On parle toujours des « grandes » listes, rarement des « petites ». Pourtant leur participation au scrutin représente souvent un exploit militant puisque il faut trouver 93 volontaires pour présenter une liste aux élections régionales en Bretagne (4).
À ces élections régionales, on a pu observer que les régionalistes étaient présents sur la plupart des listes ( sauf Lutte ouvrière, LFI et RN). Quelques exemples : Christain Troadec et Paul Molac sur celle de Loïg Chesnais-Girard, Stéphanie Stoll sur celle de Christian Burlot, Marc Le Fur et Caroline Ollivro sur celle de Isabelle Le Callenec… Mais, au premier tour, on trouvait une liste de régionalistes « hors parti hexagonal », des « purs jus » ; cette liste dénommée « Bretagne responsable » était conduite par Joannic Martin et constituée de militants du Parti breton. Au programme, une idée bizarre puisque n’entrant pas dans les compétences du conseil régional : la création d’une police régionale (Ouest-France, Bretagne, lundi 14 juin 2021). Mais une observation réaliste : « Ce sera une campagne modeste, sans paillettes ». Pour des raisons économiques – « Nous n’avons pas de parti à Paris pour aligner les fonds comme d’autres » (Ouest-France, Bretagne, lundi 20 mai 2021). Ainsi qu’une affirmation forte : « Le Parti breton ne s’adresse pas à des personnes de gauche, de droite ou des écologistes. Il s’adresse au peuple breton » (Le Télégramme, Bretagne, vendredi 2 avril 2021).
Notons que 13 193 électeurs (1,55%) étaient de cet avis. Rappelons qu’au premier tour des élections régionales de décembre 2015, le Parti breton avait présenté une liste baptisée « Notre chance, l’indépendance » conduite par Bertrand Deléon ; elle avait obtenue 6521 voix (0,54%). Le Parti breton peut donc se flatter d’avoir nettement progressé : 6 672 électeurs supplémentaires, malgré un taux d’abstention exceptionnellement élevé.
Bernard Morvan
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2 réponses à “Le Parti breton gagne de nouveaux électeurs”
C’était la seule liste véritablement bretonne, non contaminé par le francisme. Même si certains aspects de leur programme sont très consensuels, sur le fond il n’y avait guère d’autres alternatives pour la Bretagne…
Merci à Bernard Morvan pour avoir osé parler de ceux qu’on préfère passer sous silence, voire tenir pour quantité négligeable. Je lui reprocherais seulement de classer le Parti Breton parmi les partis « régionalistes », ce qui pour moi est un qualificatif un peu trop fade. Bien sûr, je respecte ceux qui pensent servir au mieux la Bretagne sous cette étiquette. Mais je pense qu’i y a lieu de passer à la vitesse supérieure quand on on a pris conscience, avec un peu de culture historique et de culture géopolitique, de l’ampleur de l’enjeu. La dernière « baffe » infligée aux Bretons par le Conseil Constitutionnel descendant en flammes la Loi Molac n’aura pas manqué de faire franchir à un bon nombre de nos compatriotes ce pas décisif : l’action militante dans un parti qui s’intitule « Parti Breton » ne vise pas, si les mots ont un sens, à solliciter des princes qui nous gouvernent, quelque adoucissement dans un centralisme qui, par ailleurs n’a pas grand’chose à voir avec la démocratie.
Non ! Il faut cesser d’entrer dans le jeu du mensonge officiel : la Bretagne n’est pas une « région » que sa situation périphérique défavorise et qui, de ce fait, pourrait prétendre à des mesures de soutien particulières. Par pitié, pas de misérabilisme !
La Bretagne est une fière nation qui n’a pas attendu la France pour exister en tant que telle. Son identité s’est forgée dans la lutte contre les Vikings, puis contre les Francs. Elle a réussi à maintenir son indépendance pendant sept siècles grâce à une politique de bascule entre deux voisins également avides de s’en emparer, la France et l’Angleterre. Les vicissitudes de l’Histoire ont voulu que ce soit la première qui l’emporte. C’est pas de chance !
Mais ce n’est pas un cas unique. c’est même le cas de très nombreux pays : la Suède a été, avec la Norvège, une province du Danemark, le Portugal a été une province d’Espagne et le serait peut-être encore si Richelieu ne lui était venu en aide au moment opportun, la Pologne a été rayée deux fois de la carte avant de renaître en 1919. La Finlande a été une province de la Suède avant d’être un Grand-Duché Russe avant d’accéder à l’indépendance, elle aussi en 1919. On pourrait facilement allonger la liste.
Et il n’y aurait que la France, proclamée « Une et Indivisible », qui, par décret divin, échapperait aux lois de la géopolitique ! Ce n’est pas sérieux.
La position d’un parti nationaliste sérieux – et je veux croire que le Parti Breton en est un – me paraît être celle-ci : arrêtons de nous raconter des histoires. La Bretagne, il faut le répéter, est une nation avec un long passé indépendant, une culture qui lui est propre, une langue, une mentalité spécifique. La Bretagne a, de ce fait, une identité clairement distincte. Ceci est un constat que peut faire tout observateur impartial et dépourvu de parti pris.
Ce constat étant établi, comment sortir de la situation absurde dans laquelle nous nous trouvons suite aux aléas de l’Histoire ? Faisons le pari que nous puissions trouver, dans l’autre camp, des interlocuteurs doués d’un minimum de bon sens. Essayons ensemble, en prenant le temps qu’il faudra, de trouver des solutions qui permettront de sauvegarder les intérêts vitaux des deux parties en évitant des affrontements qui ne profiteraient à personne.
En l’occurrence, les Français et les Bretons pourraient s’inspirer de la méthode suivie par les Féringiens et les Danois après la seconde guerre mondiale. Les premiers, habitant un archipel situé entre l’Ecosse et l’Islande, furent occupés (amicalement !) par les Britanniques après l’invasion du Danemark auquel ces îles appartenaient. Les Féringiens, pendant quatre ans, séparés de la « mère patrie », durent s’administrer eux-mêmes. Lorsque la « mère patrie » fut libérée, elle voulut revenir au statut « quo ante ». Les Féringiens, ayant fait l’expérience d’une autonomie qui leur était, pour ainsi dire, « tombée du ciel », avaient pu en constater les bienfaits, manifestèrent pacifiquement leur désaccord. Les Danois qui sont des gens pragmatiques et qui ne sont pas ligotés par les rêveries de l’Une et Indivisible, rêveries vieilles de plus de deux-cents ans, proposèrent aux Féringiens de rédiger un projet qui fut ensuite discuté entre les deux parties et qui aboutit à un transfert progressif de compétences et à un statut d’autonomie qui fonctionne toujours. Le succès a été tel que les Danois ont procédé de la même manière avec les Groenlandais qui jouissent d’un statut d’autonomie calqué sur celui des Féringiens et qui semble donner satisfaction aux deux partenaires.
Quand on a vécu la guerre d’Algérie, cette tragédie dont les séquelles se font encore sentir, on se dit quelle différence ! Quel contraste entre les deux manières de régler les conflits quand il y a d’un côté des gens qui ont les pieds sur terre et de l’autre des gens prisonniers d’idéologies surannées ou complètement coupées du réel !
Peut-on espérer qu’un jour les Français se réveillent de leurs rêves de grandeur, qu’ils cessent de se voir comme la lumière du monde et abordent les problèmes de façon terre-à-terre ?
Enfin, le Parti Breton semble prendre ce chemin. Souhaitons-lui « Bon vent » !
Marcel Texier