Le collectif « Pour que vivent nos langues » (régionales) a envoyé un questionnaire aux candidats à la présidentielle concernant leur projet en faveur des langues régionales. Yannick Jadot, le candidat EELV a été parmi l’un des premiers à répondre. Son texte en intégralité, rédigé dans une écriture inclusive à vous couper toute envie de le lire (et pas respectueuse, pour le coup, de la langue française) :
Pour que Vivent nos Langues/ La censure partielle de la loi Molac en mai 2021 a montré que l’interprétation faite par le Conseil constitutionnel des articles 2 et 75-1 de la Constitution pouvait entraver le développement des langues régionales tel que souhaité
par une grande partie de la population et des élus. Si vous êtes élu, proposerez-vous une révision de la Constitution en faveur des langues régionales ? Si oui, quelle(s) modification(s) proposerez-vous, et à quelle échéance ?
Yannick Jadot / Le premier alinéa de l’article 2 de la Constitution « la langue de la République est le français » est un ajout assez récent (1992) à l’article tel qu’il avait été rédigé initialement en 1946. En ajoutant la langue française aux signes identitaires fondamentaux de la République (drapeau, hymne, devise), il était motivé par la volonté de se préserver d’une langue invasive, l’anglais, et les débats précédant son adoption avaient rejeté toute interprétation au
détriment des langues régionales.
Or c’est exactement le contraire qui s’est passé : l’anglais n’a jamais été aussi prégnant sur le territoire français, tandis que les langues régionales sont depuis les victimes régulières de décisions prises contre elles au nom
de cet ajout constitutionnel. Contre l’uniformisation culturelle, nous défendrons la reconnaissance des
langues régionales par la ratification de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires dans sa formule plus ambitieuse, et la coofficialisation des langues régionales et de la langue des signes française
(LSF), pour permettre l’égalité en droit des langues et de leurs locuteur.ice.s. Les langues régionales sont essentielles pour la préservation et la vitalité des expressions qui participent à la richesse culturelle des territoires de notre
République. L’enseignement bilingue et immersif des langues régionales sera soutenu et encouragé, en particulier dans les écoles publiques, et le rôle de service public des réseaux associatifs pleinement reconnu. Nous intensifierons les formations aux métiers de traducteur.trices en outre-mer et créerons des postes de médiateur.trices linguistiques, une fonction au croisement de l’interprétariat et de l’accompagnement social des personnes isolées par des difficultés de maîtrise du français et en situation de non-recours à leurs droits. Une réforme de la Constitution sera indispensable pour construire ce chemin. L’article 75-1 – « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France » – a été adopté lors de la révision constitutionnelle de 2008 avec l’intention manifeste de préserver ces langues des effets pervers de la modification de l’article 2 survenue en 1992. La récente décision du Conseil Constitutionnel montre que cela est très insuffisant. Je m’engage donc à renforcer cet article lors d’une réforme constitutionnelle qui, comme l’ont montré les votes survenus en faveur de la loi Molac, est en mesure de
recueillir un large consensus au Parlement, y compris face à l’exigence d’une majorité des 3/5èmes du Congrès pour son adoption. Sa formulation est à finaliser avec des constitutionnalistes. Elle pourrait consister en un ajout : « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ; leur transmission est favorisée par l’enseignement, y compris immersif, et par tout autre moyen décidé par la loi ».
2. Actuellement l’enseignement des langues régionales souffre de l’insuffisance de moyens dédiés, de l’oubli de ses spécificités lors des réformes successives, de la mise en concurrence de ces langues avec d’autres enseignements. Leur transmission est ainsi gravement compromise.
Si vous êtes élu, mettrez -vous en place un statut et des moyens spécifiques pour les langues régionales dans l’enseignement ?
La dernière réforme intervenue -la réforme du baccalauréat et du lycée de Jean Michel Blanquer- a accru dramatiquement les difficultés rencontrées par les langues régionales dans l’Education Nationale. Nous la remettrons en cause.
Il faut bien sûr proscrire la mise en concurrence de l’enseignement des langues régionales avec d’autres enseignements. Et chaque réforme à venir du système éducatif devra veiller à ne pas compromettre leur place dans
l’école.
Au plan des moyens, le futur Ministre de l’Education Nationale recevra des instructions pour généraliser l’offre d’enseignement de ces langues et dans ces langues. Leur promotion se fera en lien avec les autorités territoriales
concernées. Par ailleurs, les régions ou collectivités qui le souhaitent pourront devenir co-responsables de l’enseignement de et dans ces langues. Nous voulons une reconnaissance des langues ultramarines comme langue maternelle ou co-maternelle, y compris dans l’éducation nationale.
3. De manière générale, la préservation des langues régionales est tributaire de leur usage régulier et de leur réappropriation dans la vie publique. Des modalités spécifiques permettraient leur utilisation généralisée dans notre société avec le français, langue commune de la République, là où elles sont en usage, pouvant aller jusqu’à un statut de co-officialité dans les territoires qui le demanderaient.
Quelle est votre position par rapport à cette reconnaissance ? Si vous y êtes favorable, quelles mesures mettrez-vous en place pour y parvenir ?
L’approche juridique a son rôle à jouer pour la préservation des langues régionales, et la co-officialité en fait partie.
Je remarque qu’en Allemagne la minorité danoise bénéfice de la reconnaissance officielle de sa langue, à côté de la langue allemande, sur la partie du land de Schleswing Holstein où elle réside, qu’il en est de même pour les flamands, les germanophones et les wallons en Belgique, qu’au Luxembourg, le luxembourgeois est aussi langue officielle à côté du français et de l’allemand, qu’en Suisse quatre langues (français, italien, allemand et
romanche) cohabitent depuis des siècles, que le français est langue officielle au Val d’Aoste en Italie ou le basque au Pays Basque en Espagne : la France a tout autour d’elles de multiples exemples qui montrent qu’une langue régionale peut parfaitement être officielle sur son territoire.
Chaque fois qu’un territoire le demandera, je ferai en sorte qu’il soit possible d’y répondre favorablement.
4. L’ambition de l’Europe est d’être un territoire de paix, de respect de la diversité, de créativité et de droit commun comme le rappelle l’article 2 des traités européens. En complément de la modification de la Constitution en France, ferez-vous ratifier, dans le respect des droits fondamentaux et sans clause interprétative, la Charte du Conseil de l’Europe sur les langues régionales ou minoritaires de 1992, signée par la France mais toujours pas ratifiée ?
L’état de droit est une question centrale en Europe, et elle fait l’objet d’un devoir de vigilance qui ne souffre aucune exception. Dès l’instant qu’un texte européen figure dans le « paquet » des critères de Copenhague et que son adoption conditionne l’adhésion d’un pays à l’Union Européenne, il doit s’appliquer dans tous les pays de l’Union, y compris en France. C’est le cas de la Charte du Conseil de l’Europe sur les langues régionales ou minoritaires que nous ratifierons dans sa forme plus ambitieuse. Cela affaiblit notre position chaque fois que nous parlons d’état de droit, avec la Pologne ou la Hongrie par exemple.
5. Actuellement l’article 312-10 du Code de l’Éducation issu de la loi d’orientation de 2013 n’est pas respecté par les services du Ministère de l’Éducation nationale et ces mêmes services ne souhaitent pas la mise en oeuvre de l’article 312-11-2 issu de la récente loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion qui stipule que « la langue régionale est une matière enseignée dans le cadre de l’horaire normal des écoles maternelles et élémentaires, des collèges et des lycées sur tout ou partie des territoires concernés, dans le but de proposer l’enseignement de la langue régionale à tous les élèves”.
Ferez-vous respecter ces deux articles de loi pour que l’enseignement de la langue régionale soit effectivement « favorisé » et « proposé » « à tous les élèves » dans les territoires concernés ? Ferez-vous en sorte, avec les moyens nécessaires, que tous les rectorats et régions concernés mettent en oeuvre les conventions prévues par la loi pour le développement de cette offre généralisée ?
Cette loi nous l’avons soutenue et votée. Notre groupe au Sénat a pris une grande part dans son adoption grâce notamment à Monique De Marco qui en a été rapportrice. Nous ferons bien sûr tout pour qu’elle soit appliquée
strictement.
6. Le Ministère de la Culture a aussi un rôle indispensable pour l’avenir de nos langues et leur contribution à la richesse et à la diversité culturelle de la France. Mais actuellement faute d’un budget dédié suffisant ce rôle reste
très limité. Prendrez-vous les décisions nécessaires pour que les moyens financiers et humains en faveur des langues dites régionales soient augmentés afin qu’ils soient plus en rapport avec leurs besoins et les enjeux qu’elles représentent ?
La production culturelle en France doit beaucoup aux cultures régionales qui ont une force et une dynamique propre. Le Ministère de la Culture est aussi leur ministère ! Pour les écologistes la culture est au centre de leur projet de société, et, pour les cultures régionales, nous ferons en sorte de dégager les moyens nécessaires à leur épanouissement. Chaque culture spécifique est féconde pour toutes les autres formes d’expression culturelle. La diversité culturelle est un bien commun qu’il faut impérativement préserver !
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Une réponse à “Yannick Jadot et les langues régionales : Oui à la ratification, oui à la co-officialité”
personne ne veut réformer l’orthographe du français actuel, contrairement aux allemands, espagnols, et turcs; au moins en supprimant les doubles consonnes (imbécile et imbécillité) , en choisissant an/en mais pas les deux etc. alors que certains veulent encore la copliquer avec cette anerie d’écriture inclusive