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Gastronomie de Pâques. A la découverte du « casatiello » et de quelques traditions italiennes

Dans cette chronique hebdomadaire, je vous proposerai des recettes originales et historiques, réconciliant ainsi deux aspects de ma personne, celle d’historien et celle patron de bistrot. Elles seront faciles à réaliser mais surtout liées à l’histoire d’un territoire ou de grands hommes. La gastronomie traditionnelle raconte une terre, des traditions, elle s’inscrit donc dans l’idée d’un combat identitaire, soulignant les diversités qui nous sont chères d’une région à une autre, écologique, travaillant des produits locaux et de saison, et éthique, réduisant au maximum le gaspillage et s’opposant au modèle uniformisé du fast food.

Pâques approche, j’ai donc décidé de vous faire partager quelques unes des traditions culinaires italiennes qui se préparent pour la célébration de la résurrection du Christ. L’Italie bien que souffrant certainement autant que la France d’une crise de la foi, maintient pourtant intacte ses traditions culinaires. Elles sont bien sûr différentes du nord au sud de la Péninsule mais on y retrouve presque toujours les mêmes ingrédients étant soit de saison soit hautement symboliques. Les stars des tables pascales sont évidemment les œufs, symbole de résurrection, l’agneau, symbole de l’innocence et les sucreries pour compenser les privations du carême. Je ne manquerai tout de même pas de vous donner une recette dont les Napolitains ne peuvent se passer, le « casatiello ».

Pâques en Italie, quelques traditions gastronomiques

Commençons par le réveil, les cloches sonnent, c’est le matin de Pâques ! Si vous êtes à Rome ou en général dans l’Italie centrale, vous démarrerez votre journée par la « colazione di Pasqua », un petit déjeuner de champion composé de saucisson appelé La Corallina, saucisse sèche composée de 3/4 de maigre et ¼ de gras coupé en dés. Il sera servi sur de la « pizza di Pasqua » au fromage, un genre de cake salé où l’on a ajouté du fromage pecorino à l’appareil avant de la cuire. On passera ensuite à l’œuf dur souvent décoré par les enfants de la maison. On ne pourra pas se passer de l’omelette aux artichauts, très cuite comme les Tortillas espagnoles, elle est réalisée dans une poêle où l’on aura précédemment fait sauter des artichauts frais. Finalement, avant de passer au chocolat et boire un bon capuccino, si vous êtes fan des abats, vous ne pourrez pas vous passer de la « Coratella » d’agneau aux artichauts , un ragout de cœur, poumon, trachée et foie d’agneau mijoté pendant quelques heures dont je vous épargnerais la recette. Une fois terminé votre petit déjeuner vous pourrez vous rendre à la messe et prier pour digérer avant le déjeuner car ce n’est qu’un début.

Passons au déjeuner, vous êtes en Ligurie, en entrée, vous trouverez la fameuse « torta pasqualina », une tourte de pâte feuilletée remplie d’herbes fraiches, de ricotta et d’épinard. Au centre de la tourte sont placés des œufs de cailles. Toujours en entrée, vous gouterez bien aussi les fameux « Ovi e sparasi » de Vénitie, ou des œufs durs émincés recouvrent des asperges bouillies. Les asperges blanches sont la spécialité de Trévise et de Vincenza. Elles y sont cultivées depuis les temps antiques. Traditionnellement vertes, étant récoltées après que la plante soit sortie de terre, il semble que c’est à la suite d’une tempête de grêle au XVème siècle qui aurait ravagée les champs d’asperge que les paysans de désespoir aurait cueillis ce qui restait de ces dernières sous terre. Ainsi serait née la tradition de l’asperge blanche du Veneto.

Nous changeons encore de région pour le « primo », nous commencerons par les « Ravioli del plin » de Turin. Remplis soit de viande, soit de ricotta, ce ravioli prend sont nom du mode de fermeture, il est « pincé », « Plin » en dialecte du piémont. Une fois cuits dans l’eau salée, ils sont sautés à la poêle dans le jus du rôti que vous dégusterez ensuite. Si vous préférez le riz aux pâtes, vous pourrez choisir de retourner en Vénitie pour un risotto aux asperges ou un risotto au houblon sauvage (les Bruscandoli). Passons maintenant au plat principal et là tout le monde est d’accord du nord au sud, de l’est à l’ouest, le roi de la table pascale est l’agneau. A Rome, il sera cuit au four avec de du thym, du romarin, de l’ail et accompagnées de pommes de terres et de chicorée cuite. En Sardaigne, il sera « in umido », c’est-à-dire en ragout, l’agneau sera rissolé avec des herbes, de l’ail, des câpres et des olives puis déglacé au vin rouge avant de mijoter des heures dans un bouillon auquel on ajoute du concentré de tomates. Enfin si vous êtes dans les Abruzzes, votre agneau vous sera servi « cacio e ova », littéralement avec des œufs et du fromages. Là encore l’agneau est d’abord saisis avec des herbes aromatiques et de l’ail puis déglacé et cuit dans un bouillon. Au moment de servir, des œufs sont battus avec du pecorino, le fameux fromage de brebis omniprésent dans toute l’Italie centrale. Le mélange est alors incorporé au bouillon chaud et servis avec la viande.

Enfin pour le dessert, nous irons d’abord à Milan où dans les années 30, les frères Motta, connus pour leur « Panetone » de Noël , trouvèrent le moyen d’utiliser leurs machines toute l’année en revisitant un dessert traditionnel et en lui donnant la forme d’une colombe symbole de paix. « La Colomba », sorte de cake recouvert de sucre glace, peupla dès lors les tables. Pourtant, la colombe malgré tout ne réussit pas à détrôner la fameuse « Pastiera » napolitaine, reine incontestée des desserts de Pâques. Cette tarte a pour base une pate brisée. Elle est cuite dans un moule à bord haut et remplie d’un mélange de ricotta, de blé cuit dans le lait, de sucre et de fleur d’oranger. Le légende veut que la sirène Parthénope se reposait et fredonnait de douces mélodies un jour couchée non loin du Vésuve. Les habitants pour rendre hommage à la beauté de ses chants lui offrir du blé, du lait, des fleur d’oranger et de la ricotta. Elle-même fit don de ces présents aux dieux qui mélangeant le tout obtinrent la Pastiera. On raconte aussi que la Pastiera est si bonne que Marie-Thérèse d’Hasbourg, deuxième épouse de Ferdinand II de Bourbon, connue pour ne jamais sourire aurait failli à sa réputation après avoir gouté ce dessert.

Les Italiens disent « Natale con le Tuoi, Pasqua con chi vuoi », qui se traduit de la manière suivante, Noël avec la famille et Pâques avec qui tu veux, entendre avec les amis. Cela vaut en particulier pour le lundi de Pâques, « Pasquetta » en Italien, ce jour là comme pour fêter la fin du carêmes, l’arrivée du printemps et pour finir les restes, s’organisent des fêtes entre amis, pic-nic et autres barbecue, qui sont adorés par les Italiens.

Il est un plat dont je ne vous ai pas encore parlé. Il est préparé pour rompre le jeun du carême le dimanche matin mais il est indispensable qu’il en reste pour « Pasquetta » pour grignoter en attendant que la braise soit prête et ce sera notre recette du jour, le « Casatiello » napolitain. Une brioche salée dont la forme rappelle la couronne d’épine du Christ et où les cuisinière napolitaines venaient placer tout les ingrédients les plus riches pour elles afin d’en célébrer la résurrection.

Le casatiello, sa recette

Ingrédients :

Un moule à savarin de 24cm de diamètre

Pour la pate : 375 gr d’eau, 650 gr de farine, 10gr de levure de bière fraiche, 15 gr de sel, gras de porc 25gr (sinon beurre), Huile d’olive 25gr.

Pour la farce : 120gr de Saucisse sèche, 150gr de Pecorino, 4 œufs. (certaines recettes ajoutent lard, mortadelle, fromages variés)

Vous commencerez par la pâte en délayant la levure dans de l’eau tiède, on y ajoute le gras de porc et l’huile puis peu à peu la farine et le sel. La pate obtenue sera souple mais pas trop. Une fois bien travaillée faites en une boule que vous laisserez reposer le temps de préparer la farce. La saucisse sèche doit être privée de sa peau et coupée en dès. Faites de même avec le Pecorino. Prélevez environ 80 grammes de votre pâte, cela servira pour faire la décoration de votre Casatiello. Prenez le restant de votre pate et aplatissez là légèrement avec les mains. Versez dessus votre saucisse et votre fromage. Refermez votre pate et commencez à la pétrir jusqu’à ce que tous les éléments de la farce soient incorporés à la pate. Créez alors un boudin de la longueur nécessaire à faire le tour d’un moule à savarin et déposez-le. N’oubliez pas éventuellement de fariner votre moule. Placez ensuite vos œufs verticalement en prenant soin de les enfoncer légèrement. Ils doivent former les quatre points cardinaux. Reprenez les 80 grammes de pâte que vous aviez réservé et formé 8 petites languettes que vous placerez en croix deux à deux sur le sommet de chaque œuf venant ainsi former une cage. Regardez la photo illustrant cet article, ce sera plus clair. Une fois terminé le montage, laissez reposer votre casatiello pendant une heure trente afin que la levure pousse. Il devrait doubler de volume. Préchauffez votre four à 200 degrés, avant de l’enfournez, passez votre casatiello au jaune d’œuf afin de lui donner une belle coloration. Cuisez 45 minutes à 180 degrés en contrôlant dès 30 minutes la cuisson car elle peut évidemment varier d’un four à l’autre. Laissez reposer une heure avant de gouter, il peut se manger tiède ou froid et se conserve pendant plusieurs jours.

Joyeuses Pâques à tous !

Pierre d’Her

Gastronomie. Il Cùscusu alla trapanese au menu ce dimanche midi

Crédit photo : DR
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