Roland, préfet de la Marche de Bretagne, reste connu pour son ultime combat, à la bataille de Roncevaux. Une superbe bande dessinée qui s’éloigne de l’idéal chevaleresque prôné par la Chanson de Roland.
Chroniques de Roncevaux, la mort de Roland en bande dessinée.
Après avoir soumis Aquitains et Lombards, épaulé par son fidèle Roland, Charlemagne en 777 anéantit l’armée saxonne. Dans la forêt de Teutberg, les cadavres jonchent le sol. Le jeune Roland a lui-même vaincu Widukind. Irminsul, l’immense arbre sacré servant d’idole païenne, est abattu. Les Saxons ont dès lors le choix entre se convertir au christianisme ou mourir. Pour remercier Roland, Charlemagne le désigne préfet de la Marche de Bretagne. Après la bataille, dans le camp des Francs, des sarrasins d’Al-Andalus demandent audience à Charlemagne. Le seigneur Sulayman Ben Yaqzan Ibn Al-Arabi, gouverneur de Barcelone, lui demande son aide pour combattre l’émir de Cordoue, Abd Al-Rahman. En contrepartie, il lui offrira Saragosse, régie par son ami Hussen Ibn Yaha al-Ansari. Charlemagne accepte, dans l’espoir d’établir une ligne défensive au sud des Pyrénées. L’armée de Charlemagne se dirige vers Pampelune, l’une des rares villes chrétiennes résistant encore à l’islam en Espagne. Le roi des Francs y prend en otage des membres de la famille d’un chef local, afin de garantir la fidélité de la ville. Il se rend ensuite à Saragosse, dont il espère facilement s’emparer avec l’appui de Sulayman. Mais Hussein, qui s’est rallié à l’émir de Cordoue, repousse les assauts francs. Pendant ce temps, les basques déciment la garnison de Charlemagne à Pampelune. En représailles, le roi franc rase Pampelune. Les basques se vengeront à Roncevaux…
Le scénariste-dessinateur-coloriste Juan Luis Landa, auteur complet, consacre ainsi une bande dessinée, en deux tomes, à cet épisode historique qui reste méconnu. D’origine basque, il se dit fasciné par « le 8e siècle,… étant la période la plus sombre depuis la chute de l’Empire romain… Alors que la religion chrétienne œuvre toujours pour mettre fin aux poches de paganisme…, une nouvelle religion, l’Islam, éclate au sud de manière écrasante ». La précédente bande dessinée sur la bataille de Roncevaux avait déjà été réalisée par un espagnol (Roncevaux, par Palacios, Editions du Long Bec).
Par une intrigue bien menée, le scénariste Juan Luis Landa entend respecter les connaissances historiques actuelles sur cette incursion de Charlemagne dans l’Al-Andalus, même si on reste surpris d’entendre celui-ci parler de croisade en 778. Il s’écarte ainsi de La chanson de Roland, écrite au XIème siècle, laquelle prônait l’idéal monarchique et chevaleresque, sans doute au détriment de la réalité historique. Le scénariste montre la violence des conquêtes de Charlemagne, qu’il imagine convaincu d’avoir été choisi par Dieu pour étendre le territoire de la chrétienté. Après avoir soumis Aquitains et Lombards, Charlemagne envahit la Saxe en 778 et conquiert les royaumes germaniques. Il détruit les reliques païennes et baptise massivement le peuple vaincu.
Bien sûr Roland, preux chevalier commandant l’arrière-garde de l’armée de Charlemagne, souffle dans son cor au col de Roncevaux pour prévenir l’armée royale de l’embuscade. Mais il n’est pas montré comme cette figure mythique du panthéon national, aux côtés de Jeanne d’Arc et de Napoléon. Les sarrasins ne sont pas mieux traités. Le scénariste révèle la fourberie d’Hussen, celui-ci profitant de l’absence de Sulayman pour subtiliser son poste de gouverneur de Saragosse, profitant au passage de son harem…
Le superbe trait réaliste de Juan Luis Landa, particulièrement précis et dynamique, reproduit à merveille cette époque. La variété du cadrage renforce le dynamisme. Sa colorisation est magnifique.
Chroniques de Roncevaux, t. 2 Munjoie !, 14,95 euros. Editions Glénat.
Kristol Séhec.
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