Et de huit ! Dans « l’affaire Steve », la noyade d’un jeune homme au cours de la Nuit de la Musique 2019 à Nantes, le procureur de Rennes vient de mettre en examen Claude d’Harcourt, ancien préfet de Loire-Atlantique. Il avait déjà mis en cause, parmi les responsables en poste à l’époque des faits, le directeur de cabinet, un commissaire de police, le directeur départemental adjoint de la sécurité publique, Johanna Rolland, maire de Nantes, Gilles Nicolas, adjoint au maire de Nantes chargé de la sécurité, la ville de Nantes et Nantes Métropole. Les deux premiers ont été mis en examen, les cinq autres placés sous statut de témoin assisté.
Entre les deux statuts, il y a une différence de degré mais non de nature : une « présomption plus forte de culpabilité » pèse sur le mis en examen, explique le gouvernement(1). Ni l’un ni l’autre n’est donc présumé innocent… La seule différence pratique est que le témoin assisté ne peut être mis en détention ou placé sous contrôle judiciaire. Personne ne l’est dans cette affaire.
Cette mise en examen est la suite logique des précédentes : la procédure suit son cours. « L’enquête a été particulièrement lente », souligne Le Monde. Grâce à cette lenteur, la mise en cause de Johanna Rolland est arrivée au moment le moins gênant possible. À ce rythme, il est peu probable qu’un renvoi devant le tribunal correctionnel soit prononcé avant l’élection présidentielle, voire avant les élections législatives de 2022.
Deux messages subliminaux du procureur
Sage précaution si l’on considère les frustrations que laissera sûrement l’affaire. Car l’enquête n’a pas permis de déterminer dans quelles circonstances exactes Steve Maia Caniço est tombé à l’eau. Philippe Astruc, procureur de Rennes, semble désireux de préparer les esprits à une issue décevante.
La chute de Steve se situe « dans le temps de l’intervention de la police » a-t-il noté voici peu. Il y avait là un message subliminal, rarement relevé : concomitance (« dans le temps ») ne signifie pas causalité. Un second message subliminal a été encore moins remarqué : d’après un témoignage, la chute a eu lieu « dans la zone dépourvue de barrière ». Autrement dit, elle aurait un rapport avec l’absence de protection – ce qui engagerait la responsabilité de Nantes et de sa maire.
(1) On lit parfois, comme dans Presse Océan ce vendredi, qu’un témoin assisté est une « personne qui est mise en cause au cours d’une instruction judiciaire, mais à qui il n’est pas directement reproché la commission d’une infraction ». Bien qu’elle provienne d’un site gouvernemental, cette définition est dangereusement imprécise. Le statut de témoin assisté est défini par les articles 113-1 à 113-8 du code de procédure pénale. Le témoin assisté est nommément visé par un réquisitoire.
Crédit photo : le quai Wilson, lieu du drame, photo BI, droits réservés
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Une réponse à “Affaire Steve à Nantes : l’ancien préfet mis en examen, un éventuel procès encore lointain”
« Le préfet est nommé en conseil des ministres, par décret du Président de la République, sur proposition du Premier ministre et du ministre de l’Intérieur. Il est un haut fonctionnaire qui relève, pour sa gestion, du ministère de l’Intérieur mais représente l’ensemble des ministres dans le département. »
Il serait donc logique que tous ces élus, à commencer par le Président de la République, soit sinon mis en examen mais à tout le moins cités comme témoin assisté. Non ?