Après les pénuries d’épices, de laines ou de silicium, un engrenage de facteurs touche de plein fouet le marché des oléagineux et notamment des huiles alimentaires. Le prix du colza, mais aussi du tournesol et de l’huile de palme, utilisés dans l’industrie agroalimentaire, flambe.
Du côté du colza, dont les prix ont dépassé les 600 euros la tonne, la hausse des cours est liée à un effondrement de 30% de la production du canola (colza OGM) au Canada, principal exportateur mondial.
Le soja connaît lui aussi des tensions à cause de mouvements sociaux en Argentine, qui y réduisent les exportations d’huiles et de tourteaux, et de la demande chinoise – le cheptel porcin a été reconstitué et en 2020, la Chine a importé 60% du soja dans le monde. Par ailleurs le Covid et les problèmes logistiques ont impacté la récolte en Inde, quant au Brésil, il n’a pas séparé le soja OGM du non OGM pour mieux satisfaire l’ogre chinois. Les cours du soja ont augmenté de 80% depuis 2014 et ceux du tournesol de 90%, quant au soja non OGM, il était en pénurie encore début 2021.
Par ailleurs la récolte de tournesol est faible et tardive, alors que les stocks sont bas. En Ukraine, très gros exportateur (seuls 7% de la récolte reste dans le pays), les surfaces ensemencées étaient doublées par rapport à l’ordinaire, mais la productivité a reculé de 20%, annonçait la presse locale spécialisée fin septembre. L’on apprend désormais que le mildiou et des parasites ont touché de 3 à 48% des récoltes dans les diverses régions d’Ukraine, ce qui provoque localement une forte hausse des prix du tournesol et de l’huile qui en est tirée.
Du fait de la hausse des cours, la Russie voisine a mis en place une taxe d’exportation flottante sur l’exportation de graines ou d’huile de tournesol, taxe qui vient d’augmenter de moitié au 1er juillet – la Russie a mis en place ce mécanisme pour limiter l’export, garantir l’approvisionnement de son industrie agro-alimentaire et surtout stabiliser les prix sur le marché intérieur après une hausse de 23% de l’huile de tournesol en 2020.
En Asie du Sud-Est, la production d’huile de palme s’est elle aussi effondrée, non pas faute de ressources, mais du fait d’une crise de main d’œuvre partie pour se prolonger jusqu’en hiver 2022 pour la Malaisie notamment. A ces problèmes de main d’œuvre s’ajoutent des étranglements logistiques en Chine, du fait d’une reprise désordonnée.
L’UE et des producteurs français paient le Maroc pour quadrupler sa production d’oléagineux
Les analystes agricoles se divisent quant aux pronostics sur la hausse des prix mais semblent s’accorder sur le fait que la pénurie d’huiles sur le marché mondial restera vive jusqu’en janvier-février 2022. Dans cette optique, le Maroc envisage de quadrupler sa production d’oléagineux d’ici 2030, notamment grâce au programme Maghreb Oléagineux financé à 80% par l’Union européenne.
Ce programme a été initié par l’interprofession française des huiles et protéines végétales, Terres Univia, pour augmenter sensiblement les productions de colza et tournesol au Maroc et en Tunisie. L’objectif est d’atteindre 85.000 hectares de tournesol et 42.000 de colza au Maroc, pour un investissement de 46 millions de dollars, de façon à satisfaire au moins 10% du marché intérieur contre moins de 2% en 2019.
Le programme Maghreb Oléagineux concerne aussi la Tunisie, où les surfaces emblavées en colza ont triplé depuis 2014 : « en Tunisie, les perspectives de développement de la production de colza sont très positives avec un une évolution des surfaces passant de 463 hectares en 2014/2015 à 12 600 hectares emblavés en 2019/2020, soit un taux de croissance annuel moyen de près de 100% (Carthage Grains). Le rendement moyen est quant à lui passé de 13.2q/ha en 2014/2015 à 17.8 q/ha en 2018/2019 (avec un rendement maximal de 35.5q/ha en 2018/2019) ». Néanmoins la Tunisie importe encore à 95% les oléagineux qui lui sont nécessaires.
Louis-Benoît Greffe
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Une réponse à “Colza, tournesol, huile de palme : vers une pénurie d’oléagineux ?”
ces derniers temps il se dit qu’il y a pénurie de tout, bois, matériaux, huiles etc.
on va se rendre compte que la hausse des prix va être de 15 à 20 %