenance des graines de moutarde Canadiennes ou Chinoises n’est pas indiquée. Doit-on accepter le fait qu’il n’est pas obligatoire d’afficher la provenance des produits sur les emballages ? » explique Sébastien LOCTIN, fondateur de .Nod.
Les jus, pas pressés d’afficher leurs origines ?
Présents aux côtés des Français tous les matins, les jus de fruits comptent parmi les produits phares de consommation courante. Et pourtant, aucune réglementation n’oblige les fabricants à mentionner l’origine précise des fruits. Paradoxalement, la réglementation se montre ferme et n’autorise la mention « fabriqué en France » que si la totalité du processus de fabrication a lieu en France (embouteillage, et conditionnement). « Dans ce cas, on doit préciser aussi l’origine des fruits mais de façon « évasive » : origine UE/NON UE peut suffire ! » explique Alexia CHASSAGNE, fondatrice de Juste.
Le marché agroalimentaire se divise aujourd’hui en deux types d’acteurs : ceux qui indiquent clairement la provenance de leurs produits, et ceux qui profitent des zones d’ombre réglementaires pour ne pas le faire. L’absence d’engagement sur l’origine permet des arrangements rentables, et des pratiques douteuses qui se font au détriment des consommateurs et de l’ensemble des parties prenantes (agriculteurs, transformateurs, environnement). Cette opacité ralentit les efforts vers la transition alimentaire alors qu’il est au contraire indispensable de l’accélérer.
Le flou mis à profit
Les acteurs qui n’indiquent pas l’origine de leurs produits ont une approche limitée de la traçabilité. Ils ont souvent recours à des filières moins coûteuses mais aussi moins disantes du point de vue de la qualité et des conditions de production.
« Nous avons choisi de communiquer sur l’origine de nos cafés, en proposant des cafés de Pure Origine, pour mettre en avant les terroirs caféiers et les savoir-faire des producteurs. Notre volonté est ainsi de protéger certaines origines rares et de nous battre contre une possible standardisation des goûts. D’autres marques n’ont pas fait ce choix et proposent des cafés d’assemblages, souvent moins chers. Chez Lobodis, nous travaillons avec des filières responsables, mais d’excellence, sur lesquelles nous souhaitons communiquer en toute transparence. Cela se reflète sur les prix. Sans indication et sans pédagogie sur les origines, les consommateurs ne peuvent pas toujours le comprendre », dévoile Frédéric Lerebour, directeur général de Lobodis.
Tout en jouant sur des identités françaises
Packaging aux codes gastronomiques rappelant la cuisine française, noms évocateurs de la culture culinaire hexagonale… De nombreuses marques entretiennent savamment un flou sur les origines de leurs produits, afin de séduire les consommateurs, quitte à les induire en erreur. Ces stratégies ont prouvé leur efficacité au fil des années, plaçant des marques au sommet, sans jamais renseigner les consommateurs sur l’origine des produits et matières premières.
Lever le voile sur la vraie valeur de la transparence
Sur un marché dominé par l’opacité, dire la vérité peut parfois représenter un risque. La profusion d’informations tire les marques vers le bas en brouillant la compréhension. Démarches sincères et trompeuses sont confondues… Dans un marché aussi nébuleux, il est impossible pour les initiatives vertueuses d’émerger et d’être justement comprises et appréciées par les consommateurs.
Un travail coûteux sur les filières et l’approvisionnement
La transparence commence aux origines, dès l’approvisionnement et la constitution des filières. Produire bien, ça a un coût, et les membres du Collectif En Vérité en savent quelque chose.
Pour Élodie GERMAIN, co-créatrice des 3 Chouettes : « La transformation du légume bio et français exige d’afficher un tarif supérieur à celui pratiqué par les transformateurs de produits mondialisés et standardisés. L’engagement n’est pas récompensé ni encouragé. ».
Le prix de produits qui cultivent la transparence est en réalité bien inférieur aux coûts cachés de l’opacité : productions délocalisées, rémunérations de agriculteurs tirées vers le bas, impacts environnementaux non maîtrisés. Il est temps de ne plus le tolérer et de permettre aux pratiques les plus vertueuses de devenir la norme, pour les rendre plus accessibles à tous, au profit de chacun.
LES PROPOSITIONS DU COLLECTIF EN VÉRITÉ POUR LA TRANSPARENCE SUR LES ORIGINES
Le Collectif En Vérité demande au législateur d’imposer à toutes les marques alimentaires des critères d’informations harmonisés, simplifiés et obligatoires sur tous les produits.
Au même titre que sur l’origine, En Vérité souhaite la mise en œuvre d’un étiquetage portant sur trois autres informations clés identifiées par le collectif comme de véritables enjeux de résilience alimentaire, réclamées par les Français :
• le type d’agriculture,
• la qualité nutritionnelle,
• la présence d’additifs.
Les membres du Collectif En Vérité
.nod, Quintesens, Alpina Savoie, d’Aucy, Omie & Cie., Jardin Bio, Food 4 good, Hari & co, Babybio, VRAI, Sojade, Juste, Priméal, Famille TEULET, SODIAAL, Candia, Entremont, Renard Gillard, Fromagerie de Saint-Flour, Nature de Breton, Yoplait Maison LE GOFF, Lobodis Café, LBF, Mo rice, Marcel Bio, Les 3 chouettes, MAZETTE !, La Preserverie, Archigood, L’Atelier V, NO FILTER, LOU Champignon, Krokola, Les fruits défendus, Joody, Supernature, NUDJ, Jubiles, Connétable, Phare d’Eckmul, Le Savoureux, Biorgane, Foodette, Funky Veggie, Chiche, Veridix, Bio par Cœur. Le collectif est accompagné par Transformation Positive.
Crédit photo : DR
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2 réponses à “Origines des produits alimentaires : le Collectif En Vérité dénonce le manque d’information des consommateurs”
tout pour que le consommateur ne soit pas informé
1° En ce qui concerne les produits alimentaires
Pour assurer aux consommateurs une traçabilité sanitaire satisfaisante …..
…. Réserver l’usage du drapeau français à des produits dont la matière première provient
de France et sa transformation et/ou conditionnement effectués sur le territoire français .
…. Supprimer le label « made in France « , remplacé par « made in Europe ou CEE »( ou mieux par
« fabriqué en Europe ou CEE) qui engloberait tous les produits dont la matière première provient de
la CEE et la transformation et/ou le conditionnement effectués sur le territoire de la CEE .
…. Pour la viande provenant d’autres pays que la France ou la CEE , qu’elle soit ou non transformée en
France ou dans la CEE : » Viande en provenance de ….. »
…. Idem pour le poisson , qu’il soit ou non transformé en France ou dans la CEE : » Poisson pêché en ….
2° En ce qui concerne les produits manufacturés non alimentaires :
….. Indiquer le lieu de fabrication et si la matiere première de ce produit provient d’un pays autre que
celui de la fabrication , mentionner ce pays .
La CEE a l’intention de sortir une directive annulant l’indication de la provenance de certains produits alimentaires : il faut être extremement prudent surtout si l’on se rappelle que le TAFTA a été signé dans notre dos !!!!Machenaud