En Allemagne, la guerre en Ukraine a ostensiblement relancé le débat sur l’orientation des contenus politiques et la composition du personnel de l’AfD. La direction du parti et le groupe parlementaire ont certes officiellement condamné l’attaque russe contre l’Ukraine.
Mais à l’AfD, les dissensions et querelles en interne n’en sont pas pour autant terminées. Un épisode survenu fin mars au Bundestag est révélateur à cet égard. Fin mars, le député AfD Steffen Kotré s’exprimait au Parlement allemand au sujet des niveaux de remplissage des réservoirs de gaz allemands, critiquant la décision du gouvernement allemand d’interrompre le processus d’approbation du gazoduc russo-allemand Nordstream 2 en raison de l’attaque russe contre l’Ukraine, « sur instructions des Américains. » Kotré avait ensuite déclaré, lors de sa prise de parole, que » la guerre d’agression en Ukraine, contraire au droit international, entraînait beaucoup de souffrances, et que celles-ci étaient sur la conscience du gouvernement russe, mais que lorsqu’on en parlait, il fallait toujours considérer la part de responsabilité de l’Occident. «
En entendant son collègue parler de la sorte, le vice-président du groupe parlementaire AfD, Norbert Kleinwächter, avait quitté la séance plénière en signe de protestation et avait condamné le discours de Kotré sur Twitter en écrivant : « Je me distancie fermement de la propagande poutinienne répugnante que Steffen Kotré a diffusée aujourd’hui au Bundestag ». « Kleinwächter a fauté en tant que vice-président du groupe parlementaire AfD », a déclaré par la suite le député AfD Petr Bystron; « son rôle est de gérer le groupe, et non de se distancer de ses collègues en public.” Plusieurs députés du groupe parlementaire de l’AfD au Bundestag ont alors rédigé une motion exigeant des sanctions disciplinaires contre Norbert Kleinwächter. De plus, il est reproché à Kleinwächter d’avoir demandé l’exclusion de la Russie du Conseil de l’Europe lors d’un discours prononcé au Palais de l’Europe à strasbourg, et d’avoir ensuite voté en faveur de cette exclusion. « Ceci est en contradiction avec la ligne politique du groupe parlementaire du Bundestag, » ont constaté les auteurs de la motion, parmi lesquels on trouve entre autres Petr Bystron, Marcus Frohnmaier, Steffen Kotré, Hannes Gnauck, Jürgen Pohl et Stephan Protschka.
En définitive, il s agit de profonds désaccords au sein de l’AfD – qui avaient déjà éclatés à plusieurs reprises lors de la crise Covid- et qui s’aggravent encore ici avec la guerre en Ukraine. De l’avis de pas mal de membres du parti, le groupe AfD se trouve aujourd’hui à un carrefour où il risque de se déchirer, les uns considérant que la proximité de leurs collègues avec la Russie de Poutine est à l’origine de cette situation désastreuse, les autres accusant les premiers de vouloir flatter leurs égos en s’accordant la faveur des médias.
Nicolas Faure
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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