Dans le monde contemporain, les décisions prises par les États et les organisations internationales ont très souvent un effet domino sur le scénario géopolitique. Les conséquences d’une seule manœuvre se manifestent dans de nombreux pays en même temps, dans un flux constant d’effets et de réflexes.
Dans le cas de l’Afghanistan, il n’en a pas été autrement. Au retrait des troupes américaines a succédé l’augmentation exponentielle de la menace terroriste, non seulement en Afghanistan même, mais aussi dans tous les autres pays d’Asie centrale, les organisations terroristes islamistes cherchant à nuire directement à la Russie, dont l’objectif (de plus en plus incertain) est de maintenir une influence sur les anciennes républiques soviétiques.
Les analystes occidentaux, après l’annonce par Washington du retrait des troupes, ont immédiatement mis en garde contre les dangers d’une progression du terrorisme en Afghanistan. Pour les experts occidentaux, c’est la présence américaine qui a empêché la prise de Kaboul par les différentes milices terroristes opérant dans le pays et, avec la fin de cette présence, l’Etat afghan ne serait pas en mesure de contenir la progression du terrorisme et succomberait à l’ennemi.
Cependant, le facteur taliban a été ignoré. Alors que ce groupe a toujours été reconnu comme le plus fort sur le sol afghan, la victoire rapide et immédiate a surpris toutes les parties. En effet, Washington n’aurait pas pu imaginer qu’il verrait les Talibans s’emparer de Kaboul avant même que le retrait des troupes ne soit achevé. Cela a généré un scénario différent de celui pensé précédemment. Bien que l’Afghanistan soit en guerre et que plusieurs groupes terroristes s’affrontent dans le pays, la suprématie des Talibans est absolue et c’est ce groupe qui gouverne réellement à Kaboul, la force des autres milices étant absolument insuffisante pour changer ce scénario.
Incapables de vaincre les talibans, les autres organisations terroristes ont de plus en plus migré vers les pays voisins d’Asie centrale. La tactique de ces groupes consiste simplement à gagner de l’espace, en formant de plus en plus de bases et en permettant ainsi une expansion de leurs activités dans cette région. En ce sens, le Turkménistan, le Tadjikistan, le Kirghizistan, l’Ouzbékistan et le Kazakhstan sont devenus les cibles de plusieurs organisations terroristes originaires d’Afghanistan. Il en résulte une propagation constante du chaos dans le sous-continent d’Asie centrale, ce qui mine les gouvernements locaux et les possibilités de coopération internationale entre ces pays et d’autres États.
Parallèlement, les organisations préexistantes dans ces pays ont commencé à dynamiser leurs activités à partir du moment où elles ont commencé à recevoir des terroristes afghans en « renfort » de leurs troupes. Le Mouvement islamique d’Ouzbékistan (IMU) et le Mouvement islamique du Turkestan oriental (ETIM) ont connu une croissance exponentielle au cours des derniers mois. Ces organisations ont des liens historiques avec les talibans, avec un soutien mutuel et une coopération militaire et financière. Cependant, contrairement à ces groupes, les talibans ont eu du mal à adopter une position plus « douce » pour justifier leur domination à Kaboul ces derniers temps, ce qui a sapé l’alliance et généré des frictions. Les Talibans ont récemment promis à Pékin de réprimer les actes contraires à la souveraineté chinoise et de ne pas soutenir les actions des terroristes ouïghours, comme c’est le cas pour l’ETIM.
Dans le même ordre d’idées, l’IMU a décliné ses relations avec les talibans depuis les années 1990, lorsqu’il a mené des raids sur le sol afghan pendant le gouvernement taliban. En 2015, le groupe a conclu une alliance avec ISIS et les liens ont été complètement rompus, les Talibans et l’IMU étant aujourd’hui des organisations ennemies. En outre, d’autres milices locales affiliées à l’ISIS ont intensifié leur violence au cours des dernières manœuvres, formant ainsi un vaste réseau international d’organisations extrémistes qui travaillent ensemble contre tous les gouvernements d’Asie centrale – y compris les Talibans, qui sont aujourd’hui le gouvernement de facto de Kaboul.
Rendant la crise sécuritaire dans la région encore plus tendue, les talibans eux-mêmes ont tendance à « internationaliser » leurs actions à mesure que leurs ennemis construisent davantage de bases à l’étranger. Il est donc possible que, dans un avenir proche, les talibans effectuent des raids dans d’autres pays d’Asie centrale dans le but d’essayer de neutraliser les bases ennemies.
Il y a actuellement une grande instabilité dans laquelle toutes les parties tentent de se protéger. La Russie tente depuis des décennies de consolider une politique d’influence sur l’espace de l’Asie centrale qui appartenait à l’Union soviétique, et cela a été raisonnablement réussi, mais maintenant, il y a une menace frontale. Avec les nombreux conflits qui surgissent dans la région, la Russie ne pourra maintenir son influence que si elle participe activement à assurer la sécurité des pays victimes de la violence. Mais pour cela, elle devra affronter d’autres intérêts extérieurs, comme le projet de Washington – soutenu par la Turquie – de créer des bases militaires en Asie centrale pour combattre les terroristes.
La Chine cherche également à avoir de l’influence dans la région en garantissant le maintien de la paix. Outre les négociations avec les talibans, Pékin a encouragé les manœuvres militaires en préparation des conflits, comme les récents exercices avec le Tadjikistan. Une coalition de forces entre Moscou, Pékin et les talibans pourrait empêcher certaines conséquences désastreuses dans la région, mais il n’est dans l’intérêt d’aucune des parties que les talibans s’étendent au-delà de l’Afghanistan, de sorte que dans un éventuel accord, les talibans devraient accepter de ne pas mener d’incursions à l’étranger.
La seule certitude que nous avons est que les tensions en Asie centrale sont loin d’être apaisées…
Lucas Leiroz (Infobrics, traduction breizh-info.com)
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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Une réponse à “Géopolitique. La menace terroriste islamiste s’étend en Asie centrale”
ils n’iront pas en chine, où le coran intégral n’est pas autorisé, seuls les corans épurés des versets assassins sont édités
il nous reste à nous faire coloniser pour être protégés