L’Abbé Yann-Vari Perrot, martyr de la Bretagne, aimerait sans doute reposer (enfin) en paix à Scrignac. Mais certains se complaisent à salir sa mémoire. Hier, nous évoquions la maladresse (ou la fake news ?) d’un journaliste du Télégramme parlant d’une « exécution pour connivence avec l’ennemi » concernant le sort funeste de l’Abbé Perrot.
Mais certains de nos lecteurs ont saisi l’occasion de nous rappeler également ce texte de Youenn Caouissin, auteur du livre « J’ai tant pleuré sur la Bretagne », véritable une mine d’informations tirées de sources directes sur la vie de l’Abbé Perrot. Livre qui est toujours en vente sur le site de nos confrères d’Ar Gedour.
Youenn Caouissin répond à un internaute lui adressant la question suivante : Apres avoir lu plusieurs publications sur l’assassinat de Yann Vari Perrot, et notamment le livre de Désiré Camus,ou celui-ci déclarait que c’était le BCRA (Bureau central de renseignements et d’action) qui l’avait fait assassiner pour ses relations avec les allemands. J’aimerais en savoir plus sur cette version, vrai ou fausse ?
Pendant des années, la Résistance gaulliste basée à Londres a été soupçonnée d’avoir joué un rôle dans l’assassinat du recteur de Scrignac. Le mieux pour avoir l’information exacte est de s’adresser directement aux personnes concernées.
Après la parution des ouvrages de l’historien Ronan Caerléon, notamment “Complot pour une République Bretonne”, le résistant intègre et catholique, Gilbert Renault (alias colonel Rémy) et le colonel A. Dewavrin (alias colonel Passy) membres très actifs de cette résistance, démentiront catégoriquement l’implication de leurs réseaux dans ce crime sacrilège.
En mars 1979, un anonyme se prétendant « ancien chef et liquidateur de réseaux section des Forces Françaises Libres », certifiera sur l’honneur qu’en juillet 1943 “il avait en main l’ordre du colonel Passy, chef du BCRA (Bureau central de renseignement et d’action), transmis par le service anglais de radio sur la France occupée, l’ordre d’abattre l’abbé Perrot de Scrignac, convaincu de collaboration active avec l’occupant”. Ronan Caerléon, ayant eu connaissance de ce document aussi curieux que douteux, le transmettra au colonel Remy. Le colonel Rémy répondra : « c’est un faux », et de s’expliquer dans une lettre :
« Le colonel Passy, n’a jamais donné d’ordre d’exécution, ce qui n’était pas dans sa nature ; en agissant de la sorte, il aurait contrevenu aux consignes formelles du général de Gaulle qui entendait que toute personne accusée de collaboration fût jugée par un tribunal régulier. S’il avait estimé devoir passer outre à ces consignes, ce n’est pas au moyen de la radio qu’il aurait donné un tel ordre, mais par un message chiffré, ne fût-ce que pour éviter d’alerter la personne désignée. Je puis vous affirmer qu’à Londres, nous ignorions, tout comme moi, le nom de l’abbé Perrot. J’ai eu maintes fois l’occasion de dénoncer des crimes et exactions de toute sorte commis sous le couvert de la résistance, différente en tout point de celle que j’ai pratiquée. Le meurtre de l’abbé Perrot ne peut être en aucune manière imputé aux Forces françaises libres dont j’ai eu l’honneur de faire partie » (extrait de la lettre du Colonel Rémy).
Le colonel Passy confirmera ce que dit le colonel Rémy dans divers courriers adressés à Ronan Caerléon, Herry Caouissin et Pierre Laurent (lettres des 19 février 1984) :
« Je n’étais pas à Londres en juillet 43, j’étais à Alger, mais je peux vous affirmer qu’à ma connaissance, jamais le BCRA n’a donné l’ordre à qui que ce soit d’abattre un collaborateur. Donc ce qu’affirme cette personne est un faux. Si des collaborateurs ont été abattus, ce fut toujours par suite de décisions prises localement par les réseaux de renseignements de telles ou telles organisations de résistances». (extrait de la lettre du Colonel Passy).
On notera que le colonel Rémy et le colonel Passy évitent de citer les auteurs de l’assassinat, les communistes.
On sait désormais, à moins de « révélations tardives » qui resteraient encore à être prouvées, que c’est la résistance communiste, et elle seule, qui donna l’ordre d’assassiner l’abbé Perrot, et d’ailleurs, elle s’en fera gloire. Comme elle assassinera en 1944 les abbés Lec’hvien, Rallier et le séminariste Philippon Le Ven, et cherchera aussi à assassiner Dom Alexis Presse.
Cependant, très perverse, la résistance communiste, fera couvrir l’assassinat par les Forces françaises libres, grâce à la complicité de l’enfant qui travaillait pour… le colonel Rémy, et qui le quittera pour venir en Bretagne créer son propre réseau (cf lettre de Ronan Caerléon du 20.10.82 à un nommé Raoul). D’une certaine manière, le doute persiste tout de même sur la responsabilité directe ou indirecte de Londres dans ce crime… mais certainement pas du BCRA comme l’affirment quelques personnes dans leurs ouvrages.
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2 réponses à “Le BCRA a-t-il vraiment ordonné l’exécution de l’abbé Yann-Vari Perrot ?”
La grande gloire de la résistance communiste en Bretagne, c’est d’avoir assassiné plus de civils Bretons que de soldats allemands ! De vaillants combattants ! Gant ar vezh !
Pour les gens de ma génération, né dans l’immédiat après guerre, il a toujours été admis que l’abbé Perrot a été assassiné et non exécuté par les communistes particulièrement actifs et représentés dans cette partie du Finistère à cette époque. Certes l’abbé Perrot n’aimait pas les communistes et il ne s’en cachait pas , mais il n’a jamais été prouvé qu’il ait collaboré avec les allemands ou qu’il ait dénoncé des résistants, même FTP, à ceux ci.