La lanceuse d’alerte de l’affaire du Médiator vient-elle de remporter une deuxième victoire contre « l’industrie » médicale ? La publication le 3 octobre de sa tribune dans le Monde a en tout cas déjà provoqué des remous : 4 jours plus tard, le professeur Guy Vallancien remettait sa démission au président de la commission, le sociologue Gérald Bronner.
Toute en nuance sur la forme, la tribune de la pneumologue de Brest avait en effet mis les pieds dans le plat sur le fond :
« Le professeur Guy Vallancien (…) a été un des fers de lance d’une nébuleuse de médecins de haut rang, professeurs de médecine qui, depuis des années et sans vergogne, tentent de discéditer, minimiser, voire nier la gravité du drame humain causé par le Mediator« .
Au-delà du cas Vallancien , c’est toute la démarche de la commission Bronner qui inspire à Irène Frachon une critique voilée :
« S’il est incontestable que, parallèlement à la pandémie de Covid-19, se développe une « épidémie » de doutes profonds et de défiances multiples au sein de l’opinion publique avec un succès croissant de théories alternatives aux relents complotistes, les moyens mis en œuvre pour mieux appréhender et peut-être corriger, apaiser un tel phénomène de fond interrogent sérieusement (…) il est à craindre qu’une telle commission, dont l’un des membres s’est abîmé, non seulement n’apporte aucune réponse raisonnable et raisonnée à la problématique soulevée, mais creuse un peu plus le fossé entre beaucoup de nos concitoyens et les élites qu’ils critiquent, à tort ou parfois à raison ».
Elle rappelle les conditions dans laquelle s’est développée l’hécatombe du Mediator :
» Le scandale du Mediator est la conséquence d’un délit industriel d’une gravité hors-norme ayant donné lieu à des condamnations (…) d’une part de la firme Servier, d’autre part de l’Agence de sécurité des médicaments. Des experts de l’agence, compromis par des arrangements illégaux avec la firme délinquante, ont également été condamnés. Par ailleurs, le rapport pénal d’expertise scientifique a conclu que le Mediator, consommé par environ 55 millions de Français pendant 33 ans, est la cause directe de la mort ou de l’invalidité de milliers de personnes. »
Quel que soit le degré d’implication légale des acteurs, la catastrophe n’est pas arrivée toute seule :
» Ainsi, alors que la justice a condamné une « tromperie » (de l’industriel), une « négligence » (des autorités de santé), des prises illégales d’intérêts (d’experts), l’addition de tous ces éléments permet d’employer le terme de « complot avéré », au sens où l’entend l’anthropologue Didier Fassin (…) » Citant ce dernier, elle enfonce le clou : « On peut donc parler de véritables conspirations conduites par des capitaines d’industrie sans scrupule, des politiciens corrompus et des chercheurs vénaux dont les actes ne sont pas seulement des violations de la loi mais aussi des pratiques criminelles (…) »
Ce que veut faire comprendre Irène Frachon entre les lignes, c’est qu’elle-même aurait pu être taxée de complotisme à l’époque du Mediator. Sa voix en faveur des victimes aurait été efficacement étouffée si le ministère de la Vérité conçu par le président Macron avait déjà existé.
A.T.
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