Le 10 mai, quatre associations ont saisi le Conseil d’Etat afin d’obtenir la fin des contrôles aux frontières intérieures de la France. Si elles obtiennent satisfaction, les entrées clandestines dans le territoire français, déjà nombreuses, pourraient augmenter de façon considérable. Après la démission du patron de Frontex suite à des accusations de refoulements de clandestins pratiqués par certains de ses agents, les militants pour l’abolition des frontières vont-ils gagner une nouvelle bataille ?
Les contrôles aux frontières intérieures de la France rétablis depuis 2015
Depuis les attentats terroristes qui ont endeuillé la France en 2015 (Bataclan, Charlie hebdo, etc.), le gouvernement français a continuellement rétabli les contrôles aux frontières intérieures du pays. Il s’appuie pour cela sur le code frontières Schengen qui permet à un Etat de suspendre pour une durée de 6 mois renouvelable la libre circulation des personnes à ses frontières au motif de menaces graves pour son ordre public ou sa sécurité intérieure.
Le rétablissement à 15 reprises des contrôles aux frontières intérieures a limité l’ampleur de l’immigration clandestine à destination de la France. Selon un représentant de la Cimade, cité par le journal La Croix, près de 300 000 refus d’entrée auraient été délivrés depuis 2015 dans le cadre de refoulements de personnes vers l’Italie et l’Espagne.
Interrogée par France 3, une juriste pro-migrants estime entre 70 et 100 le nombre de personnes qui seraient refoulées chaque jour à la frontière entre l’Italie et la France. De fait, selon des sources policières, sur les dix premiers mois de 2021, 25 998 personnes ont été interpellées à la frontière entre l’Italie et la France. A la frontière franco-espagnole, la situation n’est guère meilleure. Au point de passage frontalier de Cerbère, près de 13 000 personnes sans documents pour circuler en France ont été interpellées en 2021.
Les associations pro-migrants en action
Mais ces filtrages aux frontières ne plaisent pas à tout le monde. Quatre associations, la Ligue des Droits de l’Homme, l’Anafé, la Cimade et le Gisti viennent de déposer un recours en annulation, assorti d’un référé-suspension, à l’encontre de la décision du Premier ministre de prolonger les contrôles aux frontières intérieures du 1er mai au 31 octobre 2022.
Ces associations motivent leur action devant le Conseil d’Etat par le fait que le code frontières Schengen ne permet pas un rétablissement permanent des contrôles aux frontières. Elles estiment également que le filtrage effectué par les forces de l’ordre au travers de procédures de refus d’entrée ne respecterait ni « la procédure » ni les « droits des personnes dont le droit d’asile et le droit à la protection pour les mineurs isolés ».
Si en 2017 et 2019, saisi d’une requête similaire, le Conseil d’Etat a validé les décisions des autorités françaises de renouvellement du rétablissement des contrôles aux frontières intérieures, de nouveaux éléments sont apparus depuis, qui pourraient bien aboutir à un jugement différent cette année.
Les menaces invoquées doivent changer !
Dans un arrêt du 26 avril 2022, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé qu’en vertu du principe de liberté de circulation au sein de l’espace Schengen, un État membre ne peut rétablir des contrôles à ses frontières intérieures pour une durée excédant 6 mois, sauf apparition d’une nouvelle menace, distincte de la précédente. Or, dans ses notifications à la commission européenne de rétablissement des contrôles aux frontières, le gouvernement français ne justifie pas à chaque fois une nouvelle menace.
Seuls 3 motifs ont été invoqués lors des 15 notifications réalisées depuis 2015 : la menace terroriste persistante, les mouvements secondaires de migrants et l’épidémie de Covid-19. C’est d’ailleurs ce dernier motif qui a été utilisé pour le rétablissement des contrôles aux frontières du 1er mai au 31 octobre 2022.
Interrogé sur l’action des 4 associations pro-migrants, le gouvernement aurait botté en touche en indiquant que ce sujet devrait être traité dans le cadre de la réforme à venir du code des frontières Schengen, lors conseil des ministres de la justice et des affaires intérieures de l’UE, à la mi-juin.
Un argument qui ne laisse rien présager de bon : l’évolution souhaitée par la commission européenne des règles de l’espace Schengen vise à limiter les rétablissements des contrôles aux frontières intérieures et même à sanctionner les pays qui selon elle en abuseraient !
Le contexte européen : forte poussée de l’immigration clandestine
Si le Conseil d’Etat rend une décision favorable aux associations pro-migrants, les forces de l’ordre ne pourront plus faire que des contrôles aléatoires dans un périmètre de 20 kilomètres autour des frontières et dans les gares, ce qui rendrait beaucoup plus difficile les refoulements des clandestins. Cela conduirait à aggraver une situation migratoire déjà catastrophique, les éloignements des étrangers en situation irrégulière présents sur le sol français étant réalisés dans une quantité dérisoire au regard de leur nombre.
Ce serait d’autant plus grave que le contexte migratoire est marqué en Europe par une forte poussée de l’immigration clandestine. Selon l’agence Frontex, l’immigration clandestine a retrouvé le niveau extrêmement élevé de 2016. Plus de 43 000 franchissements clandestins des frontières extérieures de l’UE ont été détectés durant les seuls 3 premiers mois de l’année.
Autre élément de contexte : l’instrumentalisation des migrants par des Etats tiers devient de plus en plus fréquente. Tour à tour, le gouvernement turc en mars 2020, marocain en mai 2021, biélorusse en juin 2021, ont utilisé les flux migratoires comme arme diplomatique. C’est désormais le gouvernement algérien qui est accusé de laisser passer des migrants, cette fois-ci vers l’Espagne, pour faire pression sur le gouvernement espagnol dans le conflit entre l’Algérie et le Maroc. Empêtrés par un droit favorable aux migrants clandestins, les pays du sud de l’Union européenne subissent passivement ces offensives migratoires téléguidées.
Comme s’il fallait en ajouter, J.C. Leggeri, le patron de Frontex, a été contraint de démissionner à la suite d’une intense campagne de dénigrement de l’action de l’agence, accusée de refouler des clandestins aux frontières, en somme de faire son travail. C’est désormais flanqués d’observateurs des droits fondamentaux que les garde-côtes et garde-frontières de l’espace Schengen devront travailler.
En France, cette situation a des conséquences tangibles dans le nombre de demandeurs d’asile, parmi les plus élevés d’Europe, dans celui des jeunes et moins jeunes étrangers qui demandent à être pris en charge intégralement au titre de l’Aide Sociale à l’Enfance, dans le nombre de demandes de titres de séjour qui explose, etc.
Autre sujet de préoccupation : la menace terroriste ne faiblit pas : alors que l’Espagne est confrontée à une forte augmentation de l’immigration clandestine qui arrive sur son sol, cinq djihadistes algériens arrivés dans la péninsule ibérique par la mer ont été arrêtés en octobre dernier.
En France, depuis 2015, plusieurs terroristes sont arrivés clandestinement avant de commettre leurs méfaits. C’est le cas pour les attentats à Paris le 13 novembre 2015, à la basilique Notre Dame de Nice en octobre 2020, à Paris près des anciens locaux de Charlie hebdo en décembre 2020, etc.
Si les contrôles aux frontières ne prémunissent pas contre toutes les intrusions clandestines, nul ne peut nier qu’elle les limite. Le membre du gouvernement qui prendra la décision de mettre fin – ou pas – aux contrôles aux frontières intérieures de la France aura donc une lourde responsabilité.
Paul Tormenen
3 réponses à “Les contrôles aux frontières de la France bientôt supprimés ?”
Que chaque membre de toutes ces associations véreuses en prenne quelques « migrants » chez lui pendant un moment et assure leur subsistance on verra après. C’est bien d’être généreux avec l’argent des autres.
Quand les associations cesseront-elles de dicter les lois dans de pays ? Il y a des élus et des administrations mandatées pour cela.
Rien à déclarer ? Circulez !